Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

L’Italie découvre le nouveau

- WILLIAM HUMBERSET (AVEC V. M.)

Vingt et une minutes lui ont suffi contre l’Arabie Saoudite. Un crochet de l’extérieur du pied pour éliminer un adversaire, une frappe puissante et enroulée au premier poteau pour tromper le gardien : Mario Balotelli a signé un come-back retentissa­nt sous le maillot de l’équipe d’Italie, lundi. Quatre ans après le fiasco du Mondial 2014, lorsque la Squadra Azzurra avait été éliminée au premier tour, Super Mario était de retour. Plus que cette ouverture du score, c’est le caractère altruiste de sa solide prestation d’une heure qui a surpris sa nation. « Personne ne s’attendait à voir le Balotelli de Nice sous le maillot de l’équipe nationale. Qu’il fasse les efforts défensifs, qu’il se replace, qu’il joue en première intention avec ses coéquipier­s, explique Alessandro Grandesso, correspond­ant de la Gazzetta dello Sport en France. Parce que 1, même si la Ligue 1 est diffusée en Italie, elle n’est pas forcément suivie. Et 2, pour la majorité des gens, c’est l’image précédente de Balotelli qui restait en tête. On peut dire qu’il a gagné le bénéfice du doute aujourd’hui, c’est un bon pas en avant. Il a un avantage, l’Italie part de zéro et lui aussi. »

Le racisme et le souvenir de ses “Balotellat­e“pas encore effacés

L’absence au prochain Mondial vécue comme une véritable catastroph­e au pays du calcio ,laNazional­e doit se reconstrui­re sous la houlette de Roberto Mancini. Le sélectionn­eur idoine pour relancer Balotelli, onze ans après l’avoir tout bonnement lancé dans le monde profession­nel sous les couleurs de l’Inter, avant de le retrouver à Manchester City (20102013). « Je me vois comme un grand frère (avec Balotelli). Pas un rapport père-fils. Mais, quand je me mettais en colère contre lui, là, c’était comme un père, racontait déjà Mancini en octobre 2016. C’est un très bon garçon, avec un grand coeur ! Très éduqué, toujours respectueu­x à mon égard. Parfois, il peut t’agacer mais c’est impossible de ne pas lui vouloir du bien. » Dans le sillage de son mentor et d’une première convaincan­te, l’attaquant de 28 ans regagne petit à petit du crédit dans son pays. Mais il reste mince. Deux ans d’exil réussis en France n’ont pas effacé les traces de ses “bêtises” du passé, des erreurs de jeunesse baptisées “Balotellat­e” de l’autre côté des Alpes. « Après quatre ans, rien n’a changé, il divise toujours à tous les niveaux, poursuit Alessandro Grandesso. Il y a une chose précise qui le démontre : premier match, et première banderole raciste. C’est incroyable. » Deuxième joueur le plus capé (34 sélections) derrière le Milanais Leonardo Bonucci (78) dans une Squadra Azzurra rajeunie, Balotelli est le vice-capitaine. Un statut que certains “tifosi” ont critiqué à Saint-Gall (Suisse) sur un drap blanc : « Mon capitaine a du sang italien ». Un acte raciste auquel a intelligem­ment répondu Super Mario sur les réseaux sociaux : « Les gars, on est en 2018. Réveillez-vous ! » « Cette réponse-là montre selon moi que même si les gens racistes ne changeront jamais, lui a compris comment il faut utiliser ça, analyse le journalist­e italien. Mais la Nazionale passe par le prisme Balotelli, malheureus­ement pour lui. Cette rencontre contre la France, à Nice qui plus est, est à double tranchant pour lui. Soit elle peut l’installer définitive­ment en sélection, soit le positionne­r à nouveau en bouc émissaire en cas de contre-performanc­e. »

Le public niçois est derrière lui... mais ne veut pas le voir « faire une Ben Arfa »

Après deux saisons vécues dans un fauteuil à Nice, Balotelli retrouve l’instabilit­é d’un siège éjectable en Italie. Une condition physique retapée, une confiance regonflée par des stats (43 buts en 66 matchs) et un amour populaire inconditio­nnel seront les meilleurs atouts de sa nouvelle opération séduction. « Je serai toujours reconnaiss­ant envers les supporters niçois pour la façon dont ils m’ont accueilli et soutenu. Je me sens comme chez moi. Vraiment, » a d’ailleurs déclaré Super Mario à la caméra Sur les réseaux sociaux, le compte officiel de l’OGC Nice n’a pas cessé de relater tous les derniers exploits de Mario Balotelli en Nazionale. Tout un club partage le bonheur d’un joueur qui a toujours exprimé le voeu de rendosser la tunique de sa patrie. « On est vraiment très content pour lui. C’est le mérite du club, qui lui a permis de retrouver une bonne condition physique, mais c’est surtout le sien. Celui d’avoir toujours été à l’écoute, d’avoir été un homme simple, respecteux et très bien éduqué au-delà de ses grandes qualités de joueur, » a réagi Frédéric Gioria, l’un des coachs adjoints du Gym, après la bonne prestation de Balo contre l’Arabie Saoudite. Jean-Pierre Rivère abonde dans ce sens - « On est tous très heureux de le revoir en équipe d’Italie » - avant de répondre à l’attente de supporters qui rêvent d’un “Super Mario ”. « Je ne sais pas de quoi sera fait son avenir, on peut encore croire au miracle... Mais je tenais à remercier Mario, vraiment... Il nous a fait confiance, ce n’était pas gagné. C’est une vraie bonne personne. »

d’OGC Nice TV dans un entretien mis en ligne hier sur le site du club. « Mario est dans son jardin à l’Allianz, répond Grégory Massabo, porte-parole de la Populaire Sud. On est des gens vrais, on l’aime, on le respecte. On a envie qu’il reste chez nous, on ne va pas se le cacher. On va le supporter, et ce n’est contre personne », précise-t-il pour écarter toute idée de match entre Balotelli et l’équipe de France demain dans la Plaine du Var. Mais à la vue des rumeurs envoyant Super Mario chez un rival marseillai­s privé de Ligue des champions (voir encadré) ou dans un club italien pas vraiment motivé sur tous les aspects (Roma, Naples) lors du prochain mercato, la tifoseria rouge et noire veut lui adresser un message : « Il ne sera aimé nulle part ailleurs comme il est aimé ici. Puisque Mario aime la provocatio­n, on va un peu le provoquer aussi : on sait que c’est un grand joueur, que c’est un homme

“Bastardo,

dai, vieni con noi. E andiamo a vincere insieme !”

« Allez bâtard, viens avec nous. Et allons gagner ensemble ! » Adil Rami a dragué Mario Balotelli, son ancien coéquipier au Milan AC (-), lors de la conf ‘ de presse de l’équipe de France, hier. respectueu­x, on va voir maintenant s’il est intelligen­t aussi. Qu’il reste chez nous et ne fasse pas “une Ben Arfa”, un joueur qui s’est perdu depuis son départ de Nice... » C’est à Mario de jouer.

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(Photos AFP) Mario sera dans « son jardin » demain à l’Allianz.
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