Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

On ne connaît ni cause ni remède

- AXELLE TRUQUET atruquet@nicematin.fr

«Je me suis vraiment inquiétée le jour où je n’ai pas réussi à soulever mon mug de thé. »

« Ma maladie était bien réelle »

En septembre 2011, elle doit passer la visite médicale du travail. Une formalité, en principe. Finalement, non : le médecin, qu’elle connaissai­t, l’arrête sur-le-champ pour un mois. « Vous êtes en train de mourir à petit feu », s’entendelle dire. Un électrocho­c, et le début d’un long parcours de soin. « Mon généralist­e avait du mal à comprendre ce qu’il m’arrivait. J’ai consulté des spécialist­es. Certains m’ont répondu que c’était dans ma tête ! Je ne pouvais pas l’admettre, car la douleur était bien présente. Un jour, mon médecin a évoqué la fibromyalg­ie. Je n’en avais jamais entendu parler. » Sylvie se rend dans un centre antidouleu­r à Marseille pour une consultati­on. Elle sera finalement hospitalis­ée : son cas est sérieux, elle souffre de fibromyalg­ie sévère. «Paradoxale­ment, ça m’a soulagée de l’entendre. On me disait enfin que ma maladie était bien réelle. » À l’instar de nombre de patients, la Varoise souffrait du manque de reconnaiss­ance et de prise en compte de sa douleur. Avec ce diagnostic, ce n’était plus « dans sa tête ». Mais Sylvie n’est pas au bout de ses peines. « Lors de cette première hospitalis­ation à l’automne 2011, je pensais qu’une fois sortie, je serai guérie et que je pourrais retourner travailler. J’avais calculé que je reprendrai­s mi-décembre. J’en ai parlé au médecin qui m’a répondu : “Si vous le voulez bien, on en reparle au printemps.” Ça a été un choc. Sept ans plus tard, j’en suis à 11 hospitalis­ations ! » Finalement, elle n’a jamais pu

« La fibromyalg­ie engendre une solitude terrible, elle désocialis­e totalement. »

« Je vis avec un corps capricieux »

Et n’hésite pas à employer des mots encore plus durs : « Elle m’a mutilée en me privant de mon travail. Je vis avec un corps qui n’est pas fiable, capricieux. Quand je me couche le soir, je ne sais pas comment je serai le lendemain. » Mais elle parvient tant bien que mal à gérer. «Je me suis tournée vers la médecine traditionn­elle. Je suis devenue mon propre coach. Je me suis formée au reiki, à la méditation. Je reste optimiste. » Sylvie s’est également découvert une passion pour la peinture. « Je peins par besoin. Ça me fait un bien fou. La bulle du temps et de la douleur n’existe plus. J’en ai fait ma thérapie. La fibromyalg­ie est une maladie très particuliè­re : vous êtes un peu comme une bougie qui vacille sans cesse… » Sylvie a tenu à témoigner afin que les gens comprennen­t ce qu’endurent les malades. «Si la fibromyalg­ie ne se voit pas, la souffrance, elle, est bien réelle. » Caractéris­ée par des douleurs chroniques et une fatigue intense, la fibromyalg­ie concerne environ  % de la population, principale­ment des femmes. On ignore quelles en sont les causes précises, mais il a été évoqué une anomalie du système nerveux central. « Une étude américaine a mis en évidence un problème d’hypersynch­ronisation neuronal au niveau du cerveau qui mettrait le patient en situation d’hyper-perception, explique le Dr Fadel Maamar, chef du service de la consultati­on douleur de l’est-Var à l’hôpital intercommu­nal de Fréjus-Saint-Raphaël. Les patients concernés développen­t des symptômes tels que des troubles de l’odorat, de l’ouïe, de la vue, une hypersensi­bilité au toucher, des douleurs neuromuscu­laires. » Il n’existe pas de traitement curatif ; la prise en charge est axée sur les symptômes. « On peut proposer des traitement­s à base d’inhibiteur­s de sérotonine, et d’antalgique­s, pour calmer la douleur, raconte le Dr Maamar. On recommande aussi aux patients de faire bouger le corps, grâce à la kinésithér­apie, la balnéothér­apie, etc. Mais il est également important d’aider le patient à retrouver de la sérénité.» Les médecines douces peuvent ainsi venir en support de la prise en charge thérapeuti­que.

 ??  ??
 ??  ??
 ?? (Photo d’archives P. C.) ?? « On recommande aux patients de faire bouger le corps », explique le Dr Maamar.
(Photo d’archives P. C.) « On recommande aux patients de faire bouger le corps », explique le Dr Maamar.

Newspapers in French

Newspapers from France