Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Maladie des valves, soigner sans « ouvrir » À la une
Réservé jusqu’à présent aux patients âgés inopérables, le traitement des valvulopathies par voie percutanée gagne du terrain
Rétrécissement aortique calcifié. Trois mots pour décrire une maladie très fréquente après 70 ans qui se manifeste essentiellement par un essoufflement. « Au fil des années, la valve aortique, située à la sortie du ventricule gauche du coeur s’use ; elle se rigidifie, se calcifie, rétrécit, réalisant un obstacle au passage du flux sanguin. Ce qui à terme peut avoir des conséquences graves : insuffisance cardiaque sévère, oedème du poumon, syncope à l’effort… », résume le Dr Stéphane Lopez, chirurgien cardiaque (institut Arnault Tzanck, Saint-Laurent du Var) et co-organisateur avec le Dr Drogoul d’un congrès qui vient de réunir à Nice les meilleurs spécialistes mondiaux de cette pathologie. La sévérité de la maladie, attestée par des examens échographiques, peut conduire les spécialistes à proposer au patient une opération destinée à remplacer cette valve défectueuse. « Longtemps le traitement a été uniquement chirurgical. Une intervention lourde, avec mise en place d’une circulation extra-corporelle [système qui remplace temporairement la fonction de pompe du coeur et la fonction d’oxygénation des poumons, ndlr]. Et puis, une alternative est apparue pour les patients à risque élevé et inopérables: l’implantation d’une valve aortique biologique par voie percutanée. » Plus nécessaire dès lors «d’ouvrir», puisque la valve est amenée au niveau du coeur, sous imagerie robotisée en passant par l’artère fémorale, sous anesthésie locale. « On a douté au départ que cela pouvait fonctionner, puisqu’on plaçait une nouvelle valve sur une valve usée, sans remplacer cette dernière!» En réalité, l’intervention s’est rapidement révélée très efficace, avec des résultats de plus en plus spectaculaires, accompagnant les progrès techniques : plus de 90 % d’efficacité, sans complications significatives. En attente des dernières études, seuls les patients les plus graves ont bénéficié de cette technique, faute de données sur la performance de ces valves à moyen et long terme, et chez les patients à risque modéré. Et peut-être aussi du coût, très élevé, de ces valves percutanées. Mais les temps changent. « On assiste à une nouvelle évolution, se réjouit le Dr Lopez: depuis la fin de l’année 2017, même les personnes à risque modéré, âgées de plus de 75 à 80 ans peuvent bénéficier de ce traitement. Des études sont en cours concernant le risque faible.» Reste un paramètre inconnu, la longévité de ces valves percutanées : « On ignore si elles dureront autant que celles implantées chirurgicalement.» Aussi, pour les patients plus jeunes, le traitement de référence est toujours la chirurgie, avec la possibilité de retirer la valve usée pour la remplacer par une nouvelle valve. « Le choix du type de prothèse, biologique, mécanique, est un autre sujet de débat. Généralement, chez les patients très jeunes (moins de 60 ans), on privilégie les prothèses mécaniques, en carbone, qui ne s’usent pas, mais imposent un traitement à vie par des anticoagulants. Les valves biologiques [fabriquées à partir de tissu animal, ndlr] permettent d’éviter ce traitement; mais du fait de leur durée de vie limitée, elles sont plutôt indiquées chez les patients plus âgés. » Chirurgie, voie percutanée, valve mécanique ou biologique… ce que l’on retient surtout, c’est qu’il est permis à des milliers de personnes à bout de souffle, de revivre.