Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Es de mauvais traitements Beaucoup d’hypocrisie autour des déchets de chantier
Pour le président de la Fédé du BTP, les solutions font défaut en raison d’un manque de volonté et d’une réglementation inadaptée
Président de la fédération du BTP du Var, Jean-Jacques Castillon est conscient des dommages causés à l’environnement par les déchets issus des activités de construction, démolition, rénovation, aménagement, déversés illégalement. Il souhaite trouver des solutions en lien avec les représentants de l’État et les élus locaux. Rencontre…
Va-t-on vers plus de pollution avec des déchets du BTP ?
D’abord, même si les termes officiels et juridiques parlent de déchets du BTP, nous préférons parler de déchets de chantier, notion plus pertinente pour deux raisons : la première c’est que c’est moins stigmatisant pour les entreprises du BTP, car pour quelques brebis galeuses c’est l’image de toute la profession qui est dégradée. La seconde c’est qu’on détermine mieux l’enjeu collectif autour des déchets car plusieurs acteurs sont concernés par la conduite d’un chantier, avec pour chacun, des responsabilités diverses au regard de la gestion des déchets : maître d’ouvrage, entreprise, transporteur.. Ensuite, la situation actuelle n’est que la conséquence de quinze ans d’immobilisme dans le département.
Pourquoi ?
Nous avons déposé sur le bureau du préfet à l’été le premier projet de plan de gestion des déchets du BTP dans le Var. Après ans de mises à jour, d’atermoiements, de modifications découlant des lois Grenelle, le plan porté par le conseil départemental a été adopté en janvier . Validé, il a été présenté à la Région qui doit l’intégrer dans le plan régional en cours d’élaboration. Cette lourdeur administrative ne facilite pas les choses…
La situation va cependant rentrer dans l’ordre, non?
Au contraire. Nous tirons la sonnette d’alarme car il va y avoir une multiplication de la déballe sauvage.
Qu’est-ce qui vous le laisse penser ?
Depuis le er janvier , les vendeurs de matériaux ont l’obligation de réceptionner et collecter les déchets de chantier. Or c’est diversement mis en oeuvre. Certains traînent les pieds. Ceux qui sont prêts ne veulent pas forcément communiquer pour ne pas trop en récupérer car ils considèrent que ce n’est pas leur métier. D’autres jouent très bien le jeu et ont compris qu’ils y ont un intérêt commercial. Nous invitons d’ailleurs les négociants à se faire connaître sur le site www.dechetschantiers.ffbatiment.fr. La conséquence de cela, c’est que les collectivités, qui ouvraient leurs déchetteries aux professionnels, les leur ferment.
Est-ce inéluctable?
C’est déjà le cas depuis le er janvier pour la CCCV et le SIVED (). Nous avons travaillé avec la CCI et les professionnels du BTP et de la valorisation pour faciliter cette transition. Nous faisons de même en ce moment sur le territoire de TPM ()qui “va fermer ses déchetteries ” aux professionnels le mars. Ils devront rentrer dans une démarche payante et l’artisan risque de jouer des coudes. Il va devoir faire accepter au client de payer ou il déversera dans la nature…
Pour vous c’est un appel à des pratiques déviantes ?
Le risque est grand. Tout ce processus doit rentrer dans les moeurs et il faut communiquer pour y parvenir. Il faut soutenir cette économie circulaire (lire cidessous, NDLR).
De quelle façon ?
Le maître d’ouvrage, celui qui fait faire les travaux, est le propriétaire des déchets, il paye pour leur élimination et doit s’assurer de leur suivi. Ainsi, le client, particulier ou entreprise, peut exiger de l’entreprise le bordereau qui atteste qu’elle les a bien mis en décharge, qu’il s’agisse d’un évier, de débris de carrelage, ou de tonnes de matériaux inertes…
Mais où est le problème ?
Les professionnels du BTP ont essayé de sensibiliser les collectivités pour trouver des sites où accueillir ces activités d’élimination. Mais quand on concasse, on fait du bruit, de la poussière. Il y a des dispositifs pour atténuer ces nuisances. On doit pouvoir trouver des endroits dans chaque bassin du Var éligibles à ces activités. Le problème c’est que lorsqu’on prend les PPRIF, PPRI, loi Littoral plus les plaintes du voisinage, on n’arrive plus à trouver un seul site. Et ceux qui existent déjà sont menacés. Car après chaque catastrophe, incendie ou inondation, des contraintes nouvelles sont créées. Pour se mettre en conformité, certains sites sont obligés d’arrêter certaines activités ou même de fermer. La situation est critique dans le Golfe de Saint-Tropez par exemple.
Que préconisez-vous ?
Il y a beaucoup d’hypocrisie dans ces dossiers. Nous avons assisté à de nombreuses réunions sans aboutir car personne ne veut de ces installations sur sa commune. Il faut que chacun prenne ses responsabilités. Crevons l’abcès, voyons ce qu’il s’est passé et trouvons des solutions. Prenons soin de ce qui existe et qui rend service. Si on ne trouve pas le terrain idéal, prenons des dispositions transitoires ou exceptionnelles. On ne peut pas se contenter de dire que la justice est lente, car pendant ce temps des entreprises crèvent. Il faut réfléchir ensemble dans l’intérêt général, prendre le sujet à bras-le-corps, car il nous concerne tous.
Sinon ?
Si le remède est pire que le mal, on va retrouver les déchets dans la nature. Ce département est magnifique, nous l’aimons tous, il faut le préserver. 1. Communauté de communes Coeur duVar et Syndicat intercommunal pour la valorisation et l’élimination des déchets. 2. Toulon Provence Méditerranée.