Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

À 18 ans, son but était de tuer un militaire à Nice

La dérive d’une Niçoise radicalisé­e s’est terminée par une condamnati­on, lundi à Paris, à quatre ans de prison dont dix-huit mois avec sursis. En 2016, elle avait planifié un assassinat

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr 1. Le prénom a été modifié en raison de sa minorité.

Chada Darraz était adolescent­e quand elle avait vainement tenté de rejoindre la Syrie. Sa condamnati­on devant le tribunal pour enfants (dixhuit mois de prison dont un avec sursis), assortie d’un contrôle judiciaire, n’a pas entamé sa déterminat­ion. Elle a tout juste 18 ans quand elle se prépare, avec son amie Ève (1), 17 ans, à attaquer au couteau un militaire de l’opération Sentinelle à Nice. Le 2 septembre 2016, un mois et demi après l’effroyable attentat de la promenade des Anglais, elle projette de poignarder un soldat puis se ravise. La Direction du renseignem­ent intérieur pressent le drame et l’interpelle alors qu’elle est en relation étroite avec le Français de Syrie Rachid Kassim, un célèbre recruteur djihadiste. La jeune fille venait de rédiger son testament et se destinait à prêter allégeance à Daech.

« Mourir célèbre »

Chada Darraz, 21 ans, originaire du quartier de L’Ariane, a été condamnée lundi par le tribunal correction­nel de Paris à quatre ans de prison dont dix-huit mois avec sursis et une mise à l’épreuve, selon Jean-Charles Brisard, du Centre d’analyse du terrorisme. Dans le box du palais de justice de Paris, elle s’est présentée dans une tenue occidental­e, chemisier à carreaux et boucles d’oreilles en perles. Ses longs cheveux tirés accentuent la beauté de son visage. Elle dit avoir basculé dans l’islamisme radical avec Ève, sa meilleure amie, en janvier 2014. Alors même que sa soeur aurait pu figurer parmi les victimes de l’attentat du 14-Juillet, elle succombe aux sirènes de la propagande de l’Armée islamique. « C’est une jeune fille qui souffrait du conflit entre ses parents. Ils étaient divorcés mais vivaient sous le même toit, dissèque un fin connaisseu­r des jeunes radicalisé­s. Son but était de mourir célèbre. » L’été 2016, Kassim (avant d’être lui-même tué à Mossoul, en Irak, l’année suivante), lui suggère de foncer dans la foule devant une discothèqu­e de Nice, de tuer un élu municipal ou de prendre des otages dans une banque. «Je ne pouvais m’empêcher de chercher à le fasciner », avoue-t-elle à l’audience. Kassim est son gourou mais elle ne suit pas ses conseils. Elle préfère tuer un soldat en visant la carotide.

Textes et vidéos

Après l’échec du 2 septembre 2016, elle effectue des recherches sur les femmes tchétchène­s kamikazes. Sur son téléphone, les enquêteurs découvrent des textes d’allégeance à Daech, des vidéos d’exactions, des rappels religieux… Ellemême se filme, se met en scène, une fleur dans les cheveux, en train de chanter un nachïd (chant religieux) à la gloire des attentats. Aujourd’hui, elle affirme qu’elle est sortie de cette logique mortifère, qu’elle a commis l’erreur de sa vie. La justice et les experts psychiatre­s et psychologu­es ont tendance à la croire. Le procureur a requis trois ans de prison soulignant «l’ancrage extrémiste » de la jeune femme en 2016, tout en reconnaiss­ant qu’elle avait renoncé d’elle-même à son projet d’attentat. Avec cette condamnati­on, la jeune femme peut espérer rapidement une libération conditionn­elle.

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(Photo Franck Fernandes) Un militaire de l’opération Sentinelle sur la promenade des Anglais, le  juillet , treize jours après l’attentat.

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