Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

« Quand je vais voir un film français, j’ai l’impression d’aller au bureau »

- PHILIPPE DUPUY

Dans La Lectrice, qui lui valut son premier César (celui du meilleur second rôle), Patrick Chesnais incarnait un Pdg timide qui payait Miou-Miou pour lui lire L’Amant de Marguerite Duras. Inversion des rôles : depuis deux ans, c’est lui qui fait la lecture à haute voix pour le Festival des mots. L’an dernier, c’est à Saint Martin Vésubie, le 14 juillet, pour l’ouverture du festival, qu’il a appris ce qui se passait à Nice (lire ci dessous). Après avoir participé à la cérémonie commémorat­ive le mois dernier, l’acteur était de retour sur la Côte d’Azur pour une nouvelle lecture, à Villeneuve Loubet cette fois, avec à son programme, un texte de Didier Van Cauwelaert. « Ce n’est pas moi qui ai choisi, mais cela tombe bien, car j’aime beaucoup Didier Van Cauwelaert, explique-t-il. Je le connais depuis le tournage de Triplex de Georges Lautner dont il avait écrit le scénario. Nous avons même dîné un jour chez ses parents qui habitaient sur la Prom.» À l’évocation de la Promenade, le regard clair s’assombrit : le souvenir du 14 juillet 2016 est encore présent et douloureux. « La lecture m’apaise, confie-t-il. Elle me rappelle qu’il y a aussi de la grandeur dans ce monde, pas que de la lie. Je lis plusieurs livres à la fois, ce qui n’est pas forcément bien, mais je suis un peu boulimique. À 16 ans au Conservato­ire de Rouen, moi qui n’étais pas bon élève, je me suis mis à lire tout Shakespear­e et tout Molière. Je suis tombé amoureux de la langue théâtrale. J’en lis encore beaucoup : Goldoni, Musset, Beckett...»

Une pièce à la rentrée

Enfant, son livre de chevet était L’Homme des vallées perdues . Un western que George Stevens adaptera en 1953 au cinéma. Est-ce cela qui l’a poussé à faire du cinéma? Allez savoir... « En tout cas, seul le cinéma peut encore me détourner de la lecture. Comme je travaille beaucoup, je n’ai pas forcément le temps d’aller en salles, mais je vois les films en VOD. Je regarde plutôt des films étrangers : quand je vais voir un film français , j’ai l’impression d’aller au bureau.» C’est vrai qu’en presque 45 ans de carrière, l’acteur à la moustache la plus célèbre du cinéma français (après celle de Jean Rochefort) a connu le ban et l’arrière ban de la profession. Sans trop se tromper dans ses choix, malgré une prédilecti­on pour la comédie, genre risqué pour lequel il obtint – en 1968 – le premier prix du Conservato­ire de Paris : « J’ai la réputation d’être intransige­ant dans mes choix, mais c’est totalement faux, avoue-t-il. Il y a des films dont je savais qu’ils ne seraient pas bons et j’ai pris le chèque quand même. Mais c’était il y a longtemps ». Depuis son César pour Je ne suis pas là pour être aimé de Stéphane Brizé en 2006, Patrick Chesnais enchaîne ses meilleurs rôles. On sera curieux de le voir dans la nouvelle version de Vidocq que va tourner Jean-François Richet (Mesrine ) aux côtés de Vincent Cassel et Fabrice Luchini. Mais surtout dans Moi et le Che de Patrice Gautier dans lequel il joue « un ancien compagnon de route de Che Guevara qui se demande, 50 ans après, s’il ne l’a pas trahi à son insu, un soir de biture ». Un film « complèteme­nt barjot », dont la sortie est prévue pour le 15 novembre. D’ici là, l’acteur sera au théâtre de la Michodière, à Paris, avec Tant qu’il y a de l’amour, une pièce burlesque où il aura pour partenaire Marie-Anne Chazel. La retraite ? Il a « trop de belles rencontres et de voyages à faire pour y penser ». Tant mieux pour nous.

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(Photo Franck Fernandes) Patrick Chesnais était de retour à Nice pour le Festival des mots.

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