Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

A n’y plus rien comprendre

- Par MICHÈLE COTTA

Un Président venu de la gauche le lundi, un Premier ministre venu de la droite le mardi, c’en est trop pour le PS et les Républicai­ns qui y perdent leur latin. Normal. Une bonne partie des mesures annoncées par Edouard Philippe dans son discours de politique générale pourrait être acceptée, et même recommandé­e, par les Républicai­ns, désormais baptisés Canal historique. Et d’abord, son constat : en écho à la phrase de François Fillon sur la France dont il héritait en , « au bord de la faillite », Edouard Philippe a parlé, lui, en boxeur qu’il est, d’une France « dans les cordes. » Même accord sur une partie au moins, de la ligne politique : diminution de la dette excessive de la France ; retour à la règle, fatidique, des  % ; restaurati­on nécessaire de la confiance, qui, comme on sait, ne se décrète pas ; rapprochem­ent de l’Etat et des territoire­s, dans un délicat équilibre entre jacobins et girondins, aucune de ces annonces ne peut faire reculer d’horreur les députés L.R. Comme l’annonce du gel du point d’indice des fonctionna­ires, ou même le non-renouvelle­ment de ceux d’entre eux qui partent à la retraite. Ces recommanda­tions figurent en effet peu ou prou dans le programme politique des Républicai­ns. Même embarras du côté socialiste. Qui, parmi les députés PS peut s’élever contre la préservati­on du système de sécurité sociale, « patrimoine, a dit Edouard Philippe de ceux qui n’ont rien. » ? Qui, pour s’opposer à un accès égal aux soins de santé, à la lutte contre les déserts médicaux ou contre la pauvreté, au pass-culture pour les jeunes désargenté­s qui aiment la lecture. Lequel des parlementa­ires socialiste­s pourrait s’élever contre la volonté de dialogue social ? Le discours de politique générale du Premier ministre a donc semé, et ce n’est pas pour lui déplaire, le désarroi chez les Républicai­ns, le malaise chez les socialiste­s. Tout au plus les uns, à droite, demandent-ils où diable le chef du gouverneme­nt trouvera les économies nécessaire­s pour répondre aux sévères injonction­s de la Cour des comptes. Tandis que dans les rangs socialiste­s, ou plutôt dans ceux de la nouvelle gauche, nom choisi pour l’intitulé de leur groupe parlementa­ire, certains craignent que, derrière les propos amènes et tranquille­s d’Edouard Philippe, ne se profile une politique d’austérité qui ne dit pas encore son nom. Ainsi le petit groupe PS est-il apparu divisé entre ceux qui ont voté pour ou contre la confiance au Premier ministre, et ceux qui se sont finalement abstenus. La confusion est encore plus grande de l’autre coté de l’hémicycle. Après avoir mis en cause personnell­ement le Premier ministre qu’il a accusé d’avoir trahi ses anciens camarades, le président du groupe républicai­n, Christian Jacob n’a finalement pas voté la censure, et s’est contenté de s’abstenir avec une majorité de ses collègues. Quant au groupe des Républicai­ns dit constructi­fs, il s’est divisé entre l’abstention et la confiance. Bref, un chat n’y retrouvera­it pas ses petits. C’est ainsi que Jean-Luc Mélenchon a beau jeu de se dire le seul réel opposant à Emmanuel Macron. Lui aussi profite du malaise des uns, du désarroi des autres.

« Bref, un chat n’y retrouvera­it pas ses petits. »

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