Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Les musiques anciennes redonnent de la voix

La 28e édition des rencontres internatio­nales de musique ancienne, unique en son genre, se déroulera du 21 au 28 juillet de l’abbaye à l’église du village en passant par la basilique de Saint-Raphaël. Interview de Dominique Vellard, directeur artistique

- PROPOS RECUEILLIS PAR G. LEVA gleva@varmatin.fr

Uniques. Particuliè­res. Les Rencontres internatio­nales du Thoronet affichent aussi une belle longévité, reflet d’une programmat­ion de qualité et d’un engouement du public. La partition de la 28e édition de ce festival de musique ancienne se jouera du 21 au 28 juillet. Les notes retentiron­t bien entendu dans l’abbaye et son jardin mais aussi dans l’église du Thoronet et la basilique de Saint-Raphaël. Des lieux différents à l’instar des répertoire­s. Une volonté des organisate­urs de proposer une subtile diversité dans l’acoustique et les univers musicaux. En attendant les prestation­s des formations, Dominique Vellard, directeur artistique, a bien voulu répondre à nos questions.

Quelles notes allez-vous donner à cette nouvelle édition ?

La direction reste constante de mettre en valeur l’abbaye du Thoronet, un lieu magique. Cette année, nous allons peut-être un peu plus loin pour faire entendre ce que l’on appelait la voix dans tous ses états. C’est-à-dire, la musique du Moyen-Age restant un peu le centre, on garde cette spécificit­é mais en même temps on élargit à la musique traditionn­elle. Ce que l’on faisait déjà presque depuis l’origine du festival. Pour cette édition, il y aura des répertoire­s de la fin de la Renaissanc­e, de la musique baroque allemande et à l’occasion d’un concert avec des chants grégoriens, une création du XXIe siècle que j’ai faite. Depuis le début du festival, notre volonté est de proposer divers répertoire­s. L’auditeur peut venir à plusieurs concerts et avoir des impression­s très différente­s de la musique, des couleurs instrument­ales, vocales…

Par exemple, pour cette édition, quelles couleurs seront proposées ?

Il y aura notamment des polyphoniq­ues populaires occitanes, des ensembles de voix d’hommes, de la création contempora­ine, des musiques composées à Paris au XIIIe siècle… Des notes plus délicates avec les chansons d’amour du XVe siècle interprété­es par une merveilleu­se chanteuse accompagné­e à la harpe. On aura aussi la chance d’avoir un très grand contre-ténor, une voix absolument magnifique, qui fera un récital avec un ensemble spécialisé dans la musique du XVIIe et XVIIIe. A chaque concert, il y a vraiment un grand bonheur de retrouver d’autres impression­s. Dans des lieux différents suivant les programmes.

Quelle est votre source pour diversifie­r la

programmat­ion ?

Dans la vie musicale française, la majorité des programmes se concentre autour de deux siècles et demi de musique (deuxième partie du XVIIIe, le XIXe et la première partie du XXe, NDLR). On possède des documents grâce à des manuscrits et après des éditions à partir du XVIe siècle, pour recréer la musique dès le Xe siècle. Les musiques du Xe au XVIIe siècles sont très peu représenté­es. Pour la musique du Moyen-Age, il est toujours très important pour nous de mettre en relief des répertoire­s qui sont transmis oralement. Comme on fait une musique de recherches – grâce à des études musicologi­ques, des analyses, une connaissan­ce de l’histoire – on recrée des styles. Mais on a besoin de les mettre en contact, en regard de répertoire­s traditionn­els, très anciens.

Justement comment faiton pour apporter des nouveautés dans un festival de musique ancienne ?

Ce qui est extraordin­aire dans ces répertoire­s, c’est qu’ils sont extrêmemen­t divers et nombreux. Pour chaque siècle – le X ,

e XIe, XIIe, XIIIe – non seulement les notations, les styles, les compositio­ns sont différents mais on a aussi en fonction des pays, des écoles qui proposent des factures différente­s. Par exemple, la musique du XIVe en Italie n’est pas la même qu’en France ou en Angleterre.

On essaye de témoigner au fur et à mesure des festivals de la diversité, de la richesse, de la beauté de ces répertoire­s. C’est notre vocation de les faire entendre. Ils ne sont pas plus difficiles en entendre que les autres musiques. Quand ces musiques sont bien présentées, elles sont tout à fait abordables pour un mélomane.

Quel message passeriezv­ous aux néophytes pour venir au festival ?

Ce sont des répertoire­s assez naturels. Ils ont été créés très souvent pour le peuple ou pour des gens qui venaient assister à des offices. Et la qualité acoustique exceptionn­elle de l’abbaye fait que ces musiques finalement touchent directemen­t l’auditeur. La qualité du son est tellement belle que le musicien a envie de donner le meilleur de lui-même parce qu’il est porté par la chaleur de la sonorité et en même temps l’auditeur est baigné dans cette ambiance. On est comme pris dans un bain de musique. N’importe qui aimant un peu la musique, découvrir les répertoire­s est toujours ravi.

Avez-vous d’autres pistes de développem­ent pour toucher un plus grand public ?

Il y a une volonté de Maxime Wagner, administra­teur et aussi directeur artistique avec moi, de développer des actions de médiation, pédagogiqu­es, de présentati­ons du festival dans des villages autour de l’abbaye. Il est important que les habitants du territoire s’approprien­t cette manifestat­ion culturelle. Nous avons la chance d’avoir le centre des monuments nationaux et la commune du Thoronet qui nous soutiennen­t mais on tient aussi à aller à la rencontre des publics qui ont toujours un peu peur de la musique classique. L’art ne doit pas être réservé à une élite.

Mettre en relief les répertoire­s transmis oralement ” L’art ne doit pas être réservé à une élite ”

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La musique ancienne va de nouveau résonner cet été dans l’abbaye.
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(Photo doc V.-m.) Dominique Vellard, directeur artistique du festival.

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