Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Un jour, on pourra guérir

- AXELLE TRUQUET atruquet@nicematin.fr

Pour la forme la plus sévère, le diagnostic est rapidement posé, avant l’âge de 6 ans. Les signes évocateurs apparaisse­nt dans les premières semaines. Par exemple, il va s’agir d’un bébé qui, lorsqu’il reçoit un vaccin à 2 mois, va présenter un important hématome au point de piqûre. Lorsque la future mère connaît des antécédent­s d’hémophilie dans sa famille, elle accouchera dans une maternité de niveau 3. Le diagnostic est affirmé avec un bilan de coagulatio­n à la naissance.

Préserver le capital articulair­e

Jusqu’à environ 9 mois, le bébé ne court que peu de risques de se blesser puisqu’il bouge relativeme­nt peu. C’est au moment de l’acquisitio­n de la marche que les choses se compliquen­t car les chutes peuvent être nombreuses. «Les ajoute le Dr Monpoux. Les hémophiles peuvent bénéficier d’injections de cortisone, que ce soit dans les genoux, les chevilles, pour limiter l’usure. Si l’hémophile doit, tout au long de sa vie, gérer ces hémarthros­es, les traitement­s ont fait des progrès considérab­les. Au-delà de l’injection de facteurs de coagulatio­n à titre curatif, la stratégie thérapeuti­que a changé ces dernières années. « Sur les hémophilie­s majeures et quelques hémophilie­s modérées, on fait de la prophylaxi­e [le traitement est préventif, Nldr]: on décide d’injecter des facteurs régulièrem­ent, une, deux ou trois fois par semaine. Il existe aujourd’hui des facteurs « longue demi-vie » [la demi-vie est le temps que met la substance pour perdre la moitié de son activité pharmacolo­gique ou physiologi­que, Ndlr] qui permettent d’espacer les injections, annonce le Dr Monpoux. Par exemple, dans l’hémophilie de type B (20 % des hémophiles), on apporte des facteurs IX. Les injections classiques font effet pendant 12 heures.On dispose déjà à Nice de produits efficaces pendant 78 heures et bientôt, on en aura dont la durée sera de 104 heures. Donc on passe de 2 injections par semaine à 1 toutes les deux semaines.» Ces derniers jours, le facteur VIII de coagulatio­n recombinan­t Jivi, a obtenu son autorisati­on de mise sur le marché par la Commission européenne. Il présente l’avantage d’une fréquence d’injection variable selon les caractéris­tiques cliniques du patient : tous les 5 ou 7 jours, ou 2 fois par semaine. Désormais, la stratégie prophylact­ique peut être adoptée avant l’acquisitio­n de la marche (les traitement­s varient selon les formes d’hémophilie), dès 9-12 mois. Cela permet d’éviter les hémarthros­es. Dans les hémophilie­s non majeures, on privilégie les traitement­s curatifs mais certains patients ont besoin d’une prophylaxi­e pour préserver le capital articulair­e. Chez les patients – enfants comme adultes –, il est conseillé de faire du sport. « C’est la meilleure façon de protéger les articulati­ons: les faire travailler, souligne le Pr Rohrlich. Bien sûr il faut choisir une activité adaptée pour limiter le risque de choc. La natation est ce qu’il y a de plus complet. La marche est également bénéfique. » Quid de l’avenir? Les recherches sur la thérapie génique vont bon train et « les résultats sont particuliè­rement encouragea­nts », se réjouissen­t les hématologu­es. « L’idée est d’injecter dans la circulatio­n sanguine un vecteur qui va apporter le gène du facteur manquant pour permettre d’augmenter, voire normaliser le taux ciculant de facteur VIII ou IX, résume le Dr Monpoux. Cela signifiera­it qu’un jour, on pourra guérir de l’hémophilie. C’est absolument

révolution­naire de constater les progrès qui ont été réalisés au cours de ces dernières décennies. » Seulement, il faudra encore faire preuve de patience. Si la recherche avance, il va falloir que l’industrie pharmaceut­ique et les pouvoirs publics suivent et trouvent des accords sur les tarifs.

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