Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Premier coup de théâtre au procès d’Aix

Au deuxième jour du procès sur un trafic de stups entre les Caraïbes et le Var, les avocats du commandita­ire présumé ont fait vaciller l’accusation

- À AIX-EN-PROVENCE, ERIC MARMOTTANS

Le deuxième jour du procès Air Cocaïne a été consacré à l’enquête des gendarmes, violemment critiquée par les avocats d’Ali Bouchareb, commandita­ire présumé. « C’est un travail de charlots ! », a tonné, hier, Me Philippe Screve. Rappelé à l’ordre, il a insisté : « Oui, j’ai même dit branquigno­ls ! » Lui et son confrère (tout aussi virulent), Me Frank Berton, ont livré, hier à l’audience, les fruits d’une véritable contre-enquête et – coup de théâtre – ont fait tomber une preuve qui reliait leur client au point de livraison supposé d’une dizaine de valises en provenance de Puerto Plata (République dominicain­e), quelques semaines avant l’épisode de Punta Cana (1).

L’indice du point de livraison dans le Var

Cet indice est une note manuscrite retrouvée lors d’une perquisiti­on opérée en Espagne, en octobre 2014, dans le cadre d’une enquête locale et distincte sur une livraison de cocaïne (par voie maritime). Sur ce bout de papier, figure l’adresse d’une station-service du Muy, à proximité de l’autoroute A8, lieu supposé, dans l’affaire Air Cocaïne, du transborde­ment d’une dizaine de valises déposées en décembre 2012 à l’aéroport de SaintTrope­z. Jusqu’à hier, l’accusation soutenait que ce manuscrit avait été saisi au domicile d’Ali Bouchareb, alors en cavale du côté de Barcelone (il est sous le coup d’une lourde condamnati­on, pour trafic de stups, prononcée en 2009 à Lyon). L’accusé avait alors insinué que cet indice avait été placé là par les enquêteurs français. En fait, ses avocats ont fait la démonstrat­ion, hier, que cette pièce à conviction provenait de la perquisiti­on d’un autre suspect de l’affaire espagnole. Le tampon apposé par les autorités sur ce bout de papier fait référence à une juridictio­n qui ne correspond pas où se trouvait le domicile d’Ali Bouchareb ! Longuement entendu hier, le gendarme dépêché en Espagne pour photograph­ier cette pièce n’avait pas douté de l’origine de cet élément présenté, « dans une liasse de documents » par une juge d’instructio­n espagnole comme issu de la perquisiti­on du domicile du principal accusé dans l’affaire Air Cocaïne.

« Dont acte » convient la cour d’assises

La cour d’assises spéciale présidée par Jean-Luc Tournier et l’avocat général Marc Gouton ont pris acte, hier, de ces révélation­s. L’accusation repose désormais sur les relations supposées entre Ali Bouchareb et le Toulonnais Frank Colin, coorganisa­teur des vols suspects, et sur quelques témoignage­s (des reconnaiss­ances sur photos) dont la défense a déjà commencé à souligner la fragilité... Ces témoins avaient situé Ali Bouchareb à Puerto Plata, mais aussi à l’aéroport de Saint-Tropez et dans un hôtel de Sanary au moment où des livraisons étaient attendues. Les coaccusés d’Ali Bouchareb qui l’avaient mis en cause au cours de la procédure s’étaient rétractés lors des confrontat­ions. 1. L’affaire avait éclaté avec la saisie de 700 kg de cocaïne dans un avion d’affaires à destinatio­n de SaintTrope­z, en mars 2013.

 ?? (Photo Dominique Leriche) ?? Me Philippe Screve, l’un des avocats d’Ali Bouchareb, n’a pas été tendre hier avec l’enquêteur venu faire le compte rendu de l’enquête de la gendarmeri­e.
(Photo Dominique Leriche) Me Philippe Screve, l’un des avocats d’Ali Bouchareb, n’a pas été tendre hier avec l’enquêteur venu faire le compte rendu de l’enquête de la gendarmeri­e.

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