Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Un demi-million de malades français ont abandonné le Levothyrox
Combien de malades ont arrêté le Levothyrox à cause des effets secondaires de la nouvelle formule de ce médicament pour la thyroïde? Une bataille de chiffres a éclaté sur le sujet jeudi entre l’association « Vivre sans thyroïde » et le laboratoire pharmaceutique allemand Merck. Et elle a trouvé, hier, une réponse officielle de la part des autorités françaises. «L’ANSM [Agence du médicament, Ndlr] et la DGS [Direction générale de la Santé, Ndlr] estiment après analyse des bases de données de l’Assurance-maladie qu’environ 500 000 patients se sont tournés vers des alternatives à la nouvelle formule du Levothyrox », a affirmé hier le ministère de la Santé. Cette estimation est calculée à partir d’une vaste base statistique sur les volumes de tous les médicaments remboursés, publiée début février. Le chiffre est à rapporter aux quelque trois millions de personnes traitées en France pour hypothyroïdie.
« Détournement massif »
Pour l’association « Vivre sans thyroïde », « près d’un million » d’entre eux avaient dû changer de traitement en l’espace de trois mois. «Ce détournement massif est très inquiétant, et il est complètement tu par les autorités sanitaires», écrivait-elle. «En aucun cas le reflet de la réalité», rétorquait Merck. D’après le groupe, les volumes du Levothyrox avaient baissé de 10 à 12 % seulement, et non pas de 31 %. Mais même avec la réponse des autorités françaises, il est difficile d’avoir une certitude, puisque l’Assurance-maladie recense non pas les malades bénéficiant d’une prescription, mais les traitements vendus. Beaucoup de malades ont besoin de deux médicaments (par exemple 25 et 100 mg, pour arriver à un dosage de 125 mg).
Une information judiciaire ouverte
D’autres ont pu acheter du Levothyrox et ne pas le consommer, dès lors qu’ils se sont procuré un produit concurrent. Enfin, certains ont peut-être même arrêté tout traitement le temps que la crise soit résolue. « Vivre sans thyroïde », qui soutient de nombreux malades ayant attaqué Merck en justice, a déclaré hier maintenir ses estimations. Pour l’association notamment, « le chiffre de 500000 ne tient pas compte des malades qui se sont approvisionnés à l’étranger, parce que l’ANSM dit que c’est trop difficile à estimer. Pour nous, c’est au moins 100000 à 150000 personnes», a déclaré la présidente de l’association, Beate Bartès. L’affaire intéresse la justice pénale. Un juge d’instruction a été désigné lundi à Marseille pour enquêter sur des faits de tromperie aggravée, blessure involontaire et mise en danger d’autrui.