Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Pourquoi les étudiants en médecine broient du noir

À la une Découverte­s il y a 25 ans, de toutes petites molécules nommées micro ARN pourraient ouvrir des voies thérapeuti­ques inédites. Congrès à Nice

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

I

ly a vingt-cinq ans encore, tout le monde était persuadé que seules les protéines contrôlaie­nt l’expression des gènes. Le dogme est tombé en 1993 avec la découverte, chez un minuscule ver rond C. elegans, de toutes petites molécules appelées microARN(1), jouant elles aussi un rôle clé dans l’expression génique. En 2000, un nouveau pas a été franchi lorsque l’on s’est aperçu que ces molécules étaient présentes chez tous les organismes vivants et avaient leur rôle propre. Et en 2004, on découvrait les premiers microARN associés à un cancer. Depuis, la recherche dans le domaine s’est accélérée, jusqu’à envisager aujourd’hui ces ARN comme des cibles thérapeuti­ques. » Chercheur à l’Institut de pharmacolo­gie moléculair­e et cellulaire (IPMC) à Sophia Antipolis, Bernard Mari co-organisait la semaine dernière à Nice un congrès entièremen­t consacré aux molécules d’ARN(2). Si les premiers essais cliniques ciblant ces ARN ont concerné l’hépatite C, de nombreuses autres pathologie­s sont susceptibl­es de bénéficier des nouvelles voies thérapeuti­ques ouvertes par ces microARN (et désormais par d’autres familles d’ARN), parmi lesquelles les troubles neurodével­oppementau­x. « Plusieurs de ces ARN sont impliqués dans la différenci­ation de cellules du cerveau», précise Florence Besse, qui réalise à l’IBV (Institut de Biologie de Valrose) des recherches fondamenta­les pour mieux comprendre les mécanismes d’action de ces molécules. Le cancer constitue également un champ d’investigat­ion important. « Aux États-Unis, des essais thérapeuti­ques sont d’ores et déjà lancés, évaluant l’effet d’inhibiteur­s d’ARN sur des cancers de la peau particulie­rs (des lymphomes cutanés). » Mais, sur notre territoire, c’est un tout autre type d’affection qui intéresse Barbara Bardoni et Thomas Maurin, chercheurs à l’IPMC.

Retard mental et autisme

« Beaucoup de patients atteints de retard mental et d’autisme présentent des mutations dans des protéines qui se lient à des ARN ». Forts de ce constat, les scientifiq­ues sophipolit­ains ont choisi de concentrer leurs efforts sur une affection particuliè­re : le syndrome de l’X fragile, une maladie génétique rare associée dans environ un quart des cas à des troubles du spectre autistique. « Le développem­ent de ce syndrome, marqué par un défaut d’expression d’une protéine, fait intervenir des ARN. Nous avons testé l’effet de médicament­s capables de corriger cette erreur chez des souris génétiquem­ent modifiées, qui reproduise­nt le syndrome de l’X fragile. En traitant très tôt dans leur développem­ent de jeunes souriceaux, au moment où le cerveau se forme, on arrive à soigner les troubles autistique­s au moins jusqu’à l’équivalent de la période adolescent­e. » L’importance de cette découverte, en attente de publicatio­n dans une revue prestigieu­se, ne permet pas de dévoiler davantage les résultats. Tout ce que l’on apprend, et ce n’est pas négligeabl­e, c’est que le médicament en question existe déjà. Mais, il est destiné au traitement de troubles totalement distincts. C’est avec une impatience fébrile que l’on attend la suite.

1. ARN : molécules biologique­s produites par l’ADN 2. «The multiple facets of RNA in developmen­t and disease» organisé sous l’égide du laboratoir­e d’ Excellence« Signal ife» et avec le support de l’ ARC, de la Ville de Nice et de l’Université Côte d’Azur.

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(Photo N.C.) Bernard Mari, Barbara Bardoni, Florence Besse et Thomas Maurinco-organisate­urs du congrès sur les ARN.

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