Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Ted Chiancone, dix-huit ans et une vie à reconstrui­re

Partie en vacances au Maroc, une famille dracénoise a été victime d’un guet-apens sur l’autoroute de Casablanca. Un bloc de béton a été jeté sur leur pare-brise pour les contraindr­e à stopper le véhicule. Le fils, installé sur le siège passager, a perdu l

- E. ESPEJO.

Les vacances de Noël ont tourné au cauchemar pour une famille de Dracénois. Partis avec des amis retrouver des proches au Maroc, Michel et son fils, Ted Chiancone, ont été victimes d’un guet-apens à quelques kilomètres de Casablanca. En pleine nuit, un homme positionné au milieu de la route a jeté un parpaing dans leur pare-brise. Le bloc de béton a violemment percuté la tête du lycéen, âgé de 18 ans, endormi sur le siège passager. Huit semaines plus tard, Ted nous accueille à son domicile. Cela fait seulement quelques heures que le jeune homme a quitté l’hôpital pour retrouver sa maison. Particuliè­rement éprouvé parce qu’il a enduré ces dernières semaines, il évoque aux côtés de son père cette dramatique nuit, celle où sa vie a basculé en quelques secondes.

Un parpaing de  kg dans le pare-brise

Divorcé depuis douze ans, Michel Chiancone a toujours souhaité que son fils reste en contact avec sa mère partie vivre au Maroc. Ainsi, il l’accompagne quatre à cinq fois par an à Marrakech pour lui rendre visite. « Le 23 décembre dernier, contrairem­ent à mon habitude je ne me suis pas arrêté à Tanger. J’ai poursuivi le voyage d’une traite. Je n’étais pas fatigué…», se souvient, avec regret, le père de famille. « Il y avait beaucoup de brouillard, je me suis donc arrêté plusieurs fois. Je pense que c’est lors de notre dernier arrêt à la station de service qu’ils nous ont repérés…», lâche-t-il non sans émotion. Un véhicule français qui circule sur une route très peu fréquentée, à une heure du matin, ne passe pas inaperçu dans cette région. « Il était tard, je souhaitais prendre le volant mais je n’étais pas habitué à conduire de nuit alors mon père n’a pas voulu prendre de risque…», se souvient Ted qui, quelques kilomètres plus loin après Casablanca, s’assoupi sur le siège passager. Il se réveillera bien plus tard à… l’hôpital.

« Ils vont nous égorger ! »

« J’étais encore sur l’autoroute lorsque j’ai aperçu quelqu’un au milieu des deux voies de circulatio­n », raconte Michel. «Je l’ai évité… A sa hauteur j’ai vu qu’il tenait un gros « caillou » entre ses mains. Il l’a lancé avec force sur le véhicule du côté passager en criant quelque chose d’incompréhe­nsible », se remémore-t-il. En fait, il s’agissait d’un bloc de béton de 6 kg qui a traversé le pare-brise. Alors que Michel s’apprêtait à arrêter son véhicule, son amie, installée sur le siège à l’arrière, a aperçu des hommes se diriger en courant vers leur véhicule. Elle s’est écriée : « Non ne t’arrêtes pas. Ils vont nous égorger ! », poursuit Michel. Le Dracénois a accéléré, tout en observant que son fils était blessé au visage et ne s’était pas réveillé malgré le choc. « Je suis sorti de l’autoroute, il n’y avait quasiment personne à cette heure-là mais j’ai fini par trouver un véhicule. Son conducteur nous a dirigés vers un cabinet médical ». Devant la gravité des blessures de Ted, l’infirmière le redirige vers un médecin qui, à son tour, l’oriente vers une clinique. « À ce moment-là, je croyais qu’il était mort » avoue, la voix larmoyante, son père. Dans le coma pendant quatre jours, Ted finira par se réveiller dans l’établissem­ent de soin Marocain avant d’être transporté par avion sanitaire en direction l’hôpital Sainte-Anne à Toulon où il sera opéré durant cinq heures. « J’ai l’enveloppe du cerveau déchirée. Ils ont prélevé de la chair sur ma cuisse pour la reconstrui­re. J’ai un gros trou dans le crâne qui fait la taille d’un oeuf », précise-t-il avant d’ajouter « selon les médecins à un millimètre près, j’étais mort. J’ai le nerf optique écrasé au niveau de l’oeil droit. C’est inopérable, j’ai perdu la vision de ce côté-là ». Aujourd’hui, le jeune lycéen de Léon-Blum est très affaibli. « J’ai perdu 12 kilos, je ne supporte plus le bruit et je n’accepte pas ce qui m’est arrivé. Je suis vulnérable. Je ne peux plus pratiquer de sport. Les médecins sont formels : si je reçois un choc ou que je chute sur ma tête je peux y rester ». Difficile d’appréhende­r l’avenir pour ce jeune homme qui a toujours pratiqué du sport et s’est même illustré sur des rings de boxe anglaise. « Je devais participer aux championna­ts de France en avril prochain. Tout ça, c’est fini », lâchet-il, désespéré. Alors qu’il débute des séances de rééducatio­n, Ted se raccroche à son rêve de toujours : visiter, un jour, le Japon. S’il trouve aujourd’hui la force et le courage de témoigner, c’est avant tout pour avertir les voyageurs : « Il faut qu’ils se méfient. Et, surtout, éviter de conduire la nuit sur les autoroutes marocaines ».

 ?? (Photos Dylan Meiffret) ?? Michel et son fils Ted circulaien­t à bord de ce véhicule sur l’autoroute du Maroc, lorsqu’ils ont été victimes d’un guet-apens. Un homme a jeté un parpaing sur le pare-brise provoquant d’importante­s blessures au visage du lycéen.
(Photos Dylan Meiffret) Michel et son fils Ted circulaien­t à bord de ce véhicule sur l’autoroute du Maroc, lorsqu’ils ont été victimes d’un guet-apens. Un homme a jeté un parpaing sur le pare-brise provoquant d’importante­s blessures au visage du lycéen.

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