Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Inefficace, l’unique centre de déradicalisation ferme
Controversé dès son ouverture, l’unique centre de déradicalisation en France va fermer après moins d’un an d’existence, soulignant la difficulté à mettre en place des politiques efficaces de lutte contre l’embrigadement djihadiste. L’expérience au château de Pontourny, en Indre-et-Loire, « ne s’est pas révélée concluante », a résumé le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, évoquant d’autres pistes d’études. Ce centre « ouvert, sur la base du volontariat, a montré ses limites », a-til ajouté dans un communiqué. D’une capacité de 25 personnes, le centre, ouvert en septembre, n’accueillait déjà plus personne en février. Au total, neuf pensionnaires, des jeunes radicalisés en voie de marginalisation, y ont séjourné mais aucun d’entre eux n’a suivi l’intégralité du programme prévu, relève le ministre. Ce site pilote, qui devait annoncer l’ouverture d’autres centres du même type d’ici fin 2017, visait à accueillir des jeunes de 18 à 30 ans « envoiede radicalisation » et non pas des personnes condamnées, des personnes fichées « S » ni de « revenants » de la zone irako-syrienne.
« Une gabegie financière »
Qualifiée de « fiasco complet » par le président de la commission des Lois du Sénat, Philippe Bas, lors d’un rapport d’étape en février, cette expérimentation très attendue dans un pays frappé par une vague d’attentats djihadistes sans précédent a été très critiquée. D’autant qu’en janvier, l’un de ses pensionnaires avait été écroué pour avoir tenté de se rendre en 2016 en zone irako-syrienne, suscitant l’indignation. Son admission à Pontourny posait question car cette structure avait été présentée comme devant accueillir des personnes en voie de radicalisation.
Des solutions alternatives
La mission d’information « désendoctrinement, désembrigadement et réinsertion des djihadistes en Europe », présentée au Sénat en juillet, critiquait aussi la « gabegie financière » de l’Etat face à un « phénomène complexe, multifacettes, qui attend des réponses nombreuses et pas seulement répressives ». La fermeture de Pontourny ne signifie pas « l’abandon d’une politique de prise en charge des publics en voie de radicalisation dans des structures adaptées », a promis le ministre de l’Intérieur. « Le gouvernement étudiera notamment la possibilité d’ouvrir des structures de petite taille pour y accueillir des individus sous main de justice (personnes faisant l’objet d’une mesure restrictive ou privative de liberté par décision de justice, ndlr) et y développer des solutions alternatives à l’incarcération ». Muriel Domenach, secrétaire générale du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), a été chargée de formuler des propositions, en lien notamment avec les ministères de l’Intérieur et de la Justice. « La fermeture de ce centre ne doit pas occulter la réalité de la prise en charge en France qui progresse » ,at-elle déclaré. Quelque « 2 600 jeunes et 800 familles sont actuellement pris en charge via le dispositif de prévention (...) pas par des gourous mais par des éducateurs de rue, les maisons des adolescents, des psychologues », a-t-elle rappelé.