Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Les artisans refusent d’être «surtaxés» pour leurs déchets
Depuis un mois, les déchèteries de Sud Sainte-Baume n’acceptent plus les gravats et végétaux des professionnels, forcés de se tourner vers des structures privées… et payantes. Ce dont ils ne veulent pas
Le message est apparu en début d’année sur le site internet de la ville de Sanary, aussi discret qu’inattendu pour les concernés. « À compter du 2 janvier 2018, conformément à la loi, les déchèteries de Sanary et toutes celles de l’agglomération Sud SainteBaume n’accepteront plus les apports des professionnels, notamment les gravats et les végétaux. » Si bref soit-il, ce texte a immédiatement déclenché la colère de nombre d’artisans, jusque-là habitués à se débarrasser gratuitement d’une partie de leurs déchets dans les structures des neuf communes de l’agglo Au point qu’aujourd’hui, ils se sont constitués en collectif pour défendre leurs intérêts et ont répondu d’une seule et même voix à nos questions. Plus déterminés que jamais.
Quand avez-vous découvert que les règles du jeu avaient changé ?
En début d’année, quand nous nous sommes pointés à la déchèterie avec nos apports et que les employés nous ont dit de faire demitour. Après, on ne leur en veut pas : ils suivent les ordres. Ce qui semble fou, en revanche, c’est qu’on nous ait interdit l’accès sans préavis. Et cette petite phrase, là : « conformément à la loi »… De quelle loi on parle ? On serait curieux de le savoir.
Le fait que vous ne puissiez plus utiliser les déchèteries de l’agglo pour vos apports, ça change quoi, pour vous ?
Beaucoup de choses ! Avant, qu’il s’agisse des petites entreprises d’espaces verts, des plombiers, des maçons… nous pouvions tous aller gratuitement, autant de fois que nous le souhaitions, vider nos véhicules dans les déchèteries à proximité de nos chantiers, sur le territoire de Sud SainteBaume. Aujourd’hui, on nous oblige à nous tourner vers le privé, avec une liste réduite à trois sites payants (). Et ça vous coûte cher ? Pour les déchets verts, c’est un peu moins d’une centaine d’euros la tonne. En gros, ça fait du à euros l’année de surcoût supplémentaire pour une petite structure d’une personne !
Vous avez les moyens de payer ?
À un moment, nous n’aurons pas le choix : ça va forcément se répercuter sur les factures, alors que les contribuables s’acquittent déjà d’impôts pour ça. Mais on fera payer le service à nos clients, voilà. En revanche, pour les devis établis en fin d’année dernière, ce sera pour notre pomme. Si au moins on nous avait prévenus, on aurait pu anticiper… Enfin, d’autres auront encore moins de scrupules.
C’est-à-dire ?
Bah il y aura des dépôts sauvages, c’est sûr. Ou alors les gens vont laisser ça sur les trottoirs en attendant que les monstres passent. Certains professionnels iront à la déchèterie avec leur voiture familiale et hop, ni vu ni connu.
Quand même, l’ancien système, avec le « tout gratuit », ça ne pouvait pas durer, si ?
On a entendu parler du déficit. On veut bien le croire. Il y avait sûrement des abus. Mais pourquoi ne pas revenir à ce qui se faisait du temps de Gabriel Tambon ? Ça fonctionnait très bien. Nous avions une carte pro, que nous scannions à l’arrivée et qui attestait que nous étions résidents du coin, et nous avions le droit à un passage par jour dans l’une des déchèteries de l’agglo. À la deuxième remorque, nous devions aller dans une déchèterie privée.
Pourquoi ce système s’estil arrêté ?
Aucune idée. C’est devenu tout gratuit vers et, c’est sûr, certains artisans de La Ciotat ou de Toulon sont venus décharger chez nous. Ça a fait exploser les volumes à traiter. Il y a eu des exagérations. Mais aujourd’hui, nous, on est prêts à payer pour nos déchets.
Vous seriez vraiment prêts à payer ?
Évidemment. Mais pas autant, par contre, que ce que peuvent nous réclamer certaines déchèteries privées. Une participation équivalente à une vingtaine d’euros la tonne, rendre payant le deuxième « voyage » ou alors un forfait de euros par an, oui, dans ces cas-là, pourquoi pas. En fait, nous sommes bel et bien prêts à mettre la main à la poche, pas à être surtaxés.
A priori, il serait question, aussi, d’une déchèterie réservée aux professionnels, en projet du côté de Sainte-Anne d’Évenos…
Alors là, ça ne nous va pas. Quand on travaille à SaintCyr, vous imaginez, vous, aller déposer vos déchets à Évenos ? Avec les bouchons qu’il y a déjà en fin de journée au Beausset ? Non, non, impossible.
Et si rien ne change ?
On s’est constitué en collectif, ce qui n’était pas gagné, vu qu’en général, on est plutôt en concurrence sur les chantiers. On a aussi fait une réunion la semaine dernière : on était déjà une cinquantaine de présents. On a ouvert une page Facebook, vue des centaines de fois. Cet aprèsmidi (hier, ndlr), nous étions au conseil communautaire, pour interpeller les maires. Si rien ne bouge, on va durcir le ton…
Ça veut dire quoi, durcir le ton?
On n’exclut rien. Nous sommes déterminés. Et on est au moins sur le territoire. C’est la survie de nos activités qui est en jeu. 1. Bandol, Le Beausset, Le Castellet, La Cadière-d’Azur, Évenos, Riboux, Saint-Cyrsur-Mer, Sanary-sur-Mer, Signes. 2. Pasini à Sanary ; Ecorecept à Six-Fours ; Veolia à La Seyne.