Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Le Canal de Provence: de l’eau à volonté depuis ans
À l’extrême nord du Var, les retenues sur le Verdon, notamment le lac de Sainte-Croix, forment une immense réserve d’eau, largement suffisante pour subvenir aux besoins de tout le département. Depuis soixante ans, la Société du canal de Provence (SCP) a pour mission de distribuer cette ressource. Son réseau, qui appartient à la Région depuis 2009, qui s’étend principalement sur la région aixoise, étoile également vers le littoral varois, jusqu’à Saint-Raphaël. Christian Magnin, directeur d’exploitation de la SCP, explique la mission et les enjeux de l’entreprise. « La Provence est soumise à un climat méditerranéen, c’est-à-dire sec en été. L’eau que l’on y trouve est distribuée entre deux ressources : locales, c’est-à-dire les nappes phréatiques et les rivières de surface, et de retenue La première est fragile, notamment en été. Une sécheresse peut y avoir des incidences graves sur l’environnement. La seconde, alimentée par les régions alpines, est plus que suffisante et totalement sous contrôle. En soixante années d’exploitation, la SCP n’a jamais eu à ponctionner plus d’un tiers du volume disponible. »
Un problème de priorités
Christian Magnin n’y va pas par quatre chemins : si le Var souffre de sécheresse, c’est à cause d’une mauvaise prise en compte des ressources issues des retenues : « Les collectivités estiment que leur source d’eau principale est locale, et ne font appel aux eaux de la SCP qu’en cas d’urgence. C’est exactement l’inverse qu’il faudrait faire. » Évidemment, l’explication semble simple : la SCP ne donne pas son eau… « Le tarif d’urgence est, logiquement, bien plus élevé que celui d’une fourniture “à l’année” ou saisonnière. On voit des agriculteurs ou des communes qui laissent mourir leurs productions, leurs espaces verts alors que notre eau passe parfois à quelques mètres de là… Il faut faire le calcul: ça vaut généralement le coup de sauver ses cultures moyennant une certaine somme plutôt que de tout perdre… » Outre la logique économique, Christian Magnin développe l’argument de la logique écologique : « utiliser de l’eau de retenue évite tout risque d’impact sur les milieux naturels. »
Des arrêtés trop « simples »
Ce que le directeur d’exploitation dénonce également, ce sont les arrêtés préfectoraux édictés en cas de sécheresse (lire ci-contre ):« Alors que le Vaucluse ou les Bouches-du-Rhône font la distinction entre les différentes ressources, locales ou de retenue, le Var refuse de la faire. Nous nous retrouvons dans une situation où des clients de la SCP, dont l’alimentation en eau est assurée à 100 %, n’ont pas le droit de l’utiliser. »( lire l’explication de la DDTM ci-dessus). Au-delà de cette mésentente administrative, la SCP, prête à déverser 250 millions de m3 d’eau à ses clients, ne craint nullement la sécheresse qui s’annonce. « Seuls le centre et le haut Var, dans lesquels notre réseau n’est pas encore déployé, risquent réellement de souffrir d’un manque d’eau cet été. Partout ailleurs, il n’y a qu’à ouvrir les vannes. »
1. Lacs de Castillon (Alpes-de-Haute-Provence, 85 millions de m3), de Sainte-Croix (frontière Alpesde-Haute-Provence/Var, 760 millions de m3, dont 140 réservés à la SCP), de La Verne (Var, 8 millions de m3), de Carcès (Var, 8 millions de m3) ou de Saint-Cassien (Var, 60 millions de m3).