Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
À Comps-sur-Artuby le généraliste s’en va…
« Nous nous faisons du souci pour les patients du canton. » Christelle Quinchon, infirmière, et André Creutz, kinésithérapeute, en ont visiblement gros sur la patate. Ces deux professionnels de la santé travaillent sur le canton de Comps-sur-Artuby, principalement à domicile, mais parfois, pour Christelle, au sein de la toute récente maison médicale qui surplombe la sortie Nord du village. Là, des équipements, mais bientôt plus de généraliste. Le docteur Cristofaro, en poste depuis juin 2012, prépare sa sortie. Il ne reçoit déjà plus que les lundis et les jeudis. Et refuse de nous parler. Pour le kiné et l’infirmière, c’est une catastrophe pour l’offre de soins sur le canton. « Il y a un danger pour la population. Nous sommes situés à une heure du premier hôpital, un éloignement qui justifie légalement la présence d’un médecin 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. » Ce n’est plus le cas.
Neuf villages orphelins de généraliste
« Une période difficile », concède Alain Barale, maire de Comps. « Nous n’avons pas de contact concret pour le remplacement du docteur, poursuit-il. Mais je suis confiant, on trouvera une solution. » Un optimisme peu convaincant, surtout lorsqu’il ajoute: «Il faut qu’on trouve un ou plusieurs médecins qui assurent des temps de présence ici. Mais les professionnels de santé sont davantage attirés vers des postes de salariés dans les hôpitaux par exemple… » Retour à la maison médicale, en compagnie de Christelle Quinchon et André Creutz. « En cas de grande urgence, ce serait une question de péril pour la personne, prévient l’infirmière. Il y a bien sûr les pompiers, mais ils ne font pas des soins, juste les premiers secours. Le Service mobile d’urgence et de réanimation (Smur) met 45 minutes à monter de l’hôpital. Il y a l’hélicoptère Dragon, mais il n’intervient que sur diagnostic d’un médecin.» Pas de médecin, pas de Dragon. Les habitants des neuf villages (Comps, Bargème, La Roque-Esclapon, La Bastide, La Martre, Châteauvieux, Brenon, Le Bourguet et Trigance) sur lesquels intervient exclusivement le docteur Cristofaro ont du souci à se faire. Soit « 1 420 personnes », rappelle André Creutz, qui complète : « Des personnes âgées, des enfants, des malades chroniques… » Il y a aussi les conséquences collatérales, comme la perte, pour la maison médicale, du label permettant des moyens de fonctionner. « Mon activité est aussi menacée, ajoute Christelle Quinchon. Les patients que je soigne, c’est sur prescription médicale. Sans ordonnance, pas de patient. » Pour André Creutz, il faut agir, et vite. « Nous essayons de convaincre les patients qu’il faut se mobiliser. » Mais ce n’est pas facile. « Les gens sont mal informés. Même ceux qui sont au courant du futur départ du médecin, ils sont fatalistes face à la situation. » Marcelle Isnard, 93 ans, patiente du kiné à La Bastide, témoigne : « Je suis inquiète et je ne suis pas la seule. Si j’ai un problème, il n’y a que les pompiers par ici. » Alors effectivement, il faut agir. Et sans doute dépasser les vieilles querelles qui semblent encore freiner le dialogue entre toutes les parties. On parle là de supposés conflits opposants élus et professionnels de santé, sur fond de transfert de la gérance de la maison médicale, passant de l’ancienne Communauté de communes Artuby-Verdon à la Communauté d’agglomération dracénoise… Des bruits parasites à faire taire. La situation le mérite.