Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Les scolaires oeuvrent pour le devoir de mémoire
Trois classes de CM1/CM2 du département ont créé des oeuvres mémorielles et artistiques autour de la vie d’un poilu. Un vrai travail historique de fond pour lequel ils ont été récompensés
Lorsqu’on parle de commémorations, on pense tout de suite aux cérémonies. Ici, l’idée est de commémorer autrement ! », lançait Jérôme Guervin. Le directeur du service départemental du Var de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) faisait face, hier, à trois classes élémentaires de CM1 & CM2 (1). Tous étaient réunis au sein de l’auditorium du pôle culturel Chabran à Draguignan pour la remise des prix du 12e concours scolaire « Les petits artistes de la mémoire ».
S’approprier l’histoire
Avec ce concours national, l’ONACVG convie chaque année les élèves à s’approprier leur histoire et à la transmettre. Pour cela, les «têtes blondes» sont invitées à effectuer un véritable travail de recherches autour de la Grande Guerre. « L’objectif est de retracer le carnet de guerre d’un soldat, son parcours, sa vie avant, pendant et après le conflit.» Cela avec une approche qui marie plusieurs disciplines. «C’est un moyen pédagogique adapté aux plus jeunes. » Mais aussi avec un ancrage local. «Le soldat doit être originaire de leur commune.» Encadrés par leurs professeurs, les élèves se lancent donc dans une recherche de témoignages chez eux, dans leur histoire familiale et dans les archives départementales et municipales. « Pour qu’ils se rendent compte que la guerre est aussi passée par chez eux.» «Aujourd’hui, c’est vous qui reprenez le flambeau pour en parler, précisait de son côté Agnès Goudail, directrice des Archives départementales du Var. Et c’est très important. De se souvenir de cette période. Du courage qu’il a fallu à ces hommes pour vaincre et construire le monde d’aujourd’hui. » Et d’ajouter : « Faire de l’histoire, c’est faire revivre et partager les expériences du passé. Mais c’est aussi faire des oeuvres. »
Des travaux qualitatifs
« Vous nous avez livré des travaux très différents, mais de grande qualité, poursuivait Jérôme Guervin. Ca a été difficile de vous départager. » Arrivée troisième, la classe de CM1/CM2 de l’école Jean-Reynier de Taradeau a créé une oeuvre numérique. Un film documentaire qui retrace le parcours de plusieurs soldats, avec interview de la mémoire vivante du village à l’appui. Seconde, la classe de l’école élémentaire Marcel-Pagnol de Draguignan a, elle, élaboré un carnet de poilu, récompensé « pour ses qualités esthétiques et plastiques, avec le parcours d’un mort pour la France méticuleusement restitué.» Mais c’est la classe de l’école Denis-Tissot du Cannet-des-Maures qui remportait les faveurs du jury. « Avec un travail de recherches autour de plusieurs soldats, suivi d’un vote des élèves pour déterminer lequel d’entre eux serait choisi et étudié. » Un carnet sous forme de journal, primé « pour son originalité, avec notamment la réalisation de croix de guerre ou de bombardiers allemands en 3D. » « Nous avions déjà participé à ce concours il y a deux ans, expliquaient Emilie Sammut et Julian Otto-Bruc. Ce type de projet est intéressant sur le plan pédagogique, puisque nous abordons aussi bien l’histoire que le français ou les arts plastiques. Ça permet aussi aux élèves de se plonger dans leur histoire familiale lorsqu’ils mènent leur enquête. Ça crée du lien. De l’échange. » Dire que les jeunes étaient impliqués dans le projet relèverait du doux euphémisme, « au point qu’ils en arrivaient à dire ceci : “Ce n’est plus notre arrière-grandpère, c’est notre soldat.” » Un des moments marquant ? «Ils ont aussi eu l’idée de créer un personnage géant, sous forme de poupée. Comme un porte-bonheur pour le soldat. Auquel ils ont ajouté des blessures de guerre. Ca a été un instant fort. » Et d’ajouter : « L’une des satisfactions autour de ce projet, c’est qu’au final, les élèves ne se rendent pas compte qu’ils apprennent... » Du côté des principaux intéressés, nul doute que les esprits ont été marqués, à l’image de Clara, 10 ans : « Ce que j’ai le plus aimé, c’est le travail de groupe. J’ai notamment étudié les blessures et les éclats d’obus du soldat. J’ai aussi appris beaucoup de choses sur la manière dont ils vivaient dans les tranchées. » Ou d’Adam : « Moi, j’ai travaillé sur la vie compliquée du soldat après-guerre. Sur le fait qu’il ne se reconnaissait plus. Qu’il se regardait dans le miroir en disant : “Non, ce n’est pas moi”. C’était très prenant. » Les élèves sont désormais en lice pour le prix académique. Le jury se réunit aujourd’hui même à Nice afin de sélectionner la réalisation qui représentera l’académie au concours national. Bonne chance à eux !