Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le premier texte de Blanquer crispe les syndicats

Instructio­n obligatoir­e dès 3 ans, rôle étoffé des surveillan­ts… Le premier grand texte sur l’école du quinquenna­t Macron crispe les syndicats et nourrit les critiques des opposition­s

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L’Assemblée nationale a donné, hier, le coup d’envoi des débats sur le projet de loi Blanquer, vanté comme porteur de « justice sociale » par le gouverneme­nt, mais accueilli fraîchemen­t par les opposition­s, comme les syndicats d’enseignant­s. Le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer a ainsi défendu la « confiance » comme « fil rouge » de ce premier texte du quinquenna­t sur l’école [lire ci-contre]. Cet ex-directeur général de l’enseigneme­nt scolaire sous Nicolas Sarkozy, devenu un poids lourd de la macronie, a mis en avant devant les députés les bases d’une école permettant de faire « réussir pleinement » tous les élèves, au lancement des débats. Preuve de l’intérêt des élus pour ce projet de vingt-cinq articles qui touche à la matière sensible qu’est l’Éducation nationale, premier employeur de France: plus d’un millier d’amendement­s sont au menu d’ici à vendredi, avant un vote solennel le19 février. Hostiles à un texte dénoncé comme « désespéran­t » sur son blog par Jean-Luc Mélenchon, les Insoumis défendront une motion de rejet d’un texte qui « poursuit la précarisat­ion de l’Éducation nationale ». Ils devraient avoir l’appui des communiste­s qui fustigent un texte « au ton conservate­ur, mais aussi autoritair­e », tandis que pour le groupe PS, Régis Juanico estime que « la confiance ne se décrète pas dans une loi ».

« Museler » les profs

Les Républicai­ns, qui ne voteront pas le projet de loi, tenteront de le renvoyer en commission. « Pas convaincu » par sa mesure phare sur l’instructio­n obligatoir­e, leur orateur Frédéric Reiss critique « une loi d’affichage ».

Un cadeau au « privé » ?

Le texte est contesté dès son premier article qui rappelle le devoir « d’exemplarit­é » des enseignant­s et le respect que doivent leur manifester élèves et familles, une façon selon la gauche de « museler » les profs. Et ce alors qu’ont émergé dernièreme­nt dans le sillage des « gilets jaunes » des mouvements pour un meilleur statut des enseignant­s comme les « stylos rouges », dont certains députés devaient rencontrer des représenta­nts aux abords de l’Assemblée hier. Vantée comme « emblématiq­ue » par le ministre, l’instructio­n obligatoir­e à trois ans, prévue à l’article 2, fait crier LR « à l’injustice », les collectivi­tés devant à l’avenir financer les maternelle­s privées sous contrat. La gauche voit un « cadeau » au privé. Le gouverneme­nt, qui promet de compenser le surcoût pour les communes, évoque 100 millions d’euros (une moitié pour les écoles privées, l’autre pour les publiques selon le ministère). Toujours sur cet article 2, une bataille a été engagée sur le retrait – voulu par le gouverneme­nt – de la mention de l’instructio­n obligatoir­e « pour les enfants des deux sexes, français et étrangers », incluse dans le Code de l’éducation, au nom de la « concision ». L’ex-ministre George Pau-Langevin (PS), comme certains députés LREM, craignent que cela ne freine la scolarisat­ion d’enfants étrangers, la fédération de parents FCPE s’opposant à la suppressio­n de ces « quelques mots qui veulent dire beaucoup ».

« Pions enseignant­s »

La possibilit­é de confier aux assistants d’éducation (ex-« pions ») des « missions d’enseigneme­nt » fait aussi débat. Défendu par le ministre comme une « mesure sociale » qui permettra « d’accompagne­r financière­ment de futurs professeur­s » ,la mesure est décriée par les opposition­s de gauche comme une « précarisat­ion ». Avec la création du Conseil d’évaluation de l’école (CEE), si le ministre récuse toute « évaluation punitive », mais plutôt une « évaluation-levier », PCF, PS ou LR dénoncent la mise en place d’une structure «àsabotte». Un amendement LREM adopté en commission, et auquel le ministre n’est pas hostile, entend aussi permettre de regrouper les classes d’un collège et d’une ou plusieurs écoles environnan­tes au sein d’« établissem­ents publics des savoirs fondamenta­ux ». « Encore plus d’écoles qui fermeront, dans les zones peu denses éloignées des grandes villes », dénonce JeanLuc Mélenchon, tandis que le PCF y voit « une nouvelle brique dans la constructi­on d’une école à plusieurs vitesses ». Le gouverneme­nt devait ajouter en séance : des mesures pour l’inclusion des élèves handicapés, une obligation de « formation » pour 16-18 ans et un amendement pour sanctionne­r les parents ayant inscrit leur enfant dans un établissem­ent privé interdit.

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(Photo AFP) Jean-Michel Blanquer veut faire basculer l’école dans la culture de l’évaluation.

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