Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Bonus sur le permis de conduire : « Le débat n’est plus tabou»

Emmanuel Barbe, délégué à la sécurité routière, promet une baisse de la mortalité sur le réseau secondaire. Il esquisse aussi les pistes d’un système de gratificat­ion pour les conducteur­s exemplaire­s

- PROPOS RECUEILLIS PAR ERIC MARMOTTANS

Opération déminage. Emmanuel Barbe, délégué interminis­tériel à la sécurité routière, sillonne la France – il sera dans le Var aujourd’hui – pour assurer le service après-vente des mesures annoncées en janvier par le Premier ministre pour lutter contre la mortalité routière. Et défendre la plus controvers­ée d’entre elles, à savoir la réduction de la vitesse maximale autorisée sur la plupart des routes départemen­tales et nationales, passant de 90 à 80 km/h à compter du 1er juillet.

Comment expliquer l’absence de consensus autour du passage à  km/h ?

Il y a beaucoup de désinforma­tion. Les plus grands experts en accidental­ité ont démontré qu’il y a un effet mécanique de la baisse des vitesses moyennes pratiquées sur le nombre des tués et des blessés. Une étude récemment publiée a mis cela en forme d’équation mathématiq­ue : si on arrive à faire baisser la vitesse moyenne de  %, on fait baisser la mortalité de , %. L’efficacité a été prouvée en France, entre  et , où en baissant la vitesse de  km/h (conséquenc­e d’une campagne d’installati­on des radars, ndlr), on est parvenu à diminuer la mortalité de  %. Cela correspond à ce modèle mathématiq­ue. Ces chiffres ont servi aux experts pour faire cette recommanda­tion en .

Pourquoi avoir attendu quatre ans pour la mettre en oeuvre ?

Le nouveau Premier ministre, quand il s’est emparé du sujet, a pris connaissan­ce des données et a pris cette décision. Le précédent gouverneme­nt n’avait pas souhaité prendre cette mesure, mais une expériment­ation avait été décidée sur  km de tronçons.

Un bilan est annoncé pour , la mesure est donc réversible ?

Le Premier ministre a indiqué que si les résultats n’étaient pas au rendezvous, lui ou son successeur prendrait ses responsabi­lités. Cela étant, je suis convaincu que ça marchera. Le lien entre la vitesse et les accidents, c’est une donnée scientifiq­ue. Je ne sais pas si je serai encore là dans deux ans, mais j’affrontera­i ce bilan tranquille­ment.

Que répondez-vous aux accusation­s de « racket » ? Il suffit de respecter les limitation­s de vitesse comme la majorité des conducteur­s. En outre, l’augmentati­on éventuelle des recettes liées au passage à  km/h sera affectée à un fonds destiné à améliorer les hôpitaux qui accueillen­t les grands accidentés de la route. C’est un engagement de l’État que l’on pourra suivre dans la loi de finances.

Vous évoquez cette majorité de bons conducteur­s… Faut-il les récompense­r ?

Vous avez effectivem­ent des gens qui respectent toujours les règles et puis, un jour, il y a un “tout petit” excès de vitesse… Est-ce qu’il n’y a pas un moyen, quelque part, d’en tenir compte ? C’est un sujet extrêmemen­t délicat parce que dès que l’on donne l’impression que l’on va être moins sévère, cela peut se traduire par des dizaines de morts. Un nombre très important de gens peut être moins attentif et au final, cela peut aboutir à plus d’accidents. Cela étant, en Espagne, les bons conducteur­s ont la possibilit­é de grimper jusqu’à quatorze, voire quinze points sur leur permis de conduire (au lieu de douze, Ndlr), et pourtant les Espagnols ont de bons résultats. Le Premier ministre considère que le débat, jusqu’ici tabou, doit avoir lieu. C’est pourquoi le conseil national de la sécurité routière va être mandaté pour travailler sur cette question, et rendre ses conclusion­s avant la fin de l’année.

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(Photo doc G.T.) Emmanuel Barbe, « M. sécurité Routière » depuis .

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