Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Casse du siècle: Jacques Cassandrin­i «diabolisé»?

Le procès du membre présumé du casse de Nice s’est achevé hier à Marseille. Les avocats du prévenu se sont étonnés de l’absence de la Société générale sur le banc des parties civiles

- GRÉGORY LECLERC gleclerc@nicematin.fr

L’anecdote ne manque pas de saveur. 17 janvier 2011. Jour de l’interpella­tion de Jacques Cassandri, à son domicile marseillai­s. Sa femme, Marianne, panique. Des hommes tambourine­nt à la porte. « Ouvrez, ouvrez ! » Dans le milieu marseillai­s – et dans la pègre en général – on n’aime pas trop ça. Une balle perdue ne l’est pas pour tout le monde en matière de règlements de compte. Un gang rival est peut-être là pour les dessouder. Terrifiée, Marianne Cassandri se réfugie dans la salle de bains. La suite, c’est Me Monneret, avocat du prévenu, qui la raconte. « Jacques Cassandri décroche son téléphone. Pour appeler qui ? Sa voyante ! Pour être éclairé, savoir ce qu’il en est, qui est là… Elle n’a pas dû être très avisée car, paniqué, il va chercher une arme. Finalement, il se rendra compte que ce sont des policiers et se rendra sans en faire usage. »

Un climat «lourd et pesant »

Une scène qui illustre bien la peur latente qui règne dans le milieu corso-marseillai­s. Mais aussi sur le procès de Jacques Cassandri et de son clan, qui s’est achevé hier à Marseille. Jeudi, le procureur de la République, Etienne Perrin, avait rappelé le climat « lourd et très pesant de ce dossier parti d’une tentative de meurtre». Il avait qualifié l’ancien de la French connection de « voyou sans foi ni loi, au passé criminel lourd ». Hier, ses avocats se sont longuement appliqués à démontrer l’inverse. Le procureur leur avait en quelque sorte facilité les choses. L’accusation a en effet abandonné les poursuites pour le blanchimen­t du magot de Nice. Non parce que Cassandri a fait volte-face mercredi en niant finalement sa participat­ion au casse du siècle. « Je suis convaincu que Jacques Cassandri a bien participé au casse », avait affirmé le procureur. Mais en raison de l’impossibil­ité de rapporter la preuve de l’utilisatio­n finale de l’argent et des lingots d’or. Lyrique pour la défense, Me Gérald Pandelon a contre-attaqué d’entrée : « Il est toujours plus facile de brandir le glaive flamboyant de la répression plutôt que celui de la modération. » Le livre-confession écrit par Cassandri en 2010 sous le pseudonyme de « Amigo » où il affirme être le cerveau du casse? L’avocat affirme que l’accusation agit sans preuves. « Un mensonge, même produit par un écrit, ne saurait constituer à lui seul une manoeuvre frauduleus­e. » Il évacue ensuite pêle-mêle les accusation­s d’associatio­n de malfaiteur­s et de trafic d’influence actif. Bref, Jacques Cassandri est blanc comme neige. Me Pandelon plaide la relaxe.

Cassandri au rang de curiosité locale

Lyrique, Me Frédéric Monneret, le second avocat de Cassandri, l’est aussi quand il insiste sur le fait que, « toutes les actions de Cassandri sont motivées par l’intérêt de sa famille. Son ciment c’est l’amour, l’entraide ». L’avocat s’est dit surpris de la sévérité des réquisitio­ns. La veille, le procureur Etienne Perrin avait requis contre son client 5 ans ferme, mandat de dépôt, 300 0000 euros d’amende. Me Monneret dépeint un Jacques Cassandri « diabolisé » par l’instructio­n. Il en fait même – pourquoi pas – une curiosité locale : « Il est peut-être un de ces derniers témoins vivants de ce milieu marseillai­s des Cassone, Cossu ou Imbert. » (1) Là – en étant mauvaise langue – on se dit que ça valait vraiment le coup de venir au tribunal. On s’attend même à en payer l’entrée. L’avocat relèvera ensuite les nombreux points « curieux » du dossier, notamment le fait que la Société générale, victime du casse du siècle, ne se soit pas portée partie civile. «Ses éminents juristes ont vraisembla­blement considéré que ce dossier était hasardeux et chimérique. » Pour son client il concède, tout au plus, des abus de biens sociaux et du travail dissimulé. Au tribunal de trancher désormais. Le jugement a été mis en délibéré et sera rendu le 4 avril prochain. 1.Tony Cossu dit « L’anguille », Jacques Imbert dit « Jacky le mat » (le fou en provençal), Roland Cassone, trois figures du grand banditisme marseillai­s

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