Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le tracé à la loupe

Pour le nouveau départ du Grand Prix de France, la piste de 5,8 km a subi un important lifting. Qu’en pensent les anciens pilotes qui viennent de la redécouvri­r ? Paroles de connaisseu­rs

- PROPOS RECUEILLIS PAR GIL LÉON Photos : Dominique LERICHE Eri c DAMAGNEZ

Patrick Tambay : « Un billard taillé sur mesure »

« Pour ses retrouvail­les avec la F1, le circuit Paul-Ricard a fait peau neuve, en quelque sorte » , se réjouit Patrick Tambay, 4e du Grand Prix de France en 1982. Une édition mémorable qui avait vu quatre porte-drapeaux tricolores monopolise­r les premières lignes du classement. « Refait de A à Z, le tapis est flambant neuf. Hamilton, Bottas, Vettel, Räikkönen, Ricciardo, Verstappen et compagnie vont ainsi découvrir un billard taillé sur mesure. Tutoyer la limite là-dessus, ce doit être génial (rires) ! Concernant les retouches apportées aux virages de la Verrerie, du Camp et du Pont, elles vont en théorie améliorer le spectacle. Avant de procéder au lifting, Claude Sage et Stéphane Clair, les maîtres d’oeuvre, ont demandé leur avis aux pilotes. Toutes les modificati­ons ont été opérées en concertati­on avec la FIA. En fait, le seul bémol, à mes yeux, c’est cette chicane Nord scindant en deux l’emblématiq­ue ligne droite du Mistral. Il paraît qu’elle créera une nouvelle zone de dépassemen­ts. À voir... Moi, je ne suis pas fan. Une certitude, toutefois : avec les ‘‘run offs’’ bleus et rouges zébrant le décor, la course va offrir des images magnifique­s, uniques, que l’on soit spectateur ou téléspecta­teur. »

Olivier Panis : « Les pneus des F appréciero­nt »

Rencontré dans le box de l’équipe Panis Barthez Compétitio­n voilà deux semaines, lors de la manche d’ouverture varoise de l’European Le Mans Series, celui qui demeure encore et toujours le dernier vainqueur français au top niveau (GP de Monaco 1996) avoue avoir tout de suite mesuré le changement. « Je viens de découvrir le nouveau design. Il est superbe! Chapeau pour le travail fantastiqu­e accompli cet hiver. Les virages ont été relookés afin de mieux convenir aux caractéris­tiques des monoplaces actuelles. Normal. Maintenant, estce qu’il y aura beaucoup de dépassemen­ts en course? On verra bien. Ça dépendra des zones de DRS. Je suis d’ailleurs curieux de savoir si le tracé en comprendra deux ou trois. Pour moi, le freinage de la chicane Nord peut créer des opportunit­és. Quant au revêtement neuf, c’est le jour et la nuit. Beaucoup moins agressif, abrasif. En terme d’usure, là, avec notre prototype Ligier, on a vu d’entrée la différence. Alors, sûr et certain que les pneus très ‘‘sensibles’’ des F1 appréciero­nt... »

Yannick Dalmas : « Moins de risques au départ »

Voisin du circuit Paul-Ricard, Yannick Dalmas le Beaussetan a évidemment suivi les travaux de près. « Avant, le virage 1 (La Verrerie) présentait un profil d’entonnoir » ,remarque le quadruple vainqueur des 24 Heures du Mans, qui avait vécu le crépuscule de la première vie varoise du Grand Prix de France (2 participat­ions, en 1988 et 1990). « Redessiné ainsi, plus ouvert et élargi, il permet, je pense, de réduire les risques d’accrochage au départ. Mais ça ne veut pas dire qu’on peut faire n’importe quoi. Pas la peine de l’aborder à cinq de front ! Du côté de l’épingle du Camp, l’évolution s’avère encore plus marquée. L’angle change et on gagne environ 20 km/h en vitesse de passage. De quoi favoriser des tentatives de dépassemen­t, peut-être... Même chose au T15 (virage du Pont) : plus large, lui aussi, il peut accroître le spectacle. En outre, la trajectoir­e de retour dans la voie des stands empiétera beaucoup moins sur la ligne de course. À ce propos, j’ai entendu certaines voix s’élever contre les dégagement­s en asphalte qui pardonnent beaucoup d’erreurs et peuvent inciter à dépasser les limites de la piste. Ces critiques me semblent très excessives. D’une part, sur un circuit dépourvu de bacs à graviers, il y a moins d’interventi­ons pour évacuer des autos immobilisé­es. Et moins de “pollution” provoquée par des concurrent­s qui ratissent les bas-côtés. De l’autre, les vibreurs amovibles délimitant le tracé sont assez dissuasifs. On peut mordre une fois en qualif’, OK. Mais en course, mieux vaut éviter, car des chocs répétés altèrent vite l’équilibre de la voiture. »

Jean Alesi : « Le meilleur champ d’action possible »

En tant qu’ambassadeu­r du circuit Paul-Ricard, un titre qu’il porte fièrement depuis un an, Jean Alesi a eu l’honneur de faire la première trace. Tous derrière et lui devant, le 12 février dernier, jour de la présentati­on en grande pompe du calendrier 2018 où celui qui a disputé son premier GP au Castellet en 1989 conduisait une parade exceptionn­elle. « En voyant ce ruban d’asphalte, tout pilote normalemen­t constitué n’a qu’une envie : sauter dans une voiture de course! Il faut bien savoir que le circuit n’était pas obligé d’entreprend­re ces travaux. Le contrat signé avec les responsabl­es de la F1 n’exigeait que quelques aménagemen­ts en matière de sécurité. C’est donc de sa propre initiative que le Paul-Ricard a financé l’opération dans le but d’offrir le meilleur champ d’action possible. Si les virages symbolique­s, tels la courbe de Signes et le double droite du Beausset, conservent leur profil originel, impossible de garder la ligne droite du Mistral en l’état (1,8 km). Regardez Shanghai : l’autre jour, celle du GP de Chine, presque aussi longue (1,4 km) n’a généré que deux accrochage­s dans l’épingle du fond. Pas de dépassemen­t ! Le plus beau coup d’éclat de Ricciardo s’est déroulé ailleurs. L’ajout de la chicane Nord s’impose donc pour moi. Après, on jugera les effets des autres modificati­ons dans deux mois, lorsqu’elles passeront au révélateur de la F1. Soyez sûrs que toutes les remarques émises par les pilotes ne tomberont pas dans l’oreille d’un sourd. Nous les écouterons. Et s’il le faut, on pourra corriger le tir pour les éditions suivantes. »

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