Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Les riverains de l’aérodrome sont excédés

Victimes de nuisances sonores, liées à l’activité aérienne, des riverains se sont regroupés en collectif et font circuler une pétition. Ils défendent un usage restreint pour une qualité de vie retrouvée

- CARINE BEKKACHE cbekkache@nicematin.fr

D’un dossier volumineux, posé sur la table de son séjour, Christine ressort une feuille annotée à l’encre noire. « Un jour, la colère m’a prise. J’ai attrapé une montre et recensé chaque passage. Tenez, tout y est. » Lisant le papier, elle détaille : « 11h02, 11h06, 31, 34, 35, 37, 43, 46, etc. Voilà… ULM et hélicoptèr­es passent, repassent au-dessus de nos têtes. Et c’est tous les jours comme ça. » Christine se rapproche de la fenêtre, puis perd son regard au loin. En direction de l’aérodrome de Fayence-Tourrettes, situé à vol d’oiseau de son habitation. « J’ai beau avoir fait installer du double vitrage, rien n’y fait. Les bruits sont insupporta­bles », souffle-t-elle. À ses côtés, Laurent peut en dire autant. Habitant à quelques encablures de là, à proximité du lac de Saint-Cassien, l’homme est constammen­t dérangé par les avions de voltige, dont un qui l’agace particuliè­rement.

« Les nuisances se sont amplifiées »

« En m’installant dans le quartier, il y a trois ans, je ne m’attendais pas à ça, reconnaît-il. Travaillan­t la nuit, je suis obligé de subir ces nuisances. Toute la journée, je les entends faire des piqués, remettre les gaz et ainsi de suite. L’été, cela empire, au point de ne plus pouvoir profiter de simples moments en famille ou entre amis. » Laurent secoue la tête. « Ce n’est pourtant pas faute de m’être renseigné avant d’acheter… » « Étant précisé, souligne Jocelyne, Fayençoise depuis dix-sept ans, que ces nuisances ont pris des proportion­s démesurées ces trois dernières années. » Derrière elle, toujours tournée vers l’aérodrome, Christine esquisse une moue dépitée. «Ce qui a changé ? C’est bien simple : il y a trois écoles d’ULM et deux écoles d’hélicoptèr­e qui viennent s’entraîner ici. Sans compter les avions de voltige. La décision d’y appliquer l’usage restreint au seul vol à voile ayant été mise en suspens en 2007 par certains élus locaux, l’aérodrome est aujourd’hui ouvert à l’aviation civile. » Au grand désarroi de ces riverains. Christine se retourne, puis regagne sa chaise. « En juillet dernier, nous sommes allés à la rencontre du maire de Fayence, qui se trouve être à la tête du syndicat mixte chargé de la gestion de l’aérodrome. Une rencontre infructueu­se, qui nous a poussés à lui adresser un courrier, resté sans réponse à ce jour et envoyé en copie à la présidence de la République. »

« Un aérodrome, oui, mais à usage restreint »

Missive dans laquelle les riverains, regroupés depuis en collectif, interrogen­t : « Comment est-il possible, dans une société comme la nôtre, que quelques individus puissent pourrir en permanence, pour leur seul plaisir, la vie de plusieurs milliers de personnes en toute impunité ? » Cela étant, tous tiennent à cette précision : « Beaucoup pensent que nous sommes opposés à tout. Certains commentair­es, écrits sous la pétition que nous avons mis en ligne, sont même carrément insultants. Mais nous ne remettons pas en cause l’existence de l’aérodrome. Non ! Simplement, son usage restreint au vol à voile nous permettrai­t de retrouver une qualité de vie. » Jocelyne hausse les épaules. « Vous n’avez qu’à déménager, a-t-on pu lire. Oui, c’est tellement plus facile à dire qu’à faire ! Surtout lorsqu’on a investi ses économies dans une maison et qu’on se

retrouve avec des crédits sur le dos. » Dans les environs, pourtant, des panneaux « À vendre » fleurissen­t sur les portails. « Certains sont à bout et préfèrent partir, quitte à le faire à perte , regrette la riveraine. D’autres souffrent de dépression. » Le son de sa voix est soudaineme­nt recouvert par le bruit d’un ULM. Le calme retrouvé, elle poursuit : « Il y a tellement d’argent en jeu, que nous n’aurons jamais gain de cause. Nous en sommes conscients. » Il n’empêche que, comme le dit si bien le dicton : « Qui ne tente rien n’a rien… »

 ?? (Photo Frank Tétaz) ?? Les riverains ne remettent pas en cause l’existence de l’aérodrome de Fayence-Tourrettes, mais bien son « activité excessive ». Leur combat s’inscrit dans la lignée de celui qu’a mené l’associatio­n Unis contre les bruits aériens pendant plus de dix ans.
(Photo Frank Tétaz) Les riverains ne remettent pas en cause l’existence de l’aérodrome de Fayence-Tourrettes, mais bien son « activité excessive ». Leur combat s’inscrit dans la lignée de celui qu’a mené l’associatio­n Unis contre les bruits aériens pendant plus de dix ans.

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