Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Signé Roselyne
Lundi
L’interview du président Macron sur France Télévisions ne mérite guère qu’on s’y attarde tant le questionnement était insipide dans une mise en scène grotesque de déambulation destinée à donner un parfum de modernité à un entretien qui n’aurait pas déparé au bon vieux temps de l’ORTF. Tout cela ne pourra réjouir que les humoristes qui y trouveront matière à moquerie et les thuriféraires à adoration. La combativité, heureusement, était à l’honneur avec un bien beau week-end tricolore. Nos handballeuses sont championnes du monde face à la Norvège, tenante du titre et archi-favorite. On ne sait qui distinguer dans l’équipe menée avec brio par la capitaine Sira Dembélé, la fin du match fut époustouflante et démontrait que là, où il y a une volonté, il y a un chemin. Quelle injustice que nos équipes féminines de hand ou de foot ne bénéficient pas du même engouement et des mêmes rémunérations que leurs collègues masculins ! Cerise sur le gâteau, pour couronner ce dimanche sportif de rêve, le beau voileux François Gabart a pulvérisé de plus de six jours le record du tour du monde en solitaire. Comme le soutenait Jacques Chirac : « Oui à la France qui gagne » !
Mercredi
La polémique insensée surgie à propos des conditions de voyage du Premier ministre à son retour de Nouméa en dit long sur les exaspérations et les frustrations qui minent notre société. Le déplacement en Nouvelle-Calédonie est une obligation épuisante qu’il est classique pour une délégation primo ministérielle d’effectuer dans l’A présidentiel. Celui-ci étant retenu pour le déplacement d’Emmanuel Macron en Algérie, le retour s’est effectué dans un avion militaire sur le trajet Nouméa-Tokyo, ce type d’appareil étant utilisé d’habitude pour des transports de militaires ou de sécurité civile. Puis Édouard Philippe a retrouvé à partir de Tokyo les conditions classiques de voyage inhérentes à sa fonction. Les dépenses globalement engagées dans le cadre de cette mission ressortent tout compris de coûts forcément élevés mais tout à fait habituels en l’occurrence. Il n’y avait donc pas de quoi fouetter un chat dans cette histoire de cornecul. Ce qui est intéressant n’est donc pas de savoir s’il y a ou non scandale, le très sourcilleux René Dosière, peu porté à l’indulgence et pourfendeur sévère des gaspillages de nos élus et de nos ministres, a lui-même conclu que cette affaire
n’en était pas une. Ce qui est catastrophique est que nous soyons passés dans une société du spectacle où l’information et l’explication cèdent le pas à ce que les amuseurs appellent le « storytelling » .Ilest certes moins divertissant de s’intéresser à la complexité de la coexistence des communautés caldoche et kanake sur le Caillou, aux enjeux écologiques de la barrière de corail de Nouméa et des rejets toxiques de l’extraction du nickel ou encore du défi diplomatique et stratégique du maintien de la France dans le Pacifique. Panem et circenses... Mais il convient aussi de reconnaître que ce chambard est révélateur d’un sentiment de colère et parfois de haine qui traverse notre peuple de part en part et ne trouve plus de médiation dans des partis d’opposition agonisants et des syndicats explosés. La majorité En marche ! ferait bien de se méfier des bons sondages et de l’atonie toute apparente de l’opinion publique.
Jeudi
«Il est catastrophique que nous soyons passés dans une société du spectacle où l’information et l’explication cèdent le pas au “storytelling”.»
Dans la soirée, tombent les résultats des élections régionales en Catalogne. Les indépendantistes triomphent et les trois partis qui se réclament de la partition avec l’Espagne emportent la majorité absolue en sièges à la Generalitat, le parlement catalan. Mariano Rajoy est sévèrement sanctionné, le Partido Popular subissant un revers historique et ne disposant plus que de
trois sièges dans cette assemblée. Toutefois les indépendantistes ont du souci à se faire. Ils avaient argué du résultat du pseudo référendum organisé par eux le er octobre dernier dans des conditions rocambolesques. Cette « consultation » avait vu le oui à l’indépendance l’emporter à , % des voix et Carles Puigdemont s’avançait face à Madrid, porté par un peuple catalan qui semblait quasi-unanime. Caramba, encore raté ! Le résultat est clair : les séparatistes sont toujours minoritaires en voix et la légitimité a quitté le clan d’une coalition disparate sur le plan idéologique et tactique. Plus inquiétant pour nos compères est le surgissement du parti Ciudadanos farouchement opposé à l’indépendance, mené par une jeune femme brillante Inés Arrimadas et qui devient le premier parti de la Generalitat. Il était évidemment plus confortable pour Puigdemont et ses alliés d’avoir comme meilleur adversaire un Rajoy démonétisé par sa froideur, ses scandales et ses échecs. Le loyalisme a maintenant son bastion à l’intérieur du fief séparatiste. Si la señora Arrimadas sait surfer sur la vague du dégagisme, Puigdemont a du souci à se faire.
Vendredi
Psychodrame au gouvernement à la suite des conclusions des États généraux de l’alimentation. Les rôles ont été savamment distribués à l’avance par le félibre machiavélique qui siège à l’Élysée dans l’antonymie classique bon flic/méchant flic. Dans le rôle du méchant, le dénommé Stéphane Travert, ministre ex-socialiste de l’Agriculture, donc réputé vendu aux lobbys productivistes de la FNSEA et aux malfaisants de l’agrochimie. Le bon, c’est Nicolas Hulot, le gentil ministre écologiste qui, sur le mode de « retenez-moi ou je fais un malheur », déclare pompeusement : « Le compte n’y est pas ». Effectivement, après cinq mois de travaux, les propositions de ces États généraux en ce qui concerne la nécessaire transition de notre système agricole étaient pâlottes pour ne pas dire absentes. Ouf ! Édouard Philippe a reçu ce matin le gentil Nicolas, lui a assuré qu’on a satisfait d’abord les paysans du méchant Stéphane et qu’on contentera les écolos... plus tard. Le gentil Nicolas peut donc déclarer qu’il a été entendu à % et qu’il reste au gouvernement en jurant au passage que son départ n’a jamais été envisagé. Tout cela sent la pantalonnade à plein nez... Nos ministres vont donc passer un bon réveillon en espérant que le saumon fumé ne sera pas gorgé de métaux lourds, que la dinde n’aura pas été élevée en batterie et agrémentée de légumes arrosés aux pesticides et que les acides gras trans de la bûche ne majoreront pas de manière significative leurs risques cardio-vasculaires. Je vous en souhaite de même chers lecteurs de cette chronique et vous adresse mes voeux de douces fêtes de la Nativité. Que le Père Noël vous apporte le plus beau des cadeaux, le sourire de ceux que vous aimez.