Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Stupéfiants: « Les Lyonnais en vacances à Saint-Tropez »
Pendant deux ans, une famille modeste a financé ses coûteuses vacances tropéziennes avec le trafic de stupéfiants dans les soirées débridées de la presqu’île. La drogue venait de Lyon
Des peines de cinq ans d’emprisonnement ont été requises hier soir devant le tribunal correctionnel de Draguignan, au terme d’une journée entière de débats, contre quatre des huit prévenus impliqués dans une affaire de trafic de stupéfiants, en 2015 et 2016, à Saint-Tropez. Une affaire qui avait ceci d’original que ce trafic de cocaïne, cannabis et méthamphétamine apparaissait comme un travail saisonnier pour une famille de Lyonnais. Vivant d’allocations, ils avaient trouvé ce moyen de financer leurs vacances dans le golfe de Saint-Tropez, en y menant grand train.
Folles vacances
Parti début 2016, sur un renseignement recueilli par les gendarmes, ce dossier s’est presque exclusivement nourri de fastidieuses écoutes téléphoniques, qui ont longuement été disséquées à l’audience. Il est apparu que la famille Gennaro, le père Claude, 49 ans, son épouse, leur fils Angelo, 25 ans, et leur fille de 22 ans, avaient deux adresses. L’une dans la région lyonnaise, où ils passaient l’essentiel de l’année, l’autre à La Croix-Valmer, pendant l’été. Personne n’ayant de travail déclaré, les enquêteurs se sont demandés comment la famille pouvait payer, toujours en liquide ou par mandats cash, les sorties au restaurant et les soirées tropéziennes en boîte de nuit, avec belles voitures et champagne coulant à flots, dont leurs photos s’étalaient sur les réseaux sociaux. Les gendarmes ont aussi noté que le père de famille avait déjà été condamné à trois reprises dans des affaires de stupéfiants. Enfin, leurs vacances étaient ponctuées de nombreux allers-retours à Lyon. Un an d’enquête, sous la houlette d’un juge d’instruction, a abouti au coup de filet lancé en février 2017. Mis à part le caractère familial et festif de cette affaire, le procureur Manuel Munoz y a retrouvé l’architecture habituelle du trafic. Dans le cercle familial il y avait le commercial, Angelo Gennaro, bien introduit dans le monde de la nuit, et au contact direct de la clientèle «pour vendre une drogue à la mode, dans des lieux où les gens font la fête et ont de l’argent pour le faire ». Il y avait aussi la soeur et son compagnon, chargés à l’occasion du recouvrement des créances de certains clients, la mère gérant le quotidien de la famille, et le père, qui s’est servi de ses relations pour mettre le pied à l’étrier à son fils dans le trafic. Gravitant autour d’eux, il y avait aussi les fournisseurs lyonnais, Hassen Ayari et Nory Lechekhab. Il ne manquait pas non plus les règlements de compte, dus au caractère dépensier d’Angelo. Celuici n’avait pas toujours de quoi régler les fournisseurs, ayant dépensé tout le produit du trafic dans de folles soirées, où il s’imaginait faire partie de la jet-set.
Prison, amende et interdiction de séjour
Contre lui, le procureur a requis cinq ans de prison, dont un an avec sursis et mise à l’épreuve, comportant l’interdiction pendant trois ans de fréquenter les débits de boissons et établissements de nuit. Contre son père Claude, Ayari et Lechekhab, tous en récidive, il a requis cinq ans ferme. Pour ce quatuor, M. Munoz a demandé aussi le maintien en détention, 5000 € d’amende, et cinq ans d’interdiction de séjour en région Paca. Le délibéré s’annonçait nocturne, après les plaidoiries des huit avocats de la défense.