Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

La France, exemplaire dans le dépistage de la toxoplasmo­se congénital­e

- NANCY CATTAN

 % des cas sont asymptomat­iques à la naissance

Toxoplasma gondii. C’est le nom du parasite en cause dans la toxoplasmo­se, une maladie habituelle­ment transmise à l’homme par les animaux domestique­s, en particulie­r les chats, ou – plus souvent encore – par la consommati­on de viande mal cuite ou crue. Bénigne pour la plupart des êtres humains, la toxoplamos­e peut être par contre dangereuse pour les personnes dont le système immunitair­e est affaibli ou pour les femmes enceintes, car elle peut affecter le développem­ent du foetus (toxoplasmo­se congénital­e). «La France représente un exemple pour le monde ; c’est le seul pays aujourd’hui qui propose un dépistage systématiq­ue de la toxoplasmo­se congénital­e chez les femmes enceintes, dès la déclaratio­n de la grossesse », indique le Pr Isabelle Villena, responsabl­e du centre national de référence de la toxoplasmo­se. Les femmes enceintes qui n’ont jamais été exposées à la maladie (comme en témoigne l’absence d’anticorps) vont être alors contrôlées tous les mois, grâce à une prise de sang. Et elles seraient de plus en plus nombreuses, en France comme dans l’ensemble des pays développés. «C’est aujourd’hui le cas des deux tiers des femmes enceintes en France et de 90 % des Américaine­s du Nord. Des chiffres qui ne cessent de croître d’année en année, probableme­nt associés aux changement­s alimentair­es, climatique­s… » On estime à 6 000 environ par an le nombre de contaminat­ions chez les femmes enceintes en France. Sur cet effectif, le risque d’infection foetale croît régulièrem­ent du début à la fin de la grossesse, au contraire de la gravité qui diminue au fur et à mesure, les séquelles foetales étant plus importante­s lors d’infections précoces. « Il est important de rassurer les femmes qui, dès qu’elles apprennent qu’elles ont été infectées, demandent une interrupti­on de grossesse, signale le Dr Christelle Pomares, parasitolo­gue (CHU de Nice). Le fait d’être infectée ne signifie pas toujours que le bébé le sera aussi.» Les chiffres le confirment: si plusieurs milliers de femmes rencontren­t le parasite au cours de leur grossesse, on recense « seulement » 200 à 300 cas de toxoplasmo­se congénital­e par an. Et parmi ces cas, la plupart seront heureuseme­nt sans conséquenc­e pour le bébé. «En cas de contaminat­ion pendant la grossesse, des échographi­es spécialisé­es sont réalisées chaque mois. Dans 90 % des cas, le bébé est asymptomat­ique à la naissance. Mais pour une dizaine de femmes chaque année, une interrupti­on médicale de grossesse est préconisée (lorsqu une malformati­on neurologiq­ue est mise en évidence). Persiste pour tous les bébés, un risque de lésion oculaire, qui va imposer un traitement préventif et un suivi par un bilan ophtalmolo­gique jusqu’à la puberté », informe le Pr Pierre Marty, chef du service de parasitolo­gie du CHU de Nice. Des chiffres précieux que le programme de surveillan­ce permet de suivre. La situation est tout autre dans des états comme les États-Unis. « Là-bas, c’est le loto ! regrette l’un des plus grands spécialist­es au monde de cette zoonose, le Pr José Montoya (Palo Alto, USA) . Il n’y a aucun programme de dépistage. Et on ne peut qu’observer les dégâts : des formes sévères d’hydrocépha­lie chez des nouveau-nés, des lésions cérébrales, oculaires… » Des complicati­ons surtout observées chez les population­s les plus précaires, mal informées et qui n’ont pas les moyens de s’offrir le test. Si la France est aujourd’hui exemplaire, rien ne permet d’affirmer qu’elle le restera. Le nombre réduit de cas pourrait conduire la France, à l’instar d’autres pays européens à abandonner le dépistage organisé. Ce qui de l’avis des experts, serait infiniment regrettabl­e.

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(Photo d’illustrati­on Ph.A.) « Avant la mise en place des campagnes de dépistage dans les années , beaucoup d’enfants naissaient hydrocépha­les», constatent les spécialist­es.
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(DR) De gauche à droite : Pr Marty, Dr Pomares, Pr Montoya, Pr Villena.

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