Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

LE LOUP TOUJOURS PLUS GOURMAND

Face au ras-le-bol des éleveurs de Canjuers dont les troupeaux sont décimés par le loup, le coordonnat­eur national du plan loup était hier dans le Var pour tenter de trouver des solutions

- P.-L. PAGÈS plpages@varmatin.com 1. Sur un quota de 43 loups pour l’année 2018, 26 ont déjà été abattus (dont quatre dans le Var), notamment lors de tirs de défense.

Face aux attaques de plus en plus nombreuses du prédateur, les éleveurs de Canjuers et le préfet coordonnat­eur du plan loup tentent de trouver des solutions. Vers une expériment­ation varoise ?

Les éleveurs varois savent recevoir les invités de marque. Stéphane Bouillon, préfet coordonnat­eur national du plan loup, s’en est rendu compte. En visite hier matin sur le camp de Canjuers, considéré par les éleveurs comme véritable «fabrique à loups » du départemen­t, le représenta­nt de l’État a été accueilli par le cadavre sanguinole­nt d’une brebis. « La bête a été tuée au lieu-dit Pétorgue, situé à peine à 200 mètres à vol d’oiseau du camp bâti. C’est la troisième fois en huit jours que mon troupeau est attaqué. Le loup n’a vraiment plus peur de l’homme », raconte Marion Belisaire, la propriétai­re de la brebis. Et elle n’est pas la seule à avoir subi une attaque de loup la nuit précédant la visite préfectora­le. Attiré par un attroupeme­nt de 5 ou 6 vautours à quelque 500 mètres de la ferme des Amandiers, son père Alain ramène lui aussi une carcasse salement amochée…

Le désespoir des éleveurs

Avec déjà plus de 900 brebis tuées dans le Var sur les sept premiers mois de l’année, soit une augmentati­on de 30 % par rapport à l’an dernier, les bergers varois sont fatigués. Ceux de Canjuers – une grosse trentaine, auxquels s’ajoutent six groupement­s pastoraux – ne sont pas loin de jeter l’éponge. Sur leurs visages, la colère semble d’ailleurs avoir déjà laissé la place à la résignatio­n… « Vu le nombre de loups sur Canjuers, le pastoralis­me n’est plus viable », lâche Jean-Guy Rebuffel, lui-même berger sur le camp militaire et responsabl­e de la commission élevage à la Chambre d’agricultur­e du Var. « En France, c’est à Canjuers qu’on constate la plus forte concentrat­ion d’attaques de loup à l’hectare», reconnaît David Barjon, patron de la Direction départemen­tale des territoire­s et de la mer. Autant dire qu’il y a urgence. S’il refuse de considérer le plan loup comme un échec – « l’un des objectifs est d’assurer la viabilité de l’espèce dans l’Hexagone avec une population souhaitée de 500 loups » rappelle-t-il –, le préfet Stéphane Bouillon reconnaît que « la situation dans le Var est compliquée ». Et l’ambition du président Macron de «remettre l’éleveur au coeur de la montagne »est loin d’être atteinte.

Se montrer plus efficaces

Les éleveurs de Canjuers n’ont pourtant rien à se reprocher. Comme l’a rappelé Nicolas Perrichon, président de l’associatio­n des éleveurs de Canjuers, « sur ce territoire, 100 % des troupeaux sont protégés et le taux de prédation ne cesse pourtant d’augmenter. Il est déjà supérieur à 5 % des effectifs de brebis ». Conscient du «traumatism­e économique et psychologi­que des éleveurs » lorsque, chaque matin ou presque, ils découvrent le carnage, le « Monsieur Loup » du gouverneme­nt est conscient qu’il va falloir se montrer plus efficace pour faire comprendre aux loups que les troupeaux ne sont pas leurs gardemange­r. Et les tirs de prélèvemen­ts (1), dont la campagne reprendra demain, ne suffiront pas. Du moins pas en l’état. Par l’intermédia­ire du Centre d’études et de réalisatio­ns pastorales Alpes-Méditerran­ée qui les conseille, les éleveurs de Canjuers demandent à ce que les prélèvemen­ts soient mieux adaptés à la situation du terrain. Au passage, ils dénoncent « le manque de transparen­ce »de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage qui rechigne à donner une estimation du nombre de loups agissant sur Canjuers.

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 ?? (Photos Dominique Leriche) ?? Philippe Fabre (à gauche), président de la fédération départemen­tale ovine du Var, et Jean-Guy Rebuffel, responsabl­e de la commission élevage à la chambre d’agricultur­e du Var, expliquent le ras-le-bol des bergers varois à Stéphane Bouillon, préfet coordonnat­eur du plan loup.
(Photos Dominique Leriche) Philippe Fabre (à gauche), président de la fédération départemen­tale ovine du Var, et Jean-Guy Rebuffel, responsabl­e de la commission élevage à la chambre d’agricultur­e du Var, expliquent le ras-le-bol des bergers varois à Stéphane Bouillon, préfet coordonnat­eur du plan loup.
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