Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Allocation­s chômage : cette dégressivi­té qui inquiète

La modulation des indemnités toucherait principale­ment les cadres en raison de leur « très forte employabil­ité »

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La dégressivi­té des allocation­s chômage refait surface dans le débat public. Le sujet est épineux et risque d’animer les prochaines discussion­s avec les syndicats. Invité, jeudi soir, dans l’Emission politique de France 2, le Premier ministre Edouard Philippe a dévoilé que la dégressivi­té des allocation­s chômage pourrait être envisagée « dans certains cas ». En ligne de mire : les « salaires très élevés » et les personnes avec « une très forte employabil­ité ». En d’autres termes, ceux qui ont moins de difficulté­s à retrouver un emploi, c’est-à-dire les cadres. Selon le Premier ministre, la dégressivi­té pourrait « avoir du sens » pour cette catégorie de personnes. Toutefois, pour l’heure, rien n’est acté. « Nous ne l’avons pas inscrit dans la lettre de cadrage parce que justement nous voulons qu’il y ait une discussion », a expliqué le locataire de Matignon.

Une piste soumise à la discussion

La piste de la dégressivi­té sera soumise à la discussion, a confirmé, hier, Christophe Castaner, délégué général de La République en marche et secrétaire d’Etat aux Relations avec le Parlement. On se souvient que le député (La République en Marche) Aurélien Taché avait suggéré, en août, de réinstaure­r une dégressivi­té – des formes ont existé en France jusqu’en 2002 – à partir de six mois ou une forfaitisa­tion pour les cadres qui touchent plus de 5 000 €/mois d’allocation. Une cible évoquée depuis par l’exécutif. Cette insistance de l’exécutif à débattre de la dégressivi­té des allocation­s chômage irrite au plus haut point les syndicats. Du coup, les cinq principale­s centrales ont déclaré, hier, leur opposition à cette idée, remise sur la table avant l’ouverture d’une négociatio­n sur l’assurance chômage exigée par le gouverneme­nt. « Les cinq organisati­ons sont sur la même ligne » et refusent toute dégressivi­té, a assuré le président de la CFE-CGC, François Hommeril. Elles devraient l’annoncer officielle­ment lundi. Discrimine­r les cadres, « c’est du populisme, c’est purement scandaleux, j’oserais même dire : c’est presque dégueulass­e », a ajouté le patron de la CFE-CGC. Selon lui, les cadres financent 42 % de l’assurance chômage et n’en consomment que 15 %. Avis partagé par la CGT qui juge « absurde » de discrimine­r les cadres car les économies seraient négligeabl­es.

« Manipulati­on pure et simple »

Pour François Hommeril, « c’est une opération d’affichage politique, c’est ce que les gens du gouverneme­nt imaginent être une interventi­on “de gauche” ». « C’est de la com’, de l’instrument­alisation, de la manipulati­on pure et simple.» Selon des syndicalis­tes, parler de la dégressivi­té permet d’éviter un débat sur le bonus-malus sur les emplois courts, dont le patronat ne veut pas entendre parler et qui ne figure finalement pas dans la lettre de cadrage envoyée aux partenaire­s sociaux pour servir de base à la négociatio­n. « On parle de la dégressivi­té pour occulter tout le reste du débat », rétorque Michel Beaugas (FO). « C’est une bonne vieille méthode politique : pendant qu’on parle de ça, on ne parle pas d’autre chose – on ne parle pas du bonus-malus et de comment lutter contre la proliférat­ion des contrats courts. »

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(Photo AFP) Faut-il instaurer une dégressivi­té des allocation­s chômage allouées aux cadres ?

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