Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Assises : sursis total pour les coups mortels à La Seyne

Le jury populaire a laissé libre l’accusé, en plaçant une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. L’avocat général avait requis cinq ans de prison, dont deux ferme

- G. D.

Sylvain Sandri n’avait pas subi un jour de détention provisoire après la soirée du 16 février 2014 à La Seynesur-Mer. Son voisin Christian Chalmont y avait succombé à un infarctus, lors d’échange de coups, au sujet de crottes de chien. La cour d’assises du Var a suivi, hier, la même logique qui avait conduit le juge des libertés et de la détention à le laisser libre sous contrôle judiciaire. Déclaré coupable de violences volontaire­s ayant entraîné la mort sans intention de la donner, Sylvain Sandri a été condamné à cinq ans de prison, intégralem­ent assortis du sursis.

Retardé mais pas fou

A la reprise des débats, la cour avait abordé la personnali­té de l’accusé. Son retard mental et le manque de stimulatio­n parentale avaient débouché sur une scolarité en établissem­ents spécialisé­s. Il en était sorti à sa majorité sans diplôme, avec le statut d’adulte handicapé. Vivant seul à La Seyne, ses matinées étaient consacrées au ménage dans son logement et aux courses. Ensuite, il partait à la pêche ou restait devant Internet. Selon le psychiatre, Sylvain Sandri a conscience de ses déficits, et se met rapidement en position de défense face à tout ce qui pourrait le mettre en danger. Ni pathologie psychiatri­que ni altération du discerneme­nt, a-t-il conclu.

Peine raisonnabl­e

Pas davantage de psychopath­ologie, selon la psychologu­e. Elle n’a pas trouvé Sylvain Sandri agressif, mais sa rigidité défensive pouvait entraîner des troubles du caractère. « Les coronaires touchées, ça n’empêche pas de vivre, a plaidé Me Jean-Baptiste Gobaille en partie civile. Christian Chalmont n’était pas moribond. » Ses proches l’avaient décrit comme généreux, serviable, toujours dans l’empathie, « il méritait que sa vie continue ». Pour l’avocat général Sylvie Odier, il convenait d’infliger à l’accusé « une peine raisonnabl­e », qu’elle a fixée à cinq ans de prison, dont trois avec sursis et mise à l’épreuve. « Le noeud de ce dossier, c’est l’incapacité de M. Sandri de communique­r avec les autres. Il n’a jamais voulu donner la mort, mais sans cette bagarre, M. Chalmont ne serait certaineme­nt pas décédé de soir là. » Au crédit de l’accusé, elle a retenu qu’il était « inconnu de la justice, n’a pas fui sa responsabi­lité et depuis quatre ans a respecté son contrôle judiciaire ».

« C’est vous et moi »

« Il n’avait pas d’autre problème que les crottes de chiens , a noté Me Caroline Malaga en défense. Il avait essayé de le résoudre luimême avec ses voisins, avant de le faire remonter aux autorités. » Me Malaga doutait aussi du lien de causalité entre la bagarre et le décès subit de la victime. « On sait que ce ne sont pas les coups, avec ou sans bâton, qui ont entraîné la mort de M. Chalmont. Si son coeur avait suivi, l’un et l’autre auraient été convoqués pour des violences réciproque­s. » « Que fait-on de M. Sandri ? a-t-elle demandé. C’est, à 52 ans, la première fois de sa vie qu’il fait parler de lui. Son casier judiciaire est vierge, son ADN n’est pas répertorié, il est inconnu des fichiers. M. Sandri, c’est vous et moi. » Avant d’être remis en liberté à la fin du procès, Sylvain Sandri a tenu à dire « que je suis désolé, que j’ai beaucoup de chagrin, et que je ne me pardonne pas ». La ministre de la Justice et garde des Sceaux, Nicole Belloubet, se rendra, ce matin, au tribunal de grande instance de Draguignan pour une simple visite. Elle ira rencontrer les responsabl­es du service de l’exécution des peines et se rendre compte de l’intense activité du tribunal et des assises. Cette visite intervient au moment où des menaces pèsent sur un certain nombre d’établissem­ents. Le gouverneme­nt a déjà dévoilé ses intentions de réunir certains tribunaux dans un souci d’économie. Vers  h , elle devrait inaugurer l’établissem­ent pénitentia­ire de Draguignan. Vers h, une rencontre est prévue avec les étudiants de la faculté de droit de Draguignan.

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) L’avocat général Sylvie Odier et Me Jean-Baptiste Gobaille pour les proches de la victime.

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