Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Congeler ses ovocytes pour pallier le déclin de la fertilité Retour sur l’actu
Faute de pouvoir « congeler » leurs ovocytes en France où la pratique n’est pas autorisée, de plus en plus de célibataires françaises se tournent vers l’Espagne
« Ne pas avoir de partenaire est un élément déterminant» André Guérin Gynécologue
Les Françaises seraient de plus en plus nombreuses à souhaiter mettre leurs précieux ovocytes à l’abri du temps qui passe. Sans présenter – a priori – de problème d’infertilité, ces femmes s’inquiètent de voir l’horloge biologique tourner. Et avec elle, décliner leur fertilité. Le jour où elles rencontreront enfin le partenaire avec lequel elles souhaiteront construire une famille, seront-elles en mesure de mener à terme un projet d’enfant? Sans réponse, celles qui en ont les moyens envisagent alors la vitrification ovocytaire de confort. Une pratique qui n’est pas autorisée en France. Et c’est le plus souvent vers l’Espagne (Barcelone, Madrid, Bilbao, Valence) – où se trouvent les cliniques les plus reconnues en Europe dans le champ de la PMA comme IVI – que la plupart de ces femmes se tournent.
Le Dr André Guérin, ancien médecin à l’APHM (Assistance publique - Hôpitaux de Marseille) est responsable du département francophone d’IVI(1) en Espagne. Il nous éclaire sur ce phénomène.
En quoi consiste la vitrification ovocytaire ?
Il s’agit d’une technique de congélation ultrarapide, ou cryoconservation ; concrètement, les ovocytes matures ponctionnés après stimulation ovarienne sont immergés dans de l’azote liquide à une température de -°C. Ils peuvent ainsi être conservés plusieurs années. Grâce à ce processus, la capacité de procréation des ovocytes est maintenue intacte au jour de la vitrification jusqu’au moment de leur utilisation.
À qui s’adresse cette technique ? Initialement, elle était destinée à des femmes atteintes de maladies graves imposant des traitements susceptibles de les rendre stériles. L’efficacité de la technique a incité à se poser la question d’autres indications possibles ; c’est ainsi que depuis quelques années, la vitrification ovocytaire est plus largement envisagée comme un moyen de combattre les effets de l’âge sur la fertilité.
La technique de vitrification a été difficile à mettre au point. La décongélation des ovocytes en particulier constituait une étape très délicate. La technique est-elle désormais au point ?
Absolument. Il reste que les chances d’avoir un bébé dépendent bien sûr de l’âge de la femme au moment de la vitrification ovocytaire, et du nombre d’ovocytes prélevés. Plus ce nombre est élevé, meilleures sont les chances de réussite. Il est par ailleurs vivement conseillé d’entreprendre cette démarche avant ans. Le taux de survie des ovocytes après décongélation atteint % chez les patientes de moins de ans, avec des taux de grossesse de %. Les chiffres sont moins bons chez les femmes plus âgées. Quel est le profil des Françaises qui se tournent souvent vers l’Espagne pour congeler leurs ovocytes ? La plupart d’entre elles ( %) sont célibataires ; le fait de ne pas avoir de partenaire est un élément déterminant dans le recours à la vitrification ovocytaire. Elles exercent des professions diverses, mais occupent souvent des postes à responsabilité. Elles ont en moyenne à ans – nous aimerions qu’elles arrivent plus tôt pour les raisons que j’ai invoquées précédemment – et n’ont pas d’enfant. Elles savent que plus elles attendent, plus leurs chances d’obtenir un enfant sont réduites.
Elles auraient la possibilité de patienter encore quelques années…
On sait que les résultats de la PMA, si ces femmes doivent y recourir, sont beaucoup moins bons après ans. Il leur faudra alors subir des traitements éprouvants, répétés, avec malheureusement des échecs fréquents et parfois comme seule solution, le don d’ovocytes.
Au bout de combien de temps ces femmes reviennent-elles chercher leurs ovocytes ?
La vitrification ovocytaire est au point depuis plusieurs années, mais ses indications sociales [vitrification dite de confort, Ndlr] sont récentes. Aussi, a-t-on trop peu de recul pour répondre précisément à cette question. Ce que l’on peut dire, sur la base des à % des femmes qui ont « décongelé » leurs ovocytes, c’est qu’elles reviennent beaucoup plus tôt que nous l’avions pensé : en moyenne à peine , ans plus tard. Et % d’entre elles reviennent avec un conjoint !
Combien de temps les ovocytes peuvent-ils rester congelés ?
Il n’y a pas de limite à la conservation. La seule limite réside dans la limite d’âge pour le recours à la PMA, soit ans théoriquement pour les femmes en Espagne. Mais elles viennent bien avant ; % des Françaises qui consultent dans notre centre sont âgées de à ans ; même sans cadre légal restrictif, les femmes se montrent raisonnables.
Que sait-on des enfants issus de ces ovocytes congelés puis décongelés ?
Les enfants nés après vitrification n’ont pas plus de malformations ou de problèmes de santé à la naissance que les autres bébés. Mais ils continuent d’être suivis sur le long terme. 1- IVI : Instituto Valenciano De Infertilidad