Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Charles Richet abrite son aéroplane dans un hangar de son château à Carqueiranne
Personnalité riche et complexe, Charles Richet (-) est le fils de l’anatomiste et chirurgien Alfred Richet (-). Il a présidé la Société de psychologie physiologique, a été membre de l’Académie nationale de médecine, de l’Académie des sciences, président de la Société pacifiste, fondateur et président de la Société française d’eugénisme visant à « améliorer le patrimoine génétique de l’espèce humaine ». Écrivain, il s’est passionné pour les phénomènes paranormaux auxquels il a consacré plusieurs ouvrages – notamment sur la télépathie. Charles Richet possédait à Carqueiranne le château qui porte son nom, acquis par son père en , dans lequel sa mère mourut accidentellement à la suite de l’effondrement d’un mur. Il fit construire en un hangar par la
Les jours passent, les expériences se multiplient. Les scientifiques pressentent qu’ils sont sur le point d’effectuer d’importantes découvertes médicales. Mais arrive la fin de l’été. Il faut revenir à terre. Le Princesse Alice II reprend donc sa route vers les côtes françaises. Au passage, la rencontre avec un banc de poissons volants inspire une fable à Charles Richet. L’écrivain, en lui, est toujours en alerte ! Le Princesse Alice II accoste au port de Marseille le 19 septembre. Revenus à Paris, les docteurs compagnie Eiffel afin d’abriter son premier aéroplane. Car le domaine naissant de l’aéronautique le passionnait. En , le futur prix Nobel de Médecine, survola la mer pendant mètres au départ de la pointe Peno à Carqueiranne. Son fils Albert, aviateur, fut tué au combat pendant la Grande Guerre. Un de ses autres fils, Jacques, fut maire de Carqueiranne. Richet et Portier poursuivent leurs expériences dans leurs laboratoires.
Ils découvrent l’anaphylaxie
Ils décident d’immuniser les animaux contre la toxine issue des physalies. Le principe de l’immunisation est connu depuis les travaux de Pasteur ou du niçois Albert Calmette. Il consiste, on le sait, à injecter une dose atténuée de toxine afin d’entraîner le corps à lutter contre celle-ci. Mais ici, curieusement, le résultat est inverse : au lieu de renforcer l’immunité des animaux testés, l’injection diminue cette immunité. Les docteurs Richet et Portier, surpris, vont s’engager dans une voie nouvelle. C’est ainsi qu’ils vont découvrir l’existence de réactions liées aux anticorps. Ils vont appeler cela « l’anaphylaxie ». Le 12 février 1902, Charles Richet écrit au Prince Albert:« L’anaphylaxie semble être une découverte importante. Il est bon que chacun sache quelle en a été l’origine, et les recherches On s’est souvent demandé pourquoi le prix Nobel de médecine de n’avait pas été partagé entre les docteurs Richet et Portier puisque tous les deux sont à l’origine de la découverte de l’anaphylaxie. La seule explication est la modestie du docteur Paul Portier, toujours soucieux de se mettre en retrait. En , le prince Albert l’a nommé professeur au sein de son Institut océanographique.
faites à bord de votre yacht, à votre instigation. » En 1905, deux pédiatres autrichiens, Vaon Pirquet et Shick, vont poursuivre dans cette voie et inventer un terme qui deviendra célèbre : « l’allergie » (de « allos », autre, et « ergon », réaction). Cette notion d’allergie allait progresser considérablement dans la médecine du XXe siècle. Son appellation va finir par passer dans le langage courant. Tout le monde a oublié, aujourd’hui, que son origine remonte à une expédition faite en 1901 par le prince Albert Ier de Monaco sur son bateau-laboratoire Princesse Alice II. À l’époque, la communauté scientifique internationale sut reconnaître cela. Et c’est ainsi qu’en 1913 le professeur Charles Richet connut la consécration suprême de recevoir le prix Nobel de médecine. Imaginait-il qu’il acquerrait un jour cette gloire, lorsqu’en 1901 il voguait sur le Princesse Alice II au large des Açores et qu’il racontait sur un cahier d’écolier les exploits de la magicienne Circé ? En , Albert acquiert en Angleterre son bateau l’Hirondelle, avec lequel il effectue en des croisières en Méditerranée occidentale, en des croisières en Atlantique (Canaries, Madère, Açores, Portugal), en une croisière vers l’Islande interrompue par une tempête. De à , il organise quatre campagnes scientifiques en mer du Nord, mer Baltique et Atlantique (Açores, Terre- Neuve) en compagnie de géographes, botanistes et biologistes. Il procède à des mesures des courants de l’Atlantique Nord. Les résultats de ses campagnes sont présentés à l’Exposition universelle de Paris de . Le prince Albert fait construire en Angleterre son bateau-laboratoire Princesse Alice I. Cette goélette de trois mâts comporte deux chaloupes lance-harpons destinées à capturer les gros mammifères marins. Albert réalise sept campagnes dans les Canaries, l’Atlantique Nord et en Manche. Un record de profondeur est mesuré : mètres au sud-est de Madère. Un plateau sous-marin reçoit le nom de Princesse Alice au sud-ouest des Açores. Princesse Alice II (notre photo), lancé en , construit à Birkenhead en Angleterre, conçu pour les expériences océanographiques, est doté d’un moteur à vapeur. Il permet des chalutages à une profondeur jamais atteinte de mètres. Douze campagnes sont organisées entre et , dont celle qui fait l’objet de cette rubrique « Récit ». Une expédition au Sptizberg permet d’étudier la survie humaine dans des conditions extrêmes et ouvre la grande aventure polaire du XXe siècle. Une espèce de poisson de très grande profondeur est découverte, baptisée « Grimaldichtis profondissimus ». Le février est lancé aux chantiers navals de La Seyne, le dernier navire-laboratoire du prince Albert l’Hirondelle II. Entre et , cinq campagnes sont organisées au large de la Norvège et des Açores. La campagne de est interrompue par le déclenchement de la Grande Guerre, qui entraîne le retour du Prince à Monaco. De ces expéditions, on retient notamment une étude sur le courant du Gulf Stream, une étude sur la météorologie en milieu océanique, et la création d’instruments novateurs pour les recherches sur les océans. La carrière scientifique du prince Albert est conclue par un « Discours sur l’océan » qu’il prononça au National museum de Washington en avril , moins d’un an avant sa mort, le juin .