Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Un modèle de société créateur de richesse
Blandine et Vincent Arcusa sont paysans boulangers à Tourves et fiers de l’être. Depuis 2014, ils cultivent du blé tendre, du blé dur, du petit épeautre, du seigle, des pois chiche et de la prairie. À bras, dans le fournil de Bertrand Allais, autre agriculteur bio, ils transforment leurs céréales en pain, vendu en circuit court et dans quelques points de vente spécialisés. La paille est également valorisée. Ces deux ingénieurs agronomes assument un choix de vie et sont très déçus des choix ministériels.
« Nous risquons de tout perdre »
« On revendique, mais on n’est pas dans la complainte, précise d’emblée Vincent, membre de la Confédération paysanne. Quand on a commencé, on a bénéficié des aides à l’installation. On perçoit l’aide au maintien parce que nous sommes implantés sur une zone à enjeu eau (bassin-versant Caramy Issole, NDLR) et des droits à paiement de base en fonction de la surface cultivée. Que les aides ne nous fassent pas vivre, c’est normal. Mais on fait faire des économies au pays, sur l’eau par exemple, car comme nous ne polluons pas, les collectivités font des économies sur les traitements de l’eau. » Ce n’est pas le cas avec l’agriculture conventionnelle, pollueuse des sols et des nappes phréatiques, tout en étant largement subventionnée. Les agriculteurs bio doivent également payer l’organisme certificateur (400 à 600€ par an), pour justifier qu’ils cultivent bien en bio. « Ce sont des contraintes pour nous, mais des garanties pour le consommateur » souligne Blandine Arcusa. Après la décision du ministère de l’Agriculture, « on est dans un certain flou pour les années à venir, dit-elle. On risque de tout perdre. Notre plan de financement n’est pas basé sur les aides, et on n’en dépend pas parce qu’on valorise bien. Mais une fois par semaine, on embauche quelqu’un pour nous aider. C’est un emploi qu’on souhaiterait pérenniser. Et puis, ces petites aides sont des incitations à passer le cap de l’agriculture conventionnelle à la bio».
Nos dirigeants ont fait un choix de société
Les structures de soutien ont, elles aussi, de moins en moins de fonds. Or, « les producteurs ont besoin de cet appui technique, on est en train de le perdre ». Le double langage du gouvernement les désole. « Il organise des États généraux de l’alimentation et en même temps prévoit des coupes budgétaires. L’arbitrage est déjà en défaveur de la bio. C’est un choix de société que nos dirigeants ont fait, regrette Vincent Arcusa. Ils auraient pu en rester au statu quo. Ils auraient pu aussi soutenir la bio. » Pourtant, le couple assure : « On peut bien vivre du bio. Nous sommes des entrepreneurs, des TPE qui créent de la richesse. Le modèle économique marche, nous fait vivre, ajoute son épouse. On peut aussi mesurer le bonheur au travail. On est entouré de personnes qui travaillent comme nous et qui sont contentes de ce qu’elles font parce qu’on vit notre modèle de société. » Un modèle «de développement territorial, de santé publique. Avec la bio, tout le monde est gagnant ». Et les consommateurs en redemandent.