Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Le Levothyrox de Merck sur le banc des accusés
L’action collective contre le médicament employé dans le traitement de dysfonctionnement de la thyroïde débute demain. Le calendrier de cette procédure civile devrait être déterminé
Avec près de 8 000 inscrits et plus de 500 dossiers déjà été transmis à la justice, l’action collective engagée contre le laboratoire Merck dans l’affaire du Levothyrox n’est pas une mince affaire. Une première audience, technique, a lieu demain devant le tribunal d’instance de Lyon. Dite de « mise en état » et par nature très brève, celle-ci doit fixer le calendrier de cette procédure civile qui se distingue de l’enquête pénale instruite par le pôle santé du TGI de Marseille, où d’autres plaintes ont été déposées.
euros réclamés pour chaque patient
Le 24 octobre, l’avocat toulousain des plaignants, Me Christophe Lèguevaques, avait assigné Merck à Lyon, où le groupe allemand a son siège français, en déposant les 108 premiers dossiers de cette action collective. Lancée en septembre via la plateforme MySmartCab, elle vise à obtenir une indemnisation rapide pour ces malades de la thyroïde, victimes d’effets indésirables liés, selon eux, à la nouvelle formule du Levothyrox. « Aujourd’hui plus de 500 assignations ont été déposées au tribunal et 2000 autres sont en attente de l’être », assure Me Lèguevaques, qui pense rassembler « entre 3000 et 5 000 patients en procédure ». La date limite de dépôt, initialement fixée au 1er décembre, a été repoussée au 15 février « pour laisser aux malades le temps de monter leur dossier ». L’avocat réclame pour chacun une indemnité forfaitaire de 10000 euros pour la réparation des préjudices moraux, soit 5 000 euros pour le défaut d’information et 5 000 euros pour le préjudice d’angoisse.
Les plaidoiries en juin ?
Mise sur le marché fin mars, à la demande de l’Agence du médicament (ANSM), la nouvelle formule du Levothyrox fabriqué par le laboratoire Merck Serono, filiale du groupe allemand, est accusée de provoquer de nombreux effets indésirables (crampes, maux de tête, fatigue intense, vertiges ou perte de cheveux). L’audience de demain, en présence du conseil des plaignants et de celui de Merck, Me Jacques-Antoine Robert, va permettre au président du tribunal de «fixer le calendrier pour la transmission des dossiers et l’échange de pièces entre avocats ».« On connaîtra alors la date des plaidoiries, vraisemblablement pas avant juin», estime Me Lèguevaques, qui espère une décision de justice « dans l’année 2018 ». Face à la colère des patients, des stocks de l’ancienne formule du Levothyrox ont été importés d’Allemagne, sous le nom d’Euthyrox. Mais Merck a assuré jeudi qu’il ne prévoyait pas de le distribuer audelà de 2018, car ce produit doit être progressivement remplacé dans l’ensemble des pays européens au cours de l’année. Depuis le 6 décembre, un générique, le Thyrofix, du laboratoire suisse Unifarma, déjà commercialisé en Grèce et aux Pays-Bas, est disponible en France, portant à cinq le nombre de médicaments offrant une alternative. Me Lèguevaques reproche cependant à l’État et à Merck de ne pas faire appel à un sous-traitant, la société Patheon basée à BourgoinJallieu (Isère), qui selon lui fabriquerait toujours l’ancienne formule du médicament, pour le marché italien, sous le nom d’Eutirox. Mais les autorités de santé et le laboratoire ont assuré qu’il ne s’agissait pas du même produit. Jeudi, le tribunal de grande instance de Toulouse a condamné Merck à délivrer « sans délai » l’Euthyrox à 25 patients de Haute-Garonne se plaignant d’effets secondaires du nouveau Levothyrox. Merck a fait appel du jugement.