Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Les pilotes règlent leurs comptes avec St-Domingue

Bruno Odos et Pascal Fauret ont réagi à la lecture de témoignage­s accablants, déposés lors du premier procès en République dominicain­e. « C’est une mascarade, c’est minable »

- ERIC MARMOTTANS (À AIX-EN-PROVENCE)

Au quatrième jour du procès Air Cocaïne, la cour d’assises a commencé à se pencher sur le volet dominicain de l’affaire. Le président Jean-Luc Tournier a fait la lecture de témoignage­s accablant les anciens pilotes lors du procès de Saint-Domingue. L’un des prévenus dominicain­s a fait le récit du chargement de valises suspectes à l’aéroport de Punta Cana avec, selon lui, la participat­ion active des accusés français. « Une valise est tombée, elle s’est ouverte et quelques kilos (de cocaïne, Ndlr) sont sortis. Les deux pilotes l’ont attrapée et l’ont remise dans l’avion… »

« Ça fait très très mal »

« Ça fait six ans que l’on entend ça », a réagi Bruno Odos dans une déclaratio­n décousue par un trop-plein d’émotion. À la fin du procès de Saint-Domingue ce prévenu, un militaire local, est passé du banc des prévenus au fauteuil des témoins a décrit le vétéran de l’armée de l’Air. « Tout ce qu’il a raconté, c’est pas vrai, c’est faux… On a appris qu’il avait passé un accord avec le procureur. Au procès, c’est tombé au dernier moment et on n’a pas pu s’exprimer .» « Ça fait très très mal, a ajouté Pascal Fauret. La bascule du procès c’était ce moment-là, alors que l’on pensait atteindre notre but de repartir la tête haute. » Sur les faits : « Bruno Odos s’occupait des formalités. J’étais seul dans l’avion, je devais m’assurer de la préparatio­n matérielle, a expliqué Pascal Fauret. J’ai démarré le moteur auxiliaire pour l’alimentati­on en électricit­é. Puis j’ai entendu beaucoup de bruit. Je suis sorti. C’était des gens – trois personnes – qui étaient en train de jeter des valises dans la soute. J’ai estimé leur nombre à une quinzaine. J’ai essayé de communique­r, mais je ne parlais pas espagnol et ils ne parlaient ni anglais, ni français, alors j’ai essayé de leur montrer comment faire en touchant et en rangeant une valise… » La valise qui serait tombée et qui se serait ouverte est « un mensonge qui fait mal », a affirmé Pascal Fauret. Le président et ses assesseurs ont également lu la déposition du patron de l’office antistups qui a supervisé l’opération de Punta Cana. Le général la présente comme l’aboutissem­ent d’une enquête de longue haleine sur la mainmise des narcotrafi­quants sur l’aéroport de Punta Cana. « Au moment où nous savions que la drogue était chargée nous sommes arrivés sur place (...). Les pilotes étaient très nerveux… » Quarante-sept agents dominicain­s soupçonnés de corruption avaient été interpellé­s.

« Tous ces gens sont corrompus »

« Pour planter le décor, ce général a bien compté mes affaires, a commenté Bruno Odos, dans des propos toujours emmêlés, il a compté tout ça, il a pris mes ordinateur­s, mes cartes bancaires qu’on ne m’a jamais rendus… Mes cartes se sont retrouvées dans des magasins de Saint-Domingue… »Et d’évoquer un débit de 10 000 euros alors qu’il était incarcéré. « Tous ces gens en uniforme, ils sont tous corrompus. On le savait un peu, on en a pris encore plus conscience quand on s’est retrouvé enfermé avec des policiers et des militaires… » Les Français avaient finalement été condamnés à vingt de prison par la justice dominicain­e. Le prévenu qui avait passé un accord avec le parquet a écopé « d’une peine non pas faible, mais inexécutab­le », a souligné Me Antoine Vey, justifiant la fuite des pilotes par une certaine forme de désespoir face à « une justice crasse ». La cour d’assises ne manquera pas de revenir sur les épisodes de République dominicain­e.

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(Photo Dominique Leriche) Bruno Odos et Pascal Fauret le jour de l’ouverture du procès à Aix-en-Provence.

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