Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

L’engagement de Blaise Cendrars contre la guerre de -

- ANDRÉ PEYREGNE Le gâteau des rois était partagé en autant de morceaux que de convives sans oublier la part de Dieu, – la part du pauvre. NELLY NUSSBAUM

Deux robustes tours carrées dominant un ensemble de bâtiments étagés à flanc de colline : telle est l’étonnante architectu­re du château de Tourrettes dans le Haut Var. Sa silhouette se découpe sur le ciel lorsqu’on roule sur la route en contrebas qui mène à Fayence. Que vient faire en ce lieu cet étrange château ? Il a été construit dans les années 1 840 par un ingénieur de Tourrettes au glorieux destin, JacquesAle­xandre Fabre. La vie étonnante de ce Varois a été reconstitu­ée par l’historien de ce village, Gérard Saccoccini. Né à Tourrettes en 1782, Jacques-Alexandre Fabre entra au collège de Draguignan. Contraint à faire vivre sa famille à la mort de son père, médecin, il abandonne ses études à l’âge de 14 ans. Un parent nommé Fabre comme lui l’engage dans les travaux publics à Draguignan. Cela lui permet de devenir suffisamme­nt érudit pour entrer, lui, le villageois varois, dans la prestigieu­se École polytechni­que à Paris. Diplôme en main, il revient dans notre région pour construire la route en corniche entre Nice et l’Italie qui passe par Menton. Appelé dans la région parisienne, il creuse ensuite un canal entre les bassins de la Loire et de la Seine qui fait l’admiration de tous.

Concevoir un pont sur la Neva : un défi

On se trouve, à l’époque, dans les années des grandes victoires napoléonie­nnes commencées en 1805 par la bataille d’Austerlitz. Le 14 juin 1807, les Français battent l’armée russe en Prusse orientale, entraînant la signature du traité de Tilsitt. Napoléon 1er et le tsar Alexandre 1er se rencontren­t à cette occasion et, au cours d’une conversati­on, l’empereur russe dit à peu près ceci à son homologue français : « Les voies de communicat­ion sont en piteux état dans ma capitale Saint-Pétersbour­g. Auriez-vous en France quelqu’un de compétent susceptibl­e de les réaménager ? » C’est alors que Napoléon Ier proposa la candidatur­e de JacquesAle­xandre Fabre. Notre Varois est nommé à la direction pédagogiqu­e de l’École des ponts et chaussées de Russie. L’empereur Alexandre 1er le met au défi de concevoir un pont sur la Neva, à SaintPéter­sbourg, face à la statue équestre de Pierre-leGrand, à un endroit où le fleuve atteint treize mètres de profondeur. Fabre s’exécute. D’autres ponts suivront sur le trajet entre Saint-Pétersbour­g et Moscou.

Il fait travailler les habitants de Tourrettes

Jacques-Alexandre Fabre est également chargé de construire des cités d’accueil pour les militaires chargés de contrôler les régions éloignées de l’empire russe ou les pays limitrophe­s récemment annexés comme la Géorgie, la Finlande, l’Azerbaïdja­n, la Bessarabie. Fabre crée des résidences, des casernemen­ts, des quartiers entiers. Une fois fortune faite, il retourne au pays natal. Voulant donner du travail aux habitants de Tourrettes qui, à l’époque, sont dans la misère, il décide de construire un château dans son village. Il prend pour modèle celui qu’il a fait édifier dans la région militaire de Saratov sur la Volga. Inachevé à la mort de Jacques-Alexandre Fabre, en 1 844 à l’âge de 62 ans, le château restauré en 1965 est devenu une copropriét­é. Dans sa puissance architectu­rale, il rappelle aux visiteurs du Var qu’au XIXe siècle les compétence­s d’un villageois de Tourrettes avaient su séduire un tsar.

L’Épiphanie, fête chrétienne célébrée le  janvier, commémore la présentati­on de Jésus aux trois Rois mages. Dans le comté de Nice, cette tradition donnait lieu à quelques farces, dont les enfants étaient les innocentes victimes

Depuis l’Antiquité, l’Épiphanie (du latin Epiphania – apparition ou manifestat­ion) était célébrée le même jour que Noël. En 337, afin de mieux se consacrer à chacune des deux fêtes, le pape Jules 1er décide de séparer la Nativité de l’Épiphanie. À partir de là, dans tout l’empire romain, dont dépendait Nice et les terres qui forment aujourd’hui la Côte d’Azur, l’adoration des Rois mages fut célébrée le 6 janvier. La tradition a perduré et chaque région a inventé ses propres coutumes. Par exemple du Moyen Âge à la Révolution, le soir du 5 janvier, les jeunes du comté de Nice, chargés de corbeilles de fruits secs, partaient dans les rues à la recherche des Rois mages, qui étaient des adultes déguisés. Lorsqu’ils les trouvaient, ils leur débitaient un petit compliment et leur offraient leurs corbeilles. En retour, les Rois leur donnaient quelques piécettes que les jeunes se partageaie­nt comme un trophée. Quant au lendemain, le jour de l’Épiphanie, il était dédié aux farces dont les enfants étaient les victimes toutes désignées. On les envoyait demander aux voisins, les « Clefs de l’Alléluia ». Munis d’un panier, ils allaient de porte en porte réclamer les fameuses clefs. On leur ouvrait et, à leur insu, on remplissai­t leur panier de lourdes pierres avec la recommanda­tion de «surtout ne pas ouvrir le panier avant la fin de leur quête». Les plus candides rentraient chez eux lourdement chargés. Ils étaient accueillis par de grands éclats de rire. Dépités, ils se promettaie­nt de ne jamais plus se laisser prendre. À d’autres, on recommanda­it, dès la tombée de la nuit, de scruter le ciel afin de voir passer les Rois mages se rendant à Bethléem. Lorsqu’ils les verraient, les Rois ne manqueraie­nt pas de laisser tomber une bourse bien garnie. Nombreux s’y prêtaient avec ferveur. Cette blague était si couramment faîte qu’elle a donné lieu à une locution moqueuse : « Il est de ceux qui sont allés voir passer les Rois ».

Le gâteau des rois, coutume qui date du Xe siècle

Depuis l’Antiquité, (sauf une interrupti­on pendant la révolution) dans tous les foyers du comté de Nice, le repas de famille du jour des Rois ne s’achevait jamais sans le fameux gâteau des rois, soit une couronne de brioche coiffée de fruits confits et dans lequel on avait placé une fève sèche. Les enfants étaient chargés de le bénir et de le couper en autant de morceaux que de convives, sans oublier la part de Dieu pour le pauvre qui viendrait taper à la porte. Les morceaux étaient distribués et chacun avait l’espoir de tomber sur la fève qui promet à celui ou celle qui la trouve chance, richesse, pouvoir et vertu. L’assistance déclarait alors l’heureux élu roi ou reine de la fève. Le maître de maison lui laissait alors sa place pour le laisser choisir son roi ou sa reine. Cela fait, on servait à boire à leurs majestés et on criait « Le roi boit ». En 1874, un pâtissier eut l’idée de remplacer la fève végétale par une fève figurative en porcelaine.

Source : Historia n°446, janvier 1984 ; Almanach de la de Provence par Claire Tiévant, Albin Michel.

Mémoire et des Costumes

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(Photo DR) Jacques-Alexandre Fabre, désigné par Napoléon pour aller refaire les rues de Saint-Pétersbour­g. (ci-contre),
 ?? (Photos DR) ?? De retour de Russie, où il a multiplié les constructi­ons, – ponts, résidences, casernes – pour le compte du tsar Alexandre Jacques-Alexandre Fabre fait construire à Tourrettes, sa terre natale, un château. La bâtisse, à l’état de ruines au début du XXe siècle (ci-dessus), sera restaurée en .
(Photos DR) De retour de Russie, où il a multiplié les constructi­ons, – ponts, résidences, casernes – pour le compte du tsar Alexandre Jacques-Alexandre Fabre fait construire à Tourrettes, sa terre natale, un château. La bâtisse, à l’état de ruines au début du XXe siècle (ci-dessus), sera restaurée en .
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