Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Tous à cran !
Scène de la vie quotidienne, lundi dernier à Nice. Un octogénaire lambine au feu qui vient de passer au vert. Bordée sonore immédiate. Mais la colère ne saurait se limiter à la folklorique semonce des klaxons. Ni une ni deux, l’artisan qui le suit bondit de son utilitaire et vient brandir un poing vengeur sous le visage du papet, estomaqué. Passons sur les amabilités d’usage qui volent en escadrille. Vécu certifié. Et une méchante envie de se tenir les côtes. Sauf que les incidents surréalistes de ce type dégénèrent parfois. A Nîmes, un automobiliste a été roué de coups dans une situation similaire, multiples fractures à la clé. Le pire ? Qui parmi nous osera jurer qu’il ne deviendra jamais le fou furieux de l’histoire ? Par chance, à l’inverse des Etats-Unis, les armes ne se vendent pas comme des petits pains dans l’Hexagone. C’est déjà ça de gagné sur la démence ordinaire. Ces emportements sans queue ni tête n’en disent pas moins long sur le degré de stress de notre société, qui vit sur les nerfs en permanence. Nous sommes à cran et la route est devenue l’exutoire le plus commode à notre trop-plein de frustrations. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, la violence dite « gratuite » a progressé en … Y compris à l’égard des policiers, qui pointent un « ensauvagement » des comportements. La nouvelle police de proximité, ne serait-ce que par peur du gendarme, permettra peut-être, si les moyens sont au rendez-vous, de calmer un tantinet les esprits. Mais l’essentiel est ailleurs. Il consiste à reconsidérer nos rythmes sociaux, pour lutter contre le burn out, déclaré ou insidieux, autrement qu’en partant forcément élever des chèvres dans le Larzac. Par un double effet pervers, le chômage persistant comme les heures ont empêché de repenser notre rapport au travail, dans lequel un Français sur deux, grosso modo, ne s’épanouit pas. L’allongement inévitable de la vie active, conjugué à la précarité accrue des carrières, rend aujourd’hui indispensable une refonte de nos modèles. Les écologistes n’ont jusqu’ici suscité qu’une sympathie condescendante. Benoît Hamon, moqué, a été renvoyé à ses chères utopies lors de la présidentielle. Chacun a toutefois eu le mérite de défricher des pistes sur lesquelles tous les acteurs politiques vont devoir s’aventurer, en quête de solutions inexplorées pour, qui sait, nous permettre demain de vivre un peu moins énervés.