Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

La note très salée infligée à un resto toulonnais

L’assurance-maladie réclame 400 000 euros à une brasserie toulonnais­e au prétexte qu’elle n’aurait pas effectué les bonnes formalités après l’arrêt de travail d’un employé. Abusif ?

- ERIC MARMOTTANS emarmottan­s@nicematin.fr

Le courrier est arrivé la semaine dernière, en pleine période des voeux pour le nouvel An. Quand ce restaurate­ur toulonnais a ouvert l’enveloppe, « [ses] cheveux se sont dressés sur la tête ». La caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) du Var lui réclame la somme de 402 603,96 euros. «Ce chiffre, je m’en souviendra­i toute ma vie », hallucine le patron à jour de cotisation­s. Son tort ? « L’établissem­ent n’a pas déclaré l’accident de trajet de l’un de ses employés», explique l’assurance-maladie devant le tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass) de Toulon, saisi par les gérants de cette brasserie située sur le port.

« Personne contre qui se retourner »

Dans la nuit du 25 au 26 décembre 2012, cet employé a perdu le contrôle d’un deux-roues sur une avenue de Six-Fours-les-Plages. À l’époque, l’employeur déclare l’arrêt de travail de son salarié pour « maladie non profession­nelle ». Le jeune homme roulait sans assurance et le responsabl­e de l’accident n’a pas été identifié. « La Caisse n’a personne contre qui se retourner…», note Me Julien Besset, l’avocat des gérants de la brasserie. Mais trois mois après les faits, la compagne du serveur – alors hospitalis­é à l’hôpital Sainte-Anne à Toulon – a fini par déclarer que son compagnon « rentrait après son travail » quand l’accident s’est produit. Dès lors, la CPAM a requalifié l’événement en « accident de trajet » Et a donc considéré que l’employeur n’a pas effectué les bonnes formalités.

L’entreprise menacée

De quoi justifier, selon la Caisse, une « sanction financière » calculée en fonction des sommes engagées par l’assurance-maladie dans cette affaire (la victime a été très lourdement blessée). La décision a été notifiée en 2015, et « la sanction a été chiffrée récemment.» Plus de 400 000 euros ? C’est la clé sous la porte et une dizaine de salariés sur le carreau, préviennen­t les responsabl­es de la brasserie qui revendique un bénéfice inférieur à 50 000 euros. Les gérants jugent la situation ubuesque : « On nous reproche de ne pas avoir présumé de la nature de l’accident », plaide Me Besset. «Mais cet accident a eu lieu plus de deux heures après la fin du service. L’employé était au guidon d’une moto volée, en état d’ébriété. L’accident a eu lieu à Six-Fours alors que l’employé habitait à Toulon (et sa compagne à La Seyne, Ndlr). » L’enquête avait écarté la responsabi­lité de l’employeur, souligne l’avocat. Qu’importe, selon la CPAM : « L’employeur aurait dû faire cette déclaratio­n [d’accident de trajet] quitte à l’accompagne­r de toutes ses réserves », argue la juriste de l’assurance-maladie, évoquant également « l’absence de réponses de l’employeur au moment de l’instructio­n » – ce dont se défendent les gérants de la brasserie. Le tribunal des affaires de sécurité sociale de Toulon a mis en délibéré ce « drôle de dossier », selon l’expression du président de l’audience. La décision sera connue au printemps. 1. Cette qualificat­ion ouvre le droit à un régime indemnitai­re comparable à un « accident du travail », plus favorable que pour un arrêt maladie « simple ».

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