Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
« L’accord de paix, meilleure politique humanitaire »
Si le travail des humanitaires n’a jamais été une sinécure, il semble que la situation se soit encore compliquée ces dernières années. Le cas du navire Aquarius, obligé de mettre un terme à ses opérations de sauvetage en Méditerranée, en est la parfaite illustration. Médecins Sans Frontières et SOS Méditerranée, les deux organisations non-gouvernementales qui l’affrétaient, ont été régulièrement accusées par les autorités italiennes de complicité avec les passeurs. À bien y regarder, cette criminalisation des associations humanitaires n’est pas nouvelle. Pour Pascal Daudin, conseiller politique senior au Comité international de la Croix Rouge (CICR), elle remonte au 11 septembre 2001. « Depuis cette date, l’aide humanitaire doit démontrer qu’elle ne soutient pas les mouvements terroristes », déclare ce cadre du CICR, attendu à Toulon ce vendredi 15 février où il donnera une conférence sur le thème Les nouveaux défis de l’action humanitaire dans les zones à risques.
Critère discriminatoire
S’il n’est bien évidemment pas question de remettre en cause la lutte antiterroriste, la position des humanitaires est des plus inconfortables. « Pour nous, il n’existe pas de bonnes ou de mauvaises victimes. Notre seul critère discriminatoire est le besoin. Venir en aide à des populations qui sont malades, qui ont faim dans la bande de Gaza ou en Somalie ne signifie pas que nous soutenons le Hamas ou les Shebab. Mais pour intervenir dans ces zones, nous sommes obligés de négocier avec ceux qui les contrôlent », explique Pascal Daudin. Avant d’ajouter : « en tentant de remettre en cause les principes de neutralité, d’impartialité du droit international humanitaire, on met en danger les humanitaires ». Avec un budget global annuel estimé à 26 milliards de dollars, l’aide humanitaire n’a pourtant jamais eu autant de ressources. Et c’est tout le paradoxe ! « L’action humanitaire est critiquée mais la communauté internationale en a besoin pour contenir des crises qu’elle est incapable (par manque de volonté ?) de régler sur le fond. En fait, on demande aux humanitaires de se substituer aux politiques, aux diplomates », regrette Pascal Daudin.
1. Organisée par l’institut FMES, organisme spécialisé dans les questions géopolitiques autour de la Méditerranée, cette conférence se tiendra à la Maison des Technologies, à Toulon, à partir de 18 h 30.