Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le colonel Foisel revient sur ses deux années à la tête de l’unité

Le colonel Gabriel Foisel quittera le commandeme­nt de l’UIISC7 aujourd’hui. Il revient sur les deux ans qu’il a passés à Brignoles et les missions qui ont marqué son mandat

- PROPOS RECUEILLIS PAR GUILLAUME JAMET gjamet@varmatin.com

« Le chef », malgré une carrure imposante et cinq barrettes à l’épaule, semble un peu mal à l’aise à l’idée de parler de lui. « Pas de photo dans mon bureau: c’est le bordel… Et puis, je ne veux pas laisser l’image d’un gars assis derrière une table: c’est pas moi ça… » Aujourd’hui, le colonel Gabriel Foisel quittera le camp Couderc et l’UIISC7 de Brignoles et laissera la place à l’un des officiers supérieurs actuelleme­nt placés sous son commandeme­nt.

Vous êtes arrivé dans le Var, à Brignoles, en juin , pour prendre votre premier poste de chef de corps… Quel était votre état d’esprit en découvrant l’unité ?

Déjà, je ne découvrais pas le Var, puisque j’y ai servi « tout petit », comme sergent, à Giens, en  et … Après, commander, c’est l’objectif de tout officier. On m’a annoncé qu’on me confiait l’UIISC en janvier . Je me préparais à un tel poste depuis trois ans. Ici, c’est un lieu historique : c’est la première unité UIISC, créée en . J’y suis arrivé avec l’envie de fédérer les énergies et une idée phare : rappeler que nous sommes des militaires.

Rappeler que vous êtes des militaires… Pourquoi ?

Notre mission, contrairem­ent à la plupart des autres forces de secours, s’inscrit dans la durée des interventi­ons. Nous devons nous tenir prêts à intervenir sur n’importe quel événement de grande ampleur, partout sur le territoire où les moyens locaux sont ou seront dépassés. Cela suppose que nous sachions gérer des situations de crise diverses : feu, inondation, pollution, neige, cyclones… Je nous compare à un athlète qualifié aux Jeux olympiques qui s’entraîne sans connaître la date de la compétitio­n. Le jour venu, il faudra la remporter. C’est notre mission.

Vous avez été beaucoup sollicités ces deux dernières années. On se souvient de l’ouragan Matthew en Haïti en octobre , des feux au Chili en janvier , à nouveau des ouragans en Guadeloupe en septembre , après une saison de feux de forêt très intense…

C’est dans l’action que nous nous sentons utiles. Attention : je ne dis pas que je souhaite que le malheur frappe, évidemment… Mais c’est pour ces moments que nous nous préparons tout au long de notre carrière, C’est pour ça qu’on existe. On est là pour servir. J’ai été appelé à partir à deux reprises pour commander les détachemen­ts. C’est inhabituel pour un chef de corps. C’est surtout une aventure humaine incroyable, où l’on est confronté à de nombreuses difficulté­s, que nous avons le devoir de surmonter, dans des conditions souvent très compliquée­s.

Par exemple ? Nous avons été envoyés en Haïti pour potabilise­r de l’eau. Arrivés sur place, après  heures de route, nous avons installé notre matériel et nous sommes rendu compte que l’eau était plus de dix fois trop « sale » pour que nos équipement­s puissent fonctionne­r. Les technicien­s se sont réunis… Une heure après, ils me proposaien­t une solution permettant d’obtenir un résultat satisfaisa­nt. Un montage inédit, qui n’est prévu dans aucun protocole. C’est ça, la force de la Sécurité civile : des spécialist­es qui savent trouver des solutions pour rendre l’impossible possible. C’est aussi là qu’un chef sait qu’il peut se reposer sur une équipe compétente et autonome. Je n’ai jamais été laissé seul face aux problèmes…

On sent la fierté… C’en est une : on a la fierté d’accomplir nos missions, de répondre aux ordres, de servir. On est une équipe qui a bravé des conditions météo épouvantab­les, des difficulté­s logistique­s et qui est rentrée en ayant accompli sa mission.

C’est aussi, on imagine, une réussite personnell­e… Vous parvenez à diriger vos sapeurs de telle manière qu’ils sont efficaces…

Un militaire a toujours un supérieur vers lequel se tourner. Pourtant, un chef de corps doit être en mesure de gérer son unité seul. J’ai des supérieurs, bien sûr, mais, ici, je dois être autonome. Je gère ce camp, les hommes et femmes qui y travaillen­t, comme un père de famille. Ça veut dire que je suis là pour les guider, les conseiller, leur donner un objectif… Les gronder parfois. C’est un état d’esprit : chaque jour, je fais en sorte que les gens arrivent au boulot avec la volonté et le sourire. Aujourd’hui, ici, il y a  sapeurs sous mes ordres. Mais j’ai commencé par commander une section ( soldats), puis une compagnie ()… Commander, ce n’est pas facile. Pas du tout. Ça s’apprend.

L’UIISC est un camp militaire un peu particulie­r, où l’on organise des journées portes ouvertes, où l’on reçoit des collégiens « cadets de la Sécurité civile » tout au long de l’année…

Ça vous étonne ? Moi je trouve ça très bien : ça permet de faire connaître nos métiers, nos matériels… D’en prendre plein les yeux. On est tous des gosses devant un avion bombardier d’eau qui effectue un largage. Même moi. Quant aux cadets, je trouve que c’est une idée formidable : on leur apprend la cohésion, dans un cadre militaire : ils ont un emblème, un uniforme… Ils sont formés aux premiers secours, participen­t à des exercices avec les soldats. Certains jeunes, en difficulté scolaire, se révèlent quand on les responsabi­lise et qu’on leur montre du respect…

Vous quittez Brignoles et l’UIISC… Quel est votre sentiment aujourd’hui ?

Un peu de tristesse et déjà de la nostalgie, mais je suis les ordres : le contrat et sa durée étaient connus dès le départ. Je pars avec la très grande satisfacti­on d’avoir rempli ma mission et de ne pas avoir eu à connaître la perte d’un soldat… Mon départ coïncide aussi avec une demande familiale. Mais ça ne veut pas dire que vous ne me reverrez pas… C’est-à-dire ? Je poursuis ma carrière d’officier. Elle pourrait me conduire, si les choses se passent comme je l’espère, à être un jour nommé au poste « du dessus » et prendre le commandeme­nt des forces de Sécurité civile au niveau national. Peut-être d’ici  à  ans.

Un mot sur votre successeur ?

C’est un officier qui se trouve actuelleme­nt sous mes ordres et qui a été chef d’opération au Chili, en janvier . Une personne d’une grande intelligen­ce et dont le profil, je le sais, correspond tout à fait au poste.

Qu’avez-vous à lui dire ?

Rien de particulie­r. Il est comme moi : il a été appelé à ce poste pour remplir une mission. Ici, je sais que les soldats vont tout faire pour qu’il ait les moyens de bien la remplir.

Vous avez été consulté pour sa nomination ?

Non. Ça ne marche pas comme ça à l’armée… Il y a des instances supérieure­s qui décident des postes que vous devez occuper, je n’ai pas eu mon mot à dire.

Une déclaratio­n finale ?

Les gens peuvent dormir tranquille­s. On sera toujours là pour eux.

‘‘ Chaque jour, je fais en sorte que les gens arrivent au boulot avec la volonté et le sourire”

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 ?? (Photo Gilbert Rinaudo.) ?? Gabriel Foisel pose devant les portraits de ses prédécesse­urs à la tête de l’UIISC, dans le hall du bâtiment de l’état major.
(Photo Gilbert Rinaudo.) Gabriel Foisel pose devant les portraits de ses prédécesse­urs à la tête de l’UIISC, dans le hall du bâtiment de l’état major.

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