Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Séparation prématurée
Préoccupés par des relations qu’ils jugent difficiles avec leur(s) jeune(s) enfant(s), démunis, voire désemparés, beaucoup de parents cherchent des « recettes ».
Les parents les plus autoritaires d’Europe
«La “pollution” environnementale fait que les enfants d’aujourd’hui ne sont plus les mêmes qu’hier. Ils ne maîtrisent plus leurs émotions, et cela devient parfois ingérable pour les parents. » Autorité parentale défaillante ? La proposition fait bondir la psychothérapeute et écrivain. « On ne peut surtout pas pointer un manque d’autorité! Les parents français sont les plus autoritaires d’Europe ! La spécificité de l’éducation à la française, c’est crier. Et aussi taper. Faire preuve de plus d’autorité ne sert à rien. » Comment dès lors expliquer que nos chères petites têtes blondes continuent de nous faire sortir de nos gonds, en se montrant parfois de véritables petits despotes auxquels nous nous soumettons ? « Notre bon sens a été mis à mal par les lobbys des psychanalystes et par l’idée fondamentale selon laquelle l’enfant a des pulsions auxquelles il faut mettre des limites pour qu’ils deviennent des adultes. En réalité, les jeunes enfants ont surtout des besoins et sont confrontés à la problématique de l’attachement. » Une théorie de l’attachement qu’Isabelle Filliozat utilise comme grille de lecture et dont elle aime à rappeler qu’elle est «scientifiquement validée».
Un phénomène naturel
«L’être humain est une espèce sociale, qui a besoin, pour vivre, d’être attachée à quelqu’un. C’est un besoin primaire, du même ordre que la faim, la soif », résume-t-elle. Lorsque le bébé, le jeune enfant réclame en criant son parent, qu’il l’accapare, s’oppose, fait des crises de rage, veut être pris dans les bras, etc., cela répondrait ainsi à un besoin naturel: celui d’avoir une « figure d’attachement » à proximité. Souvent c’est celui de sa maman (« figure d’attachement principale » puisque c’est elle qui s’est généralement occupée le plus souvent et le plus durablement de lui durant les premiers mois de sa vie), mais il peut aussi s’agir de son papa et d’une autre personne qui participe à l’élever. «En cas de détresse, le bébé cherche à rétablir la proximité avec une figure d’attachement afin de retrouver paix et sécurité», résume Isabelle Filliozat. Et elle insiste : «L’enfant n’a pas d’intention mauvaise. Avant l’âge de 3 ans, on ne peut pas parler de manipulation… » Lorsque l’on évoque le risque d’empêcher l’enfant de grandir et de devenir autonome en se soumettant à ses besoins, la psychothérapeute rappelle quelques fondamentaux. «L’enfant a d’abord besoin de construire sa sécurité intérieure. C’est elle qui lui permettra de devenir naturellement autonome.» Isabelle Filliozat utilise l’image d’un porte-avions sur lequel vient se poser l’enfant pour faire le plein de carburant. « Durant les deux premières années de vie, c’est le contact et l’attention qui doivent être privilégiés. Et, contrairement à une idée répandue, ce n’est pas en nourrissant l’attachement que l’on provoque de la dépendance La peur d’être quitté, que l’autre cesse d’aimer. « Ce sentiment d’insécurité est très répandu parmi les personnes qui sont dans une relation amoureuse », observe Isabelle Filliozat. Selon la psychothérapeute, il trouverait sa source dans un manque de confiance en soi, lui-même lié à des séparations trop précoces dans la petite enfance. «Le manque d’engouement pour l’allaitement [les mères françaises arrêtent très tôt d’allaiter leurs bébés, en dépit des recommandations de l’OMS, ndlr], porte une part de responsabilité dans ces troubles de l’attachement qui fragilise l’adulte. » La psychothérapeute pointe aussi des failles dans la prise en charge de la petite enfance. « Dans les crèches, on a longtemps demandé aux professionnels de la petite enfance de ne pas trop s’attacher aux bébés, de conserver une bonne distance… Aujourd’hui, la théorie de l’attachement heureusement se développe et dans de nombreuses crèches, on permet l’attachement. » Dans l’intérêt de tous.
affective chez l’enfant, mais plutôt en le privant. » 1. Elle était invitée le 9 novembre dernier par le syndicat des orthophonistes du département des Alpes-Maritimes (sdo 06) à présenter une conférence sur ce thème. Contact : Sdo06 35, chemin du Tram 06390 Contes. Mél : sdo06.fno@gmail.com. Web : http://www.Sdo06.fr