Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Eczéma, la révolution thérapeutique en marche
Après des années de recherche, des biothérapies et des thérapies ciblées contre l’eczéma atopique modéré à sévère arrivent sur le marché
Des nuits sans sommeil, des lendemains épuisés, pas de sport pour éviter la sudation, parfois même un renoncement à la vie intime… Le quotidien des personnes atteintes d’eczéma atopique modéré à sévère est souvent empoisonné par cette affection dermatologique responsable de prurit intense. «Environ 15 % des Français en souffrent, à des degrés divers, et leur nombre est en constante augmentation depuis 20 ans», signale le Dr Abdallah Khemis, responsable de l’unité d’essais thérapeutiques dans le service de dermatologie du CHU de Nice. « Nombre de ces patients adultes souffrent depuis l’enfance d’eczéma atopique. Lassés de se badigeonner de crème, s’inquiétant – à tort – des effets secondaires des traitements topiques à base de cortisone, beaucoup renoncent à se soigner et souffrent en silence », regrette le Pr Jean-Philippe Lacour, chef du service et éminent spécialiste de cette pathologie. Pourtant le ciel s’éclaircit enfin pour ces centaines de milliers de Français, avec l’arrivée de plusieurs traitements qui devraient révolutionner la prise en charge de l’eczéma atopique. « La recherche a été plus difficile que pour le psoriasis, mais on voit enfin se profiler des molécules efficaces », se réjouit le Pr Lacour.
Début
Il y a quatre ans, nous évoquions dans ces colonnes le lancement d’essais cliniques à Nice évaluant l’effet de biothérapies sur l’inflammation chronique en cause dans l’eczéma. « 37 patients azuréens y ont participé depuis 2014. Les résultats sont très satisfaisants chez plusieurs d’entre eux, avec un contrôle total de la maladie. Le produit (le dupilumab) a ainsi obtenu son autorisation sur le marché et devrait arriver dans les officines début 2018», annonce le Dr Khemis. Des essais sont par ailleurs en cours à l’étranger pour évaluer ce traitement chez les adolescents. Et «il est probable qu’à terme les enfants pourront en bénéficier », complète le Pr Lacour. D’autres biothérapies sont également à l’essai avec l’espoir qu’elles apportent un bénéfice aux patients qui restent en échec thérapeutique. Parmi celles-ci, le nemolizumab, dans lequel les spécialistes placent beaucoup d’espoir. « Il cible une molécule chimique, l’interleukine 31, très impliquée dans le prurit. On a déjà commencé à tester ce médicament chez les patients qui souffrent de prurigo, une affection cutanée à l’origine de lésions de grattage monstrueuses
Et un essai va démarrer pour l’eczéma atopique. » À côté de ces biothérapies, sont développées des thérapies ciblées par voie orale. «Elles agissent à des niveaux très précis de la cascade inflammatoire. » Dès janvier prochain, des malades pourront participer à un essai clinique en phase 3 avec l’une de ces molécules, le baricitinib, mieux connu en rhumatologie, car récemment utilisé dans la polyarthrite rhumatoïde. L’enrichissement spectaculaire de l’arsenal contre l’eczéma atopique incite le Pr Lacour à l’optimisme. «Le paysage thérapeutique de la dermatite atopique de l’adulte est sur le point d’être révolutionné. » (1) Essai en cours au CHU de Nice. Contact : 04.92.03.62.25.