Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Air Cocaïne : un douanier toulonnais trop serviable
La défense de François-Xavier Manchet a poussé hier les enquêteurs, entendus au procès de l’affaire Air Cocaïne, à relativiser le rôle présumé du douanier du port de Brégaillon
Au troisième jour du procès Air Cocaïne, à Aix-en-Provence, le président de la cour d’assises spéciales s’est adressé au douanier toulonnais du dossier. « Vous rendez vite service à vos amis. Sans vous soucier des conséquences ? » Réponse de François-Xavier Manchet : « Non… » Seconde question du président Jean-Luc Tournier : « Et c’est votre façon de faire ? » –« Hélas oui. » Le douanier François-Xavier Manchet est poursuivi pour avoir fait ouvrir le portail, le 9 décembre 2012, de l’aéroport de Saint-Tropez afin de faciliter la prise en charge, dans deux véhicules, de huit à dix valises en provenance de République dominicaine.
Un document de complaisance
On lui impute également l’établissement d’une déclaration d’entrée d’espèces – 500 000 euros – au nom de son ami Frank Colin, coorganisateur des vols suspects. Celui-ci utilisera ce document de complaisance pour couvrir des transferts d’argent à la banque. Hier, à l’occasion des auditions des chefs d’enquête de la douane et de la gendarmerie, Me Thierry Fradet, l’avocat du fonctionnaire des douanes (en poste au port de Brégaillon, avant d’être suspendu), s’est efforcé hier de les pousser à relativiser la nature et la portée des faits reprochés. L’ouverture du portail ? « [L’enquête] a noté qu’il y avait du laxisme. Il n’y avait pas que Manchet pour ouvrir le portail », a convenu le major (désormais retraité) François Ségura de la section de recherches. L’ancien gendarme estime surtout que le douanier a pu faire office de faire-valoir, « un élément que Frank Colin a pu mettre en avant pour montrer son efficacité » vis-à-vis du donneur d’ordre. « C’est comme ça que je le ressens », a précisé l’enquêteur.
« Il n’a pas reçu d’argent »
L’avocat toulonnais a également fait prendre acte à la cour que le document de complaisance n’avait qu’une valeur déclarative (la réglementation évoluera en 2016). « Ce n’est pas un justificatif, ça ne donne pas un droit. » François-Xavier Manchet savait-il quel usage en serait fait ? Le fonctionnaire devra également s’expliquer sur la consultation d’un fichier de la douane à la demande de Frank Colin. « Il vous réserve son explication », a promis Me Fradet. En attendant, le pénaliste a aussi fait dire à Michel Horel, enquêteur de la douane chargé du dossier, que François-Xavier Manchet est quelqu’un « d’hyperactif, qui aime rendre service ». Et l’accusé « n’a pas reçu d’argent dans [l’affaire Air Cocaïne] ».