Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Anne-Marie et Alain, Saint-Raphaël: « On attendait mieux sur toute la ligne»
À Saint-Raphaël, Anne-Marie Fenard et Alain Gorse, retraités du privé, veulent croire en un sursaut du président de la République. Ils sont désabusés mais enclins à lui laisser encore un peu de temps pour corriger le tir. Se présentant comme de sensibilité de gauche, ces déçus du hollandisme attendaient bien plus de son ancien ministre de l’Économie : faire baisser le chômage, en particulier celui des jeunes, la retraite à 60 ans pour tous, une meilleure couverture santé. « On est loin du compte, selon la Raphaëloise. L’emploi est toujours au plus bas, le chômage ne baisse pas. Je déplore le maintien du CICE, un cadeau sans contrepartie aux grosses entreprises. »
Les inégalités se creusent
Emmanuel Macron est, à leurs yeux, le président des riches. « Je l’appelle Monsieur taxes », s’amuse Mme Fenard, malgré une baisse de la taxe d’habitation dont le couple a bénéficié. Elle ne digère pas en effet la suppression de l’ISF : «Ce sont les classes moyennes qui dégustent. Je suis d’accord pour participer au financement des services publics via mes impôts, mais c’est nous qui payons la fin de l’ISF. Et, sous prétexte de lutte contre le réchauffement climatique, qui est pénalisé par la hausse des taxes sur le prix des carburants ? Les plus pauvres et les provinciaux qui n’ont pas d’alternative à la voiture. Les inégalités se creusent entre les plus riches et les plus démunis. Avis aux premiers de cordée, il faudrait que ça ruisselle... » Un sujet les fâche : « La réforme des retraites est une usine à gaz. Il y a trop d’écart entre les retraites des fonctionnaires et du privé. Dans le privé aussi les salaires sont très bas, alors regrouper les caisses de retraite, ce n’est pas anormal, à condition de ne pas tout niveler par le bas », pour l’ancienne secrétaire de direction dans le BTP, qui voit d’un bon oeil la remise en cause du statut de fonctionnaire, synonyme pour elle d’emploi à vie. « En revanche, le gouvernement n’annonce pas franchement la couleur. Il prétend que l’âge de départ ne va pas augmenter, mais en réalité les gens n’auront pas la possibilité ni les moyens de partir à 62 ans, ce qui correspondra de fait à un relèvement de l’âge de départ ». Sa désillusion concerne également l’écologie : « Il ne fait pas grand-chose. La loi Égalité Alimentation, c’est de la foutaise. On sent le poids des lobbyistes et de la FNSEA toute puissante ».
Le concret tarde à venir
Après cette liste de reproches, une décision prise en début de quinquennat est, au moins, approuvée : « Le dédoublement des classes de CP dans les zones prioritaires, c’est positif ». Mais dans ce domaine encore, le couple nuance : « ParcourSup a laissé des jeunes sur le carreau. Beaucoup ont galéré pour avoir une affectation. Et étudier reste très cher, avec des APL réduites de surcroît. Ceux qui doivent travailler pour financer leurs études ont moins de chances de réussir. Il y a toujours une sélection par l’argent. Il faut absolument faire plus de social ». Sur un autre terrain, celui de la personnalité du Président, sa façon d’être est jugée négativement : « Au début ça allait, mais son élocution, ses sorties théâtrales font qu’il n’a pas l’air sincère », juge Anne-Marie Fenard « On s’attendait à mieux sur toute la ligne. Le concret tarde à venir », ajoute son compagnon. « Emmanuel Macron doit se reprendre d’ici la fin du mandat. Il faut qu’il réduise les inégalités et fasse baisser le chômage », estime la retraitée, redoutant : « S’il échoue, et je ne le souhaite pas, on aura un populiste en 2022… »