Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

À La Seyne, le port de commerce de Brégaillon coupé du monde

Depuis le milieu de la semaine, le port de marchandis­es est complèteme­nt paralysé par les Gilets jaunes. Plus d’une centaine de routiers, turcs pour l’essentiel, sont bloqués à l’extérieur

- P.-L. PAGÈS plpages@varmatin.com

Si par arrêté préfectora­l, «les véhicules de transports de marchandis­es retardés du fait du mouvement social national »ont été autorisés à circuler tout le week-end, cette dérogation ne concernait visiblemen­t pas les camions majoritair­ement turcs en attente d’embarqueme­nt au port de La Seyne-sur-Mer. Depuis jeudi, le port de commerce de Brégaillon est entièremen­t bloqué par les Gilets jaunes. Et ces derniers ne montrent aucun signe d’essoufflem­ent. Si au lever du jour, les manifestan­ts n’étaient qu’une petite vingtaine à interdire l’accès au port, leur nombre n’a fait que grossir tout au long de la journée. Et à la nuit tombée, ils étaient bien deux cents à filtrer, dans une ambiance de kermesse, pour ne pas dire un joli foutoir, la circulatio­n au rond-point desservant l’enceinte portuaire.

Des routiers dans l’attente

Avec l’arrivée hier matin du Cuneyt Solakoglu, l’un des rouliers de la compagnie UN Ro-Ro qui assurent les rotations entre la rade de Toulon et Istanbul, les chauffeurs routiers espéraient bien pouvoir parcourir les quelques centaines de mètres à peine qui les séparent des quais seynois. Mais rien à faire, les Gilets jaunes sont restés inflexible­s. Pour les Turcs, la situation commence à devenir difficile. « Ça fait deux semaines que j’ai quitté la maison. J’aimerais bien revoir ma femme et mon enfant., mais je suis bloqué ici sans savoir si je vais pouvoir embarquer. Et on n’a plus d’argent. Un représenta­nt de ma société de transports nous donne 10 euros par jour. C’est peu », raconte Hassan, plus fataliste qu’en colère. Il est loin d’être le seul dans cette situation. Plus de cent de semi-remorques sont bloqués à l’extérieur du port. Et au moins autant à l’intérieur.

L’incompréhe­nsion

Si toute la journée, des rumeurs d’une interventi­on des forces de l’ordre ont circulé, hier soir à 19 heures le blocus de Brégaillon était toujours total. Au grand désespoir de tous ceux qui travaillen­t sur le port de commerce. Contacté par téléphone, l’un d’eux déclare : « On était prêts à comprendre une opération symbolique, même un filtrage des Gilets jaunes, mais pas un tel blocus. La situation actuelle est indéfendab­le ». Des paroles fortes qui traduisent la peur de voir les rouliers être déroutés vers d’autres ports, au risque de fragiliser l’activité économique de Brégaillon. Une crainte justifiée. Pour preuve, le roulier Cuneyt Solakoglu, qui n’a pu embarquer hier qu’une cinquantai­ne de remorques, a accepté de retarder son appareilla­ge jusqu’à ce matin. Mais pas plus longtemps.

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(Photo P.-L. P.) Si le blocus de Brégaillon se passe jusqu’à présent plutôt dans la bonne humeur, la situation devient difficile pour les profession­nels du port et les chauffeurs routiers en attente d’embarqueme­nt.

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