Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Le FO pas de Pavageau
Six mois et puis s’en va. Pascal Pavageau n’aura eu le temps, ni de se faire un nom, ni de se forger une réputation à la tête du troisième syndicat de France. Acculé à une démission sans gloire, il a déjà fait ses cartons, laissant, hier, sur le bureau de ses 500 000 adhérents – via une lettre aux dirigeants de la centrale – cette jolie phrase d’adieu: « J’ai revendiqué chaque jour de la vie je n’ai pas su reconquérir. » Des formules plus vachardes, aussi : « Soyez fiers du mal que vous m’avez fait. » C’est l’épilogue d’une affaire vieille d’une petite semaine; depuis que Le Canard enchaîné a déterré un document rédigé en 2016, véritable bombe à retardement. Des fiches visant 120 camarades, remplies de compliments, mais aussi de noms d’oiseaux, aussi exotiques que «mafieux», « brute», « complètement dingue » ou « voleur dans les portefeuilles ». Des annotations prises, à l’époque, dans un climat de campagne électorale féroce. S’il a été désigné en avril dernier par 96 % des délégués, l’élection de Pascal Pavageau, seul en lice, n’a jamais rien eu d’un vote consensuel. Le jour même de son sacre, son prédécesseur, Jean-Claude Mailly tweetait: premier «discours du nouveau secrétaire général: hypocrisie et duplicité». Ambiance…. La divulgation du fichier relèverait donc du règlement de comptes interne? Sans doute, mais personne ne conteste l’existence de ce brûlot, que les militants de base dénonceraient, s’il était découvert dans la poche du directeur des ressources humaines de l’une de ces entreprises qui traquent les syndicalistes. Pavageau a FO… té. Il n’est pas le premier. La CGT a, elle aussi, connu un beau scandale, en 2015, quand Thierry Lepaon a précipitamment quitté la tête de la centrale à cause d’un appartement de fonction rénové à trop grands frais. Même s’il a finalement été blanchi, l’affaire a longtemps éclaboussé sa confédération. Pour Force ouvrière, ce scandale tombe à un très mauvais moment : des élections importantes sont à venir, notamment dans la fonction publique le 6 décembre. Sans oublier les négociations d’automne, partout, dans les ministères, avec les employeurs, qu’il va falloir mener dans la position du canard sans tête. Ce n’est bon ni pour FO, « le syndicat qu’il vous faut », disait Coluche, ni pour ses concurrents. Déjà très décriés, les syndicats ont tout intérêt à prouver que leur fonctionnement interne ne ressemble pas à celui des partis politiques. Ce serait le plus sûr moyen de regagner en crédibilité.
« L’élection de Pascal Pavageau, seul en lice, n’a jamais rien eu d’un vote consensuel. »