Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Yohan Laurito de «Météo Varoise» : «Trois fois plus d’eau que l’an passé»
Sur la toile, ses posts sont toujours attendus avec impatience. Une fois en ligne, ils sont rapidement et massivement relayés par les membres de sa communauté, laquelle compte plus de 55 000 personnes. Le Brignolais Yohan Laurito, fondateur de Météo Varoise (1), site de prévisions météorologiques, est un expert des orages. Il revient pour Var-matin sur les intempéries qui ont frappé le département.
Vous n’avez pas chômé ces derniers jours ?
Non, j’étais encore la nuit dernière (nuit de mercredi à jeudi, Ndlr) à Roquebrune pour surveiller la crue de l’Argens et voir comment se comportaient les orages.
Avons-nous assisté à un phénomène important ?
Concernant la nuit de mardi à mercredi et la journée de mercredi, il est tombé beaucoup d’eau, de à mm dans le centre Var et autour des Maures, en remontant vers Aups et une partie de la Dracénie. Beaucoup d’eau en une seule journée.
Certains redoutaient un phénomène comparable aux tragiques événements de …
Non, on n’aurait pas pu avoir un événement comme . Ce qu’il s’est passé est hors du commun et cela ne se reproduira pas de sitôt. Après, on peut avoir de très grosses pluies. On peut avoir un jour un , mètres mètres sur la station de Roquebrune, oui, mais , c’est un cran au-dessus. On s’attendait néanmoins effectivement à des crues potentielles très importantes, c’est vrai.
Comparativement à l’an dernier ?
Si on ne parle que de pluviométrie, on a triplé les «scores» par rapport à l’an dernier.
Après la sécheresse de l’an dernier, la pluie en abondance cette année…
Oui, depuis les épisodes neigeux effectivement, nous sommes entrés dans un cycle pluvieux, humide à très humide. On dépasse les mm annuels localement au er novembre : c’est une année pluvieuse.
Qu’est-il prévu dans les prochains jours ?
On entre dans des périodes instables donc il y aura forcément des averses à un moment donné et des épisodes perturbés. C’est le cas du mois de novembre. Il y aura des périodes calmes mais ce n’est pas la saison. Ce sera nuageux avec averses.
Qui pourrait durer ?
Ce n’est pas évident de savoir. Ça varie trop.
Ce sont toujours les mêmes secteurs qui sont concernés?
Tous les ans, on a de grosses pluies. Là, elles interviennent sur des sols gorgés d’eau, saturés. Donc, c’est normal que les cours d’eau réagissent. En Méditerranée, on est habitués. Il faut qu’il y ait de grands abats d’eau avant que les cours ne débordent.
Des records de précipitations ont été enregistrés dans le centre Var, et les dégâts ont été moins inquiétants que dans le reste du département...
Tout à fait, le cumul du mois d’octobre est important mais pas excessif contrairement à la plaine de l’Argens ou la plaine des Maures, où on dépasse mm sur le mois ou mm alors que sur le centre Var, on est à ou mm. Seul Fox-Amphoux dépasse les mm. Les parties amont des fleuves souffrent moins que les parties aval où les débordements sont plus sévères.
Les dégâts sont liés à la question d’urbanisation ou non des territoires ?
Non. C’est plutôt une question de relief. Le relief étant très accidenté, forcément, on a de forts ruissellements. Et ces ruissellements, quand ils interviennent (peu importe la zone), vont générer à un moment donné des problèmes. Plus qu’un effet d’urbanisation, c’est un problème de topographie et on y est confrontés tout le temps. Le Golfe de Saint Tropez, par exemple, fait partie des secteurs propices aux fortes pluies stationnaires. Ça se bloque au relief des Maures. On a des abats d’eau énormes et à moment donné, la saturation des sols ne permet plus quoi que ce soit.
La commune du Luc a connu des records de précipitations. Une question de topographie ?
Il y a eu Le Luc, Collobrières… On dépasse les mm. Les orages se forment sur les Maures et remontent ensuite dans la plaine. Donc, c’est cohérent. La station se situe au Cannet-des-Maures, à l’aérodrome.
Le bilan des intempéries s’est alourdi avec une personne décédée à Saint-Antonin-du-Var, retrouvée dans sa voiture. Vous prenez des précautions particulières lorsque vous travaillez au plus près des intempéries et des crues ?
Oui. Forcément. Je ne suis jamais stationné sur une route du littoral par rapport au risque d’effondrement d’une route, suite à un débordement ou un coup de mer trop violent. Je suis toujours sur les hauteurs ou une colline : il vaut mieux si on est pris dans un orage stationnaire. Jamais, jamais, jamais sur le littoral ou les routes du bord de plaine, car lors de cruesé clair dont le niveau d’eau monte parfois en minutes ou une heure, vous n’avez pas le temps de revenir. Si vous êtes pris dans une zone de , kilomètres de large, ça suffit et vous ne vous en sortez pas parce qu’il tombe des trombes d’eau. Si vous êtes en bas, ça craint pour vous.
Le Carami a-t-il débordé dans la nuit de mercredi à jeudi ?
Oui, on m’a rapporté des débordements très locaux mais très classiques.
Chaque épisode pluvieux génère, vous l’avez constaté, un nombre incalculable de commentaires sur les réseaux…
Oui. C’est même trop. La culture du risque, je pense que les gens l’ont intégrée, mais il faut l’intégrer intelligemment. Chaque pluie n’engendre pas une inondation et il faut insister là-dessus. Il faut vivre avec.