Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Des fèves prêtes à pousser dans les porte-monnaie
La fève est la monnaie locale citoyenne de l’aire toulonnaise, jusqu’à La Roquebrussanne. L’équivalent de 33000 a déjà été émis, mais il faudra attendre le printemps 2019 pour qu’elle entre en circulation
La fève, monnaie locale citoyenne, complémentaire de l’euro, pousse doucement mais sûrement. Elle a une existence physique avec l’émission de 33000 fèves (33 000 euros) rendue possible par un financement participatif. Le détail du projet par mots-clés.
Origine. La réflexion d’une monnaie locale citoyenne (MLC) est née de la rencontre de divers collectifs sensibles à l’idée de transition. C’était en février 2016, lors d’un forum des Colibris de Toulon. Le film Demain a renforcé l’idée que « changer le monde, c’est changer SON monde ». Des gens de divers milieux, qui ne se connaissaient pas, ont phosphoré en prenant exemple sur des projets analogues. Il existe une quarantaine de MLC aujourd’hui en France.
Philosophie. Pourquoi régler ses achats courants en fèves plutôt qu’en euros ? Pour fédérer un réseau d’acteurs locaux portés par les mêmes valeurs. On s’explique : les consommateurs et les prestataires qui pratiqueront cette monnaie doivent tous être adhérents : 10 pour un particulier et au moins 15 pour les prestataires « libres et conscients ». Tous s’engagent à respecter une charte qui est le pilier de ce système d’échange.
Charte. Le but est de relocaliser l’économie, de préserver l’environnement et les relations humaines. Les prestataires qui auront le label fève ont une éthique professionnelle, privilégient les circuits courts d’approvisionnement, la traçabilité des marchandises. « Des services pourraient aussi être réglés avec des fèves, garde d’enfants, entrée à la piscine municipale... Cela existe déjà dans certaines collectivités », entonnent Milène, Françoise et Stéphane, quelquesunes des forces vives de ce collectif inspiré par la sociocratie, sans chef ni président.
Territoire. Le territoire de la fève est celui de la métropole TPM élargi jusqu’à Bandol à l’Ouest, La Roquebrussanne au Nord et Pierrefeu à l’Est. Soit largement plus que la moitié des habitants du Var. Après deux ans et demi d’existence, la fève compte à ce jour 190 particuliers adhérents et 60 prestataires recensés. Charge aux ambassadeurs de les convaincre d’adhérer et de faire adhérer leurs propres fournisseurs pour créer un cercle vertueux. C’est un enjeu important, qui implique des formations pour répandre la parole de la monnaie citoyenne.
Essor. Si des villes font la promotion de la fève, c’est du temps précieux de gagné pour ces bénévoles. Il s’avère qu’Hyères, La Seyne et La Farlède sont séduites par l’idée d’une monnaie locale, complémentaire à l’euro.
Billets. Conçus par le graphiste Aurélien Prudhomme, ils ont un design épuré qui illustre les forces du territoire : un gabian, les monts varois, les plaines cultivées, les plages et les fonds marins. Du papier à fibre longue, sans tissu, les rendent non résistants à un passage en lavelinge. « Les autres monnaies locales qui ont opté pour du papier tissé, deux fois plus cher, l’ont regretté. Il n’y a pas de contrefaçons ». Des encres de sécurité sont utilisées.
Les euros servant à acheter des fèves sont placés à la Nef, banque coopérative qui finance des projets liés à l’environnement, au social et à la culture. La Nef assure un fonds de garantie. Sans création de nouvelle monnaie, c’est un frein à toute spéculation.