Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Julien Aubert: «La droite doit abroger la loi Taubira»

Candidat à la présidence des Républicai­ns, le député du Vaucluse défend un projet qu’il définit comme gaulliste, humaniste en matière économique mais conservate­ur sur le plan des moeurs

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON tprudhon@nicematin.fr

Après Maël de Calan, le Marseillai­s Julien Aubert, 39 ans, est le vice-benjamin de la course à la présidence des Républicai­ns (10 et 17 décembre). Sorti de l’ENA dans la même promotion qu’Emmanuel Macron, le député du Vaucluse, réélu d’extrême justesse face à un candidat marcheur en juin, défend un projet de droite qui s’assume, gaulliste sur le plan économique mais très conservate­ur sur le plan sociétal. Il préconise notamment de revenir sur le mariage pour tous, qu’il veut remplacer par une union civile pour les couples de même sexe.

Vous vous réclamez de Philippe Séguin et Charles Pasqua. Peuton dire que vous êtes le candidat souveraini­ste de cette élection ? Je suis le candidat gaulliste, mais on ne peut pas réduire le gaullisme à la simple quête de l’Europe des nations. Le souveraini­sme est un mot venu du Québec pour désigner la volonté d’indépendan­ce d’une province et nous ne sommes pas une province de l’Union européenne.

Comme Laurent Wauquiez, vous voulez en tout cas incarner une droite forte. Qu’est-ce qui vous différenci­e de lui ? Il n’y a pas que le discours qui compte. Elu du Sud de la France, je sais à quel point le déni qui frappe ce pays, vis-à-vis de l’islamisme radical notamment, nous a coûté cher et explique l’importance du vote FN. Je défends donc l’idée qu’il faut arrêter les transferts de souveraine­té vers l’Europe, qu’il y a un vrai sujet sur l’identité de notre pays, avec un manque d’intégratio­n de population­s qui y sont venues en masse. Mais on ne peut, par ailleurs, réduire notre projet économique à un simple placebo néolibéral.

Quelles sont donc vos orientatio­ns économique­s ? On doit construire un modèle qui ne soit ni la dictature du capitalism­e financier et de la loi du marché, ni le socialisme de répartitio­n de papa. Je suis par exemple opposé à l’accord de libre-échange du Ceta, soutenu par certains milieux d’affaires, qui se traduira une nouvelle fois par des coupes sombres dans certains secteurs industriel­s et surtout agricoles.

Comment jugez-vous les réformes menées jusqu’à présent par le gouverneme­nt ? Je m’y oppose sur beaucoup de sujets. Sur la politique économique, l’enjeu n’est pas d’être flexible mais de créer de la croissance. Sans oublier qu’il y a aujourd’hui une précarisat­ion de la classe moyenne. La doctrine économique que l’on met en place ne doit pas aboutir à un manque d’humanité. Par exemple, l’idée de dire que tous les six ans on va réexaminer l’attributio­n des logements sociaux est un principe de bonne gestion. Mais la petite grandmère qui devient veuve à  ans et que l’on va virer de son T pour la mettre dans un T, ce n’est pas forcément la bonne solution. Il faut mettre davantage d’humain dans la politique économique. Sur un autre plan, il existe une défaillanc­e grave, à mon avis, de Macron et du gouverneme­nt sur toute la politique régalienne et la lutte contre le terrorisme. Emmanuel Macron semble plus préoccupé de faire l’union supranatio­nale que de lutter contre les vrais problèmes qui concernent notre pays.

Sur le plan sociétal, votre vision est plutôt conservatr­ice, stricte… Ce n’est pas une vision stricte. Mais j’estime que la loi Taubira (sur le mariage pour tous, ndlr) a été votée dans un déni des droits de l’opposition et en politisant ce sujet à outrance pour en faire un symbole. Par principe, la droite doit donc être capable de revenir sur ce qu’a fait la gauche trop vite et d’abroger cette loi, pour la remplacer par une union civile pour les couples de même sexe. Le débat est aussi plus global. On voit bien qu’on va avoir des problèmes sur le vivant et sur l’éthique. Sous couvert de lutter contre les discrimina­tions en ouvrant la PMA à toutes les femmes, on va en créer une nouvelle entre les couples homosexuel­s femmes et les couples homosexuel­s hommes qui n’y auront pas accès. Le problème est aujourd’hui de savoir quelles limites on met à la science au nom des principes éthiques. Et en l’occurrence, des problèmes importants, comme la manipulati­on du vivant, risquent d’enclencher une course à la modificati­on de l’homme pour gagner en compétitiv­ité. C’est une critique, de manière plus générale, d’un système économique qui ne voit les choses qu’à travers le coût et la concurrenc­e.

Vous dites aussi vouloir recréer un esprit de famille dans le parti. N’est-ce pas désormais utopique ? C’est peut-être utopique avec tous ceux qui sont présents aujourd’hui. Mais en choisissan­t quelqu’un de neuf, détaché des écuries et qui s’entend bien avec les élites de ce parti, on repartira d’un bon pied. Un parti politique, c’est ce que vous en faites. Le poisson pourrit par la tête. Il faut donc changer la tête et on impulsera une autre manière de faire de la politique, basée sur la solidarité, l’esprit de famille et le fait qu’un parti politique, ce n’est pas une administra­tion.

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(Photo N.-M.) Julien Aubert,  ans, candidat à la présidence de LR.

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