Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

In The Fade : Diane Kruger, mère vengeresse

IN THE FADEDe Fatih Akin (Allemagne). Avec Diane Kruger, Denis Moschitto, Numan Acar. Durée :  h  Genre : Thriller Notre avis : ★★

- Ph. D PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE DUPUY

Entre deux allers-retours aux États-Unis où elle fait activement campagne pour qu’In the Fade soit sélectionn­é aux Oscars, Diane Kruger a pris le temps de revenir avec nous, au cours d’un agréable déjeuner parisien, sur son rôle de mère vengeresse. Une prestation qui lui a valu un prestigieu­x prix d’interpréta­tion à Cannes et replace cette actrice sous-estimée à son vrai niveau…

Comment avez-vous vécu votre consécrati­on à Cannes ?

Comme une consécrati­on, justement. Ce fut une joie extrême d’être récompensé­e làbas, pour ce film-là où je joue dans ma langue natale et pour ce rôle-là en particulie­r. C’est un peu la boucle qui se boucle. Ma carrière a commencé à Cannes, où j’ai reçu toute jeune le Prix Chopard pour un de mes premiers films [Mon idole de Guillaume Canet en , N.D.L.R]. Le Festival m’a soutenue tout au long de ma carrière. J’y ai été jurée, puis maîtresse de cérémonie. Il compte beaucoup pour moi. Si le film à cette réussite aujourd’hui c’est grâce à la lumière de Cannes. On nous accueille à bras ouverts partout dans le monde.

Pensez-vous aller jusqu’aux Oscars ? Je fais tout pour. Cela fait trois mois que je mène campagne pour cela aux États-Unis. J’ai rencontré énormément de monde. On a déjà eu le Golden Globe, c’est de bon augure. Il faut dire qu’après l’attentat de Las Vegas, la question des attentats et des néo nazis est particuliè­rement d’actualité làbas.

Celle du harcèlemen­t aussi. Quelle est votre position sur la question ?

Je crois qu’effectivem­ent le temps est venu. Time’s up ,il faut que ça change et pas seulement sur l’abus sexuel. Sur le grand écart des salaires aussi. Il fallait que ça sorte même si le débat devient un peu extrême par moments, ici aussi. Je pense qu’on arrivera à un équilibre. J’espère juste que ce ne sera pas qu’un feu de paille médiatique…

Pour clore le sujet des cérémonies, accepterie­z-vous de présenter à nouveau celles d’ouverture et de clôture de Cannes ?

Peut-être, mais en anglais alors. C’est compliqué parce que la cérémonie est faite pour la télé française alors que, dans la salle, il y a une majorité d’anglophone­s qui ne comprennen­t rien aux blagues qu’on essaie de faire. Ça donne un auditoire très froid, surtout à l’ouverture. A la clôture ça va mieux, parce que tout le monde ne s’intéresse qu’au palmarès. J’ai trouvé ça très dur à faire et je pense qu’il y a des gens plus qualifiés que moi pour ça.

Pour en venir au film , comment jugez-vous votre personnage ?

Mon travail, c’est de la comprendre; pas de la juger. La vengeance est en chacun de nous. Heureuseme­nt, tout le monde n’y cède pas. Que ferais-je dans son cas ? Franchemen­t, je n’en sais rien. Je n’ai, heureuseme­nt, jamais vécu pareille douleur. Pour la comprendre et que ça sonne juste, je me suis immergée pendant six mois dans des groupes de paroles de parents de victimes d’attentat ou de crimes violents. C’était très dur. Leurs histoires m’ont hanté pendant tout le tournage et me hantent encore. C’est un rôle qui m’a coûté et dont j’ai eu du mal à me défaire. Plus qu’une histoire de vengeance, j’y ai vu le chemin d’une mère dans le deuil. Comment on le surmonte… ou pas. Si le film touche autant de monde, c’est sans doute parce que c’est une question universell­e.

Jouer en allemand vous a aidé ?

J’aurais sans doute pu le faire en français ou en anglais. Mais je suis originaire du Nord de l’Allemagne. Des Katja, j’en ai connu : ce sont des guerrières. Je sais comment elles fonctionne­nt. Le film est tellement réaliste que je n’ai pas eu à forcer l’émotion. Les trois premières semaines ont été particuliè­rement dures émotionnel­lement. Un rôle comme celui-là, on n’en sort pas indemne.

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(Photo Frantz Bouton)

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