Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Arrestation biscornue après un PV sur une aire de l’A
Verbalisée pour s’être garée sur une place handicapée, une Toulonnaise conteste les conditions de son menottage – devant ses enfants. Elle refusait d’être filmée par une caméra de télévision
Au départ, Laeticia sait qu’elle est en tort, elle le reconnaît sans détour. Elle n’avait pas à se garer sur cette place handicapée de l’aire autoroute à Mandelieu-la-Napoule (Alpes-Maritimes). Elle a accepté la verbalisation, son principe. Et ne redit rien à ce sujet-là. C’est après, que le contrôle a mal tourné. Après que ses papiers lui ont été rendus. Lorsque Laeticia s’est rendu compte qu’elle était filmée, elle s’est exclamée : « C’est quoi cette caméra ? » Elle n’a pas réussi à obtenir que le caméraman baisse son objectif. Et quand elle a voulu à son tour filmer la scène avec son téléphone portable, c’est avec des menottes au poignet qu’elle a fini. Puis au poste. La gendarmerie, de son côté, se retranche derrière la légitimité de l’action de ses militaires, sans vouloir répondre sur le dossier précis. Par leur discernement, les militaires ont fait face à la situation de façon appropriée, est-il dit en substance (lire ci-dessous). Retour sur une arrestation un peu compliquée. Pour des suites judiciaires inexistantes ?
- La place handicapée
Premier acte, le 29 août vers 15 h 30, aire de l’Estérel, sur l’A8. Laeticia se gare sur une place handicapée. Rétrospectivement, elle s’en trouve confuse. La pause pipi sur la route de l’aéroport de Nice, avec ses deux filles de moins de cinq ans, une jeune fille au pair qui va prendre l’avion et une amie, a duré plus longtemps que prévu. Des gendarmes apparaissent, constatent l’infraction et dressent un PV. « C’est allé très vite, j’étais en train de reculer. » Laeticia sort de sa voiture. Pour son absence de civisme, elle écope d’une amende de 130€. On lui rend ses papiers. Elle s’apprête à repartir.
- La caméra tourne
Laeticia se rend compte soudain qu’une caméra filme la scène. Elle se précipite. « Je vous demande de ne pas me filmer. » Elle aura beau répéter cette phrase à l’envi, jamais elle n’obtiendra gain de cause. Selon elle, le cameraman lui déclare : « Vous êtes déjà en infraction, vous n’avez rien à dire .» Ambiance. En réponse, Laeticia s’empare de son propre téléphone et tente de filmer à son tour la scène. Cette fois, c’est la femme gendarme qui lui dit qu’elle n’en a pas le droit. « Je représente l’État », aurait-elle affirmé. Laeticia reconnaît qu’elle a répondu par un juron. « Ils voulaient appeler un supérieur hiérarchique. J’ai dit que je n’attendrais pas, j’avais un avion. » C’est après avoir remis les mains sur son volant, que Laeticia se fait menotter. À l’intérieur de l’habitacle de sa voiture, donc. La jeune fille au pair est en pleurs, mais ce n’est rien à côté des deux petites « qui hurlaient ».
- L’audition à la gendarmerie
Direction le peloton autoroutier de la gendarmerie, en voiture bleue. Là, et toujours filmée jusque dans les couloirs, selon son témoignage, Laeticia finit dans un bureau à répondre aux questions d’un gradé. La caméra est celle d’un journaliste qui prépare un reportage de télévision. Laeticia estime qu’on bafoue ses droits. On lui fait la leçon. « Si vous ne vous étiez pas emporté, vous seriez déjà à l’aéroport. » L’avantage est qu’il y a des images de toute la scène. L’inconvénient est que Laeticia ne les verra pas. Et les siennes ? Elle finira par effacer sa propre vidéo, comme on le lui demande. Elle n’a pas pu lire non plus la convention qui liait la gendarmerie à la boîte de production et à la chaîne de télé.
- Vers une plainte ?
Aujourd’hui encore, Laeticia s’interroge. Pourquoi a-t-elle été menottée et menée au poste, dans la voiture des gendarmes ? Qu’est-ce qui légitimait l’interpellation ? À ses yeux, l’épisode relève d’un « abus de pouvoir ». Sous le coup de la colère, elle a publié sur les réseaux sociaux son témoignage et récolté avis et soutiens. Un médecin avait constaté « un choc psychologique », avec huit jours d’ITT. Laeticia assure qu’aucune procédure n’a été engagée à son encontre – elle n’a signé aucun PV. Élément que la gendarmerie refuse de confirmer. La Toulonnaise compte écrire au procureur de la République compétent. Son avocat s’étonne d’une « vraie fausse interpellation, sans audition, ni garde à vue. Ce qu’on a au niveau procédural, ce n’est qu’un modeste PV à 130€». Me Emmanuel Lambrey poursuit le raisonnement. « Il faudrait entendre la version des gendarmes, mais le sentiment est qu’ils ont voulu faire monter la mayonnaise. Peut-être pour la télé ? » Laeticia se demande encore si les images de son arrestation
seront diffusées un jour. Et pourquoi elle n’avait pas, elle, le droit de filmer.